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Juifs et musulmans, une mémoire en partage

Publié le 25 mars 2014 par Oz
Juifs et musulmans, une mémoire en partage C

Treize siècles à vivre ensemble en tout cas, côte à côte, souvent en symbiose, à ne connaître jamais de conflits irréparables. Et puis cent ans pour tout détruire, cent ans pour devenir ennemis irréductibles, au point que toute réconciliation semble aujourd’hui impossible. C’est pourtant à une forme de raccommodage que nous convie Arte avec la diffusion de « Juifs et musulmans : si loin, si proches « . Une série documentaire en quatre volets de cinquante-deux minutes, pour recoudre ce siècle avec les treize qui l’ont précédé. Sans préjugés ni partis pris, pour mieux le cerner et le comprendre. Pour rappeler tout simplement, sous la lumière crue de l’histoire, que juifs et musulmans ne naissent pas pour se détester. En respectant l’ordre chronologique, de 610 à nos jours, « Si loin, si proches » contribue pour commencer à redonner une place plus juste aux événements, et permet de ne « pas tout juger à travers le seul prisme du conflit israélo-palestinien », précise Karim Miské, le réalisateur. Ce n’est pas rien.

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La rigueur des faits. Et le contrepoids onirique des images. Le cocktail est inédit : « Juifs et musulmans : si loin, si proches » se regarde à la fois comme un documentaire et comme un long-métrage d’animation. Au total, pas moins de soixante-dix minutes de dessins animés, signés Jean-Jacques Prunès, spécialiste des illustrations et animations pour enfants, réalisateur notamment des « Histoires comme ça », de Kipling, ou du « Cheval Soleil » (adaptation du roman éponyme d’Anne Labbé). Jean-Jacques Prunès a posé son trait épuré mais fort, sobre et pourtant épique, ses pastels et ses éclaboussures vermillon comme un symbole sur les quatorze siècles de relation entre juifs et musulmans, de Médine à Paris en passant par Cordoue, Alger et Jérusalem. Quand l’histoire devient contemporaine, au quatrième chapitre, les dessins s’estompent naturellement mais ne disparaissent pas. Ils laissent aux archives, aux films et photographies d’époque la barre du témoin principal. En retrait, ils suggèrent les déchirements et font écho à la violence du réel.

Comme une boucle, ils renvoient aux origines, au premier chapitre de l’histoire (610-721). Dans la société préislamique, « l’appartenance religieuse compte peu« , précise Michael Mumisa, de l’université de Cambridge. « Les juifs sont alors des Arabes comme les autres ».  »Juifs et Arabes partagent la même philosophie, les mêmes croyances, écrivent les mêmes poèmes, ajoute Tudor Parfitt, de l’Ecole des études orientales et africaines de Londres. Ils ont des idéaux communs. Par exemple, ils croient aux vertus masculines de la guerre et de l’équitation. Les deux communautés pratiquent l’agriculture dans les oasis et le commerce inter-oasis. » Le judaïsme va évidemment beaucoup influencer l’islam naissant. A son apogée, c’est l’islam qui inspirera un nouveau judaïsme. Il y aura encore des massacres, comme celui des juifs de Grenade, en 1066 ; des combats menés côte à côte, comme contre les soldats du Christ à Jérusalem ; la nostalgie partagée de l’Andalousie qui irriguera longtemps les musiques et les chants des deux communautés de l’autre coté de la Méditerranée.

Sur les aquarelles de Jean-Jacques Prunès et l’histoire qui déroule son grand ruban, une trentaine d’intervenants internationaux posent leurs lettres d’experts. Juif ou musulman, peu importe : chacun a une raison de se sentir concerné. Ainsi, explique Karim Miské, le réalisateur, « ils ne nous parlent pas de trop loin ». Technique, le verbe se fait plus personnel, l’intime et l’émotion affleurent à mesure que l’histoire se rapproche. « Il est important de mettre des mots là-dessus, surtout face au repli communautaire des deux côtés », relève Kamal Hachkar, un des intervenants, réalisateur de Tinghir-Jérusalem, les échos du mellah, film de 2011 qui retrace la quête des juifs disparus du village marocain de ses ancêtres.

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