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Titre : Cubitus T36 « Ne mord jamais » Auteur : Dupa Editeur : Le Lombard Année : 1999 Résumé : Cubitus est un gros chien blanc, dont le maître répond au doux nom de Sémaphore. Mais si cubitus est drôle, joueur, inventif, il est aussi goinfre, paresseux et rancunier. En plus, il parle ! Avec sémaphore, mais aussi avec Sénéchal, le chat de la voisine, et puis avec tout ce qui passe, dont un gentil petit escargot et une puce bien tenace... Notre avis : Cubitus continue sa carrière entamée en 1968 dans les pages du journal de Tintin. Ce tome 36 paru en 1999 - vous avez dit Cosmos 1999 ? Pardon, je sors - fut l'un des derniers réalisés par la main de Dupa, son créateur. L'histoire reste la même : une série de gags d'une page, dotés d'un titre, mettant en scène Cubitus, Sémaphore et leur petit univers, à quelques exceptions près. Certains albums mettent en scène ce chien foufou pour une longue aventure ou une série d'histoires courtes.
En tout cas, pour ce tome 36, c'est le gag à la page qui règne. A la relecture aujourd'hui, je trouve que certains d'entre eux tombent un peu à plant, étant trop prévisibles, soit à cause des titres qui donnent une information clé sur la future chute, soit à cause du gag en lui-même, qui donne une impression de déjà-vu. Certains fonctionnent bien et souvent, ce sont ceux qui jouent sur la corde de l'absurde, créant des situations inattendues et pleines d'humour. Notons aussi que Cubitus fait partie de ces BD qui se mettent en abyme. De nombreux gags (au moins un dans ce numéro 36) rendent le scénariste responsable de certains faits ! Et parfois, Dupa lui-même se met en scène. C'est aussi une des formes d'humour qui fonctionne assez bien car elle surprend toujours le lecteur. Les personnages sont bien caractérisés : Cubitus, Sémaphore, Sénéchal ont leurs qualités et leurs défauts, qui les rendent humains et attachants. Le trio Cubitus, Sémaphore et Sénéchal pourrait rappeler le trio Achille Talon, Papa Talon et Lefuneste. Certains dialogues reprennent la verve de Greg. Mais autant Achille est cultivé et fat, autant Cubitus est inculte et loin d'être prétentieux. Les caractères des personnages ne se recoupent pas, voire même s'inversent. Sénéchal étalant parfois sa culture à un Cubitus qui veut juste savoir si le chat a lu son dernier album ! Chez Cubitus, la nature, les animaux, tout le monde parle et 'exprime, ce qui contribue à créer ces moments drôles et pleins de tendresse, surprenants et émouvants. J'ai apprécié les échanges du chien avec ce petit escargot qui traîne dans le jardin, ou encore avec cette puce dont il n'arrive jamais à se débarrasser. C'est aussi curieux de relire ces anciens albums, (n'oublions pas, ce tome 36 date de 1999 mine de rien) car certains gags reposent sur des événements anciens, comme celui où Sémaphore vient annoncer l'arrivée des cartes à crédits. En effet, l'argent et la société sont bien présents, même si c'est de manière légère, car de nombreuses histoires reposent sur le fait qu'il faille régler des dettes, des factures, faire des courses, trouver de l'argent pour entretenir un chien si goinfre. Cubitus ne vit pas dans un monde idyllique où tout va bien, mais il habite un monde proche du nôtre, où ces préoccupations monétaires, toujours traitées avec humour, ont pris plus d'importance avec le temps, pour le héros comme pour nous, lecteurs. Cubitus, graphiquement, s'inscrit dans la ligne franco-belge - C'esdt loin de la ligne Maginot, ça, non ? Pardon, je sors -. Les personnages sont stylisés, mais très expressifs avec leurs gros yeux. Les décors sont simplifiés. Dans le jardin, une maison en silhouette dans le fond rappelle qu'on est à l'extérieur. La nature représentée par des rangées de buissons identiques. Et soudain, des passages laissent place à une floraison de détails, le salon de Sémaphore, par exemple. En regardant bien certaines cases, j'ai découvert avec plaisir tous ces petits éléments absurdes qui rajoutent à l'humour de la série. Le t-shirt de sémaphore, une maison qui projette des étoiles par sa cheminée dans le fond, la demeure de sémaphore dont les murs changent de couleur selon l'humeur ou les situations et puis ces moments où Cubitus demande quelque chose à son maître, et l'interrompt alors qu'il se livre à des activités anodines, qui prennent un drôle de sens quand on regarde bien. Comme Sémaphore qui passe l'aspirateur... dans le jardin ! Les couleurs sont simples et permettent de bien situer les lieux de l'action. Le cadrage reste classique, le plus souvent quatre bandes de une à trois cases. Et l'originalité de la série ne repose visiblement ni sur ses cadres, ni sur ses angles de vues. Cubitus eut suffisamment de succès pour être adapté à la fin des années quatre-vingts en une série de dessin animée par un studio... Japonais ! Baptisée « Don-don Domeru to Ron », elle met en scène Cubitus et ses amis, avec un générique au démarrage très sympathique ! Dupa eut donc, avant son décès en 2000, le plaisir de voir les épisodes de cette série. En fut-il satisfait ? Je l'ignore. Cubitus, au bout d'une quarantaine d'albums, a donné beaucoup et il n'est pas facile de se renouveler, ce qui peut expliquer que des gags de ces derniers albums ne soient plus très drôles ou originaux. Mais ce chien attachant, bougon et flemmard restera toujours un sacré personnage de BD. Aujourd'hui, la série a été reprise par Michel Rodrigue au dessin, accompagné de différents scénaristes. Elle s'intitule « Les Nouvelles aventures de Cubitus » et compte déjà environ huit albums. Je n'ai pas eu le plaisir de les lire, j'ai grandi avec l'ancienne série dont j'ai pu voir évoluer le style de dessin, jusqu'à ce tome 36. A mon goût, Cubitus n'est peut-être plus la série la plus drôle que j'ai lue, mais il est agréable de s'y replonger le temps de quelques gags. Alors si vous avez l'occasion de découvrir la vie de pantouflard de ce bon gros chien de maison, empruntez un tome à votre bibliothèque et tentez l'aventure... au coin du jardin ! Zéda et le colibri rencontrent Cubitus et Sémaphore David