Savez-vous que 80% des transactions mondiales de paiement par mobile sont réalisées en Afrique de l'Est ? Ou encore que 19 millions de Kenyans (c'est-à-dire 45% de la population totale du pays) utilisent désormais le porte-monnaie virtuel M-Pesa, qui a déclenché cette incroyable vague à partir de 2007 ?
Alors, quand Vodafone (qui contrôle Safaricom, l'opérateur à son origine) annonce l'introduction de la même technologie en Europe, l'information attire inévitablement l'attention. Pour l'instant, seule la Roumanie est concernée par la nouvelle offre. Celle-ci permettra aux 7 millions de personnes sans compte bancaire (entre autres), d'échanger de l'argent depuis leur téléphone (de 1 à 30 000 lei, soit l'équivalent de 0,22 à plus de 7 500 euros), via l'envoi de commandes par SMS (ou, plus précisément, par USSD, un mécanisme apparenté).
Comme dans les autres pays où M-Pesa est disponible, 300 boutiques et autres points de présence Vodafone (qui seront étendus à 2 000 d'ici à la fin de l'année) assurent un rôle d'agences, dans lesquelles les clients peuvent effectuer dépôts et retraits sur leurs comptes. Par ailleurs, outre les virements entre particuliers, le service permet d'acquérir des minutes de communication, de payer des factures (d'énergie, de téléphone…), voire de réaliser des achats, chez les commerçants qui l'accepteront.
La Roumanie n'est vraisemblablement qu'un premier pas dans le déploiement de M-Pesa. Avec une licence de monnaie électronique, Vodafone est prête à envahir l'ensemble du continent. Cependant, pour l'instant, il ne serait question que d'aborder 1 ou 2 autres pays d'Europe centrale ou orientale, mais pas l'Europe occidentale. Il est vrai que le porte-monnaie mobile « basse technologie » présente beaucoup plus d'opportunités dans les régions peu bancarisées, largement équipées en téléphones « basiques ».
Le succès sera-t-il au rendez-vous ? Difficile à prédire, tant les paramètres en jeu semblent extrêmement complexes. La Roumanie est, toutes proportions gardées, relativement proche des marchés où le système s'est imposé, par son équipement bancaire limité et son importante population rurale. Elle représente donc un choix logique pour une première tentative, mais ses différences et ses particularités en font aussi nécessairement un terrain d'expérimentation plein d'incertitudes.
De plus, dans les tentatives d'expansion précédentes, en Tanzanie, Afghanistan, Inde…, les résultats sont mitigés et, au mieux, le décollage prend du temps. Or, en Europe, une prise de position sur le paiement mobile sera probablement une course contre la montre car, lorsque le smartphone se sera imposé dans les poches des consommateurs, les services de M-Pesa sembleront bien limités…