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Critique: "Her" de Spike Jonze, sortie le 19 Mars.

Par Trailers & News @TrailersandNews

"Her" de Spike Jonze avec Joaquin Phoenix, Scarlett Johansson, Amy Adams, Rooney Mara, Olivia Wilde, Chris Pratt et la voix de Scarlett Johansson.

Le synopsis: Los Angeles, dans un futur proche. Theodore Twombly, un homme sensible au caractère complexe, est inconsolable suite à une rupture difficile. Il fait alors l’acquisition d’un programme informatique ultramoderne, capable de s’adapter à la personnalité de chaque utilisateur. En lançant le système, il fait la connaissance de ‘Samantha’, une voix féminine intelligente, intuitive et étonnamment drôle. Les besoins et les désirs de Samantha grandissent et évoluent, tout comme ceux de Theodore, et peu à peu, ils tombent amoureux…

Le film sortira le 19 Mars

Critique:

Possédant toutes les qualités d’HAL 9000 de 2001: Odyssée de l’espace et du personnage féminin de Code Lisa sur France 2, “Samantha”, un operating system doublé par Scarlett Johansson, est le compagnon virtuel customizable parfait. Arrivant dans un ère où des mots tels que “intuitif” et “réactif” sont utilisés pour décrire les derniers ordinateurs et gadgets, Her est une love story du 21ème siècle qui capture l’ambiance de notre époque à la perfection et trouve un nouveau chemin pour raconter l’histoire de cœur la plus originale depuis le premier “Je t’aime”.

Comme le premier film de Spike Jonze, Dans la peau de John MalkovichHerfouille profondément dans les réserves d’émotion de la métaphysique. Dramatiser l’histoire d’amour d’un homme solitaire avec un ordinateur est presque aussi absurde qu’imaginer un portail menant directement à la tête de John Malkovich, mais à un certain moment, la fantaisie loufoque laisse place à un désire brut et à la souffrance transformant de par sa profondeur le film en tour de magie.

Dans un futur pas si distant que ça où les pantalons à taille haute et la grosse ‘stache de Tom Selleck sont de retour à la mode, Theodore Twombly (Joaquin Phoenix) compose des lettres personnelles pour des personnes trop occupées ou trop inarticulées pour les écrire d’elles-même. Il excelle à ce job demandant assez d’empathie pour rendre l’artificiel romantique, mais lorsque Samantha entre dans sa vie, il découvre qu’il y a encore plus maître en la matière. Se remettant difficilement d’un divorce avec Catherine (Rooney Mara), une femme qu’il connaît depuis le jardin d’enfance, Theodore n’est pas prêt pour se commettre à nouveau dans une relation mais Samantha se prouve difficile à résister. Bien moins un operating system qu’une conscience en constante évolution, elle le reconstruit subtilement autour de ses remarques et l’apprécie finalement bien plus qu’aucun autre être humain. Par la même, elle devient alors capable d’éprouver des sentiments d’affection et de jalousie qui rend cette relation virtuelle quasi impossible à distinguer d’une relation physique et humaine.

Écrivant en solo pour la première fois et récompensé pour son travail aux derniers Oscars, Jonze a concocté un script possédant les qualités rappelant ses précédentes collaborations avec Charlie Kaufman. Bien que Jonze soit plus doux et romantique que Kaufman, il y a quelque chose d’audacieux dans sa manière de traiter ce scenario avec autant de sincérité. Bien entendu, Jonze est au courant du côté absurde de cette relation, et il y trouve régulièrement des rires, comme lors de cette scène de “morning after” où Theodore envoie balader son ordinateur sous prétexte qu’il n’est pas prêt pour une relation sérieuse comme si c’était un coup d’un soir. Pour que Her puisse fonctionner, il était important que Theodore et Samantha puisse partager les même rapports de flirts et de private jokes que n’importe quel autre couple pourrait avoir. Elle est une extension parfaite de lui-même, un rêve que Steve Jobs aurait pu avoir où un ordinateur est entièrement et parfaitement intégré à son utilisateur. Appelez ça du narcissisme si vous le souhaitez, mais au final chacun cherche un partenaire qui le comprenne et l’apprécie et il n’y a rien de plus humain pour Theodore que de tomber amoureux de cette entité qui reflète si bien son image.

Bien que Her capture à merveille l’esprit de notre temps (lisse, antiseptique, étrangement aliénant de par sa connectivité), c’est fondamentalement avant tout un film sur le divorce et le cœur brisé. Samantha est clairement une relation pour mieux rebondir du point de vue de Theodore qui n’a même pas encore signé les papiers de son divorce et lorsque ce moment dévastateur arrive enfin, on ne peut que se souvenir d’un autre script de Kaufman,celui d’Eternal Sunshine of the Spotless Mind. Si il y a une lueur d’espoir dans Her, c’est l’idée que nous sommes capables d’apprendre de nos leçons et d’évoluer, peut-être pas aussi rapidement que Samantha, mais assez pour nous comprendre nous même et les autres humains autour de nous pour la prochaine fois.

Joaquin Phoenix rend la relation de Théodore avec Samantha crédible avec son côté antisocial et son vague à l’âme mais Johansson est clairement la révélation ici: utiliser la voix d’un des plus grands sex symbols de la planète est la définition de contre intuitif, mais la voix de Johansson est graveleuse et séductrice, suggérant des formes où aucun n’existe. Transportée à travers l’oreillette de Théodore, cette voix offre une intimité qui ferait presque oublier l’absence de présence corporel de Samantha. Le corps n’est pas là, mais il ne peut s’empêcher d’y penser.

“Qu’est-ce qui ne va pas?” demande Théodore à Samantha en s’attendant à une réponse aussi complexe que ce qu’il pourrait entendre d’une femme réelle au milieu d’une relation compliquée. C’est un moment profond de passage, dans un film qui en est rempli : Il y a une certaine comédie lorsque l’on demande à un ordinateur ce qui ne va pas, mais la réponse nous semble pourtant étrangement importante  Samantha étant devenue aussi réelle pour le public que pour Theodore. Her nous rappelle à quel point l’amour est une fusion de psychés, et comment la mémoire qu’il engendre peut vibrer et perdre en goût lorsque c’est fini.

L’amour peut-il transcender le corps? C’est un débat sans fin, mais avec le plan final magnifique de Her, Spike Jonze semble avoir la réponse.

Note: 9,5/10

Critique de Sofiane Ait Kaci


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