Le mot jeu vient du mot latin jocus, qui, d'après le Gaffiot, veut dire, dans son sens premier, plaisanterie, badinage, et, dans son sens second, au pluriel, joci, les jeux, les ébats, les amusements.
Dans les différents petits textes de Dominique de Rivaz qui composent son dernier livre, ces deux sens
voisinent, d'une page l'autre, se suivent et, quelquefois, finissent par se confondre.
En quelques lignes, en effet, ces textes, qui occupent les pages impaires du livre, plantent un décor, racontent une histoire où le jeu prend des sens dérivés de ces deux familles d'acceptions et met en opposition, ou en parallèle, le monde des adultes et celui des enfants.
Dans ces textes il y a un certain nombre de fillettes - peut-être toujours la même. Elles imitent les gestes ou les amusements, innocents ou pas, de leur père ou de leur mère.
Ces fillettes sont parfois victimes d'un homme dont les jeux de main sont ceux d'un vilain et qu'on leur demande de dessiner, pour l'identifier.
Ces fillettes peuvent être moqueuses quand vient l'adolescence ou embarrassées quand elles ont un besoin pressant ou quand elles
se transforment avec la puberté.
Les garçons ne sont pas plus innocents qu'elles quand ils lorgnent l'entrejambe de la bonne ou quand ils jouent à embrasser leurs soeurs sur la langue, sans en bien comprendre toutefois la finalité.
Filles ou garçons, ils n'aiment guère les odeurs et les haleines fortes, d'alcool ou pas, que les adultes exhalent et se pincent alors le nez.
Quelques faits divers, vrais et cruels plus tard, ce sont les adultes et leurs relations troubles entre eux qu'épingle l'auteur, toujours en aussi peu de mots.
Car Dominique de Rivaz raconte ces histoires bien observées, ou bien imaginées, quelque peu perverses, en allant à l'essentiel, sans se perdre en digressions inutiles. Il en résulte des textes forts qui prouvent bien qu'il n'est nullement besoin de délayer pour être entendu, et qui ont l'avantage de pouvoir être relus indéfiniment, pour en goûter toute la quintessence.
L'ensemble de ces textes constitue un monde pas toujours avouable, ni avoué, dont les accents sont ceux de l'authenticité, qui est révélateur de notre humaine condition, où les jeux font accepter bien des choses qui ne le seraient certainement pas autrement.
Francis Richard
Jeux, Dominique de Rivaz, 144 pages, Zoé