Du bon usage des chaussures à lacets

Chaussures à lacets : quelques principes de base

Alors que les « calcéophiles » continuent de s’étriper pour décider si le cousu blake est supérieur au cousu goodyear, il n’est pas toujours aisé pour un gentleman en herbe de trouver des conseils concernant le bon usage des chaussures, et particulièrement des chaussures à lacets. Un Oxford peut-il être porté avec un denim ? Un derby doit-il être associé à un costume ? Comme à l’accoutumée, les règles nous viennent de nos amis d’Outre-Manche. Sachez tout d’abord que les modèles lisses sont les plus formels, les plus habillés. Même chose en ce qui concerne la couleur noire, ce qui signifie qu’un Richelieu (Oxford) noir est par définition le modèle imposé par le port d’un costume sombre.

Qu’est qu’un richelieu, me direz-vous, qu’est ce qui le caractérise ? Les petites pièces de cuir qui soutiennent les lacets sont appelées des garants. Là se trouve la vraie différence entre les deux grandes familles de chaussures lacées que sont les Richelieu (Oxford) et les derbys. Observez vos chaussures. Si les garants se dressent lorsque vous essayez de les lacer, vous possédez des derbys. Si, à l’inverse, ils ne font qu’un avec l’empeigne, vous avez affaire à des Richelieu. Cette différence est parfaitement logique. Un derby était à l’origine destiné à la campagne, où il était indispensable de pouvoir serrer ou relâcher ses chaussures. C’est la raison pour laquelle porter des derbys noirs est une aberration stylistique. Le derby étant par essence décontracté, il ne peut être noir. Marron, aubergine, bleu ou vert si vous voulez, mais pas noir.

Parlons maintenant texture. Comme je l’ai dit, plus un soulier présente un aspect lisse, plus il est destiné à un usage formel. On en déduit spontanément que les chaussures en veau velours ou en nubuck sont réservées à un usage casual. Les bouts fleuris (petites perforations sur le bout de la chaussure, esthétiques, bien sûr, mais dont la fonction originelle était de faciliter l’écoulement de l’eau) le sont également.

Comme on le voit, l’école britannique est une école de codification. Cependant, à la suite des Napolitains, qui, au début du XXème siècle, ont extrait la « substantifique moelle » des meilleurs tailleurs du Row et créé un genre à part, les Italiens ont lentement mais sûrement modifié les usages du port de la chaussure.

Chez eux priment l’aspect esthétique et le confort. Cette tendance va de pair avec le choix de leurs vestes et costumes. Ils osent. Par exemple, alors qu’il est impossible d’imaginer un Anglais de la City arborer des chaussures en veau velours ou autres que noires (ils se gênent un peu moins pour leurs costumes), il est très fréquent de voir nos amis transalpins porter de beaux modèles en veau velours marron, des derbys à double boucle ou bien encore des mocassins. Le fait est qu’ils sont généralement plus attirés par les tenues dépareillées, et que la veste est le point central de leur mise. Ils peuvent donc se permettre de choisir des chaussures moins strictes…

Photo : Andrea Luparelli ; source : Agnelli-esque.