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Rencontre avec Samia Orosemane

Publié le 16 avril 2014 par Blog Youhumour @youhumour

On l’a retrouvée à la terrasse d’un café, elle a gagné le coup de coeur des marraines des Impertinentes 2014 avec son sketch ! Interview avec Samia Orosemane, une humoriste haute en couleurs !

Les couleurs et les Impertinentes

Dans ton sketch aux Impertinentes, tu nous as fait découvrir ou redécouvrir les accents des différents pays d’Afrique. Est – ce que tu penses que la différence entre les cultures tend à se perdre aujourd’hui ?
Absolument pas. On cherche à nous le faire perdre, mais en réalité, elles sont toujours là, dieu merci, car il y a les anciens qui sont encore là et qui s’y tiennent, et c’est magnifique, ce panel de couleurs, de cultures, d’accents, moi j’adore, et je trouve que c’est ce qui fait la beauté de la France. Quand je partais au pays, quand j’étais plus jeune, on partait pour deux mois, j’en avais marre de ne voir que les mêmes visages partout, c’était horrible, et quand je rentrais en France, j’étais contente de voir toutes ces nationalités, toutes ces couleurs et origines mélangées, qui apportent cette richesse qu’est la France.

On a pu te voir à la finale des Impertinentes la semaine dernière. Tu as incarné beaucoup de personnages, de la « mama africaine » à la tante, en passant par toi même. As – tu une préférence pour un des personnages ?
Il y en a deux que j’aime particulièrement dans mes personnages, c’est la maman maghrébine, car elle représente ma maman, paix à son âme, qui avait beaucoup de caractère, beaucoup de charisme, et qui était très très loin du cliché qu’on se fait de la femme voilée, soumise, à la cuisine, séquestrée, car c’était elle la boss à la baraque. Et la maman d’Afrique subsaharienne, qui a ce tempérament, ce bagou, elle est capable de remettre les gens à leur place en une fraction de seconde. J’adore les femmes fortes.

Aimerais – tu qu’il y ait plus d’évènements du genre des Impertinentes et voudrais – tu y reparticiper s’il y en avait à nouveau ?
Avec un immense plaisir ! J’ai beaucoup apprécié la démarche, de mettre des artistes en avant, et d’autant plus des femmes, comme nous ne sommes pas beaucoup, dans ce métier là, d’avoir laissé une place privilégiée aux nanas, un concours pour les filles, j’ai trouvé ça super – avoir un parterre de professionnels dans une jolie salle, ça n’arrive pas tous les jours. Avec les pros, les journalistes, tous ces gens capables de t’apporter des choses, comme Sophie Mounicot qui était présente en tant que ma marraine, Anne Roumanoff qui est adorable, avoir l’occasion de rencontrer ces gens là, c’est quand même quelque chose d’inoui. Donc biensûr que j’encourage ce genre de concours, et que ça fait du bien.

On a pu te voir à l’Académie Youtube SACD dernièrement, as – tu des projets solo ou collectifs sur la plateforme Youtube, qui est aujourd’hui un tremplin d’humoristes et de comiques ?
J’ai un petit passif sur Youtube, c’est pour ça que j’étais allé poser quelques questions à l’Académie SACD Youtube. Je jouais le rôle d’une maman maghrébine qui s’appelait Aïcha, ça s’appelait « Aicha vous dépanne ». La vie est en panne, Aicha vous dépanne. Aicha donnait des conseils aux jeunes. On a très vite fait deux millions de vues, et la collaboration ne s’est pas très bien terminée avec les gens avec qui j’avais travaillé, et donc du coup j’aurais aimé remettre en piste le personnage, parce que tous les gens qui me suivent la réclament : « Tata nous manque », c’est incroyable car cette Aicha touchait à la fois des personnes d’origine maghrébine, mais aussi d’ailleurs. Peut être qu’elle leur rappelle une voisine de quartier, la comère du coin, j’en sais rien, ils réclament ce personnage qui pour moi représentait vraiment ma maman, avec ses conseils, son côté rentre – dedans, à asséner des vérités, de manière assez dure, et cash, qui font finalement rire tout le monde.

Ton humour se veut empreint de couleurs, comme l’indique le nom de ton one man show, quelles valeurs cherches – tu à transmettre avec l’humour ?
Simplement l’ouverture et l’acceptation de l’autre. Avant, je disais la tolérance, mais je me suis rendue compte que le mot tolérance n’était pas positif, car il signifiait accepter l’autre malgré tout, alors qu’en fait non, il ne faut pas l’accepter malgré tout mais il faut être heureux de l’accepter comme il est, et il faut trouver ça encore plus génial, car en rencontrant des gens qui n’ont absolument rien à voir avec moi, je m’enrichis. Chaque jour, tu apprends davantage, moi j’adore être à l’écoute des autres, rencontrer des gens qui n’ont absolument rien à voir avec ce que je suis, je suis quelqu’un de très curieux et qui aime beaucoup le contact, quelle que soit la personne, quel que soit son caractère, quelles que soient ses origines, pour moi ce qui est important c’est la rencontre. Je pense que rien ne se fait sans une rencontre, et pour moi c’est vraiment important d’aller vers les autres, et de communiquer.

Aujourd’hui, as – tu accompli ton rêve de scène ? Que peux – tu dire à ceux qui qualifient ton humour de communautaire ? (s’il y en a)
Oui j’ai accompli mon rêve de scène, toute ma vie j’ai rêvé de pouvoir un jour vivre de ce métier, et aujourd’hui c’est ce qui commence à se faire, donc je suis très contente, et ceux qui disent que mon spectacle est communautaire, c’est parce qu’ils ne l’ont pas vu. A moins que l’ont considère que la France est une communauté, car ce dont je parle, c’est de cette France, mon spectacle ce sont des valeurs universelles, celui du respect des parents, de l’acceptation de l’autre tel qu’il est, d’un refus du racisme ou de cataloguer les gens, aller au delà des apparences. Donc ceux qui pensent que mon spectacle est communautaire, je les encourage à aller voir, et revoir leur jugement.

Samia Orosemane à la terrasse des Folies

Les conseils aux débutants

Quelles sont les qualités humaines et les efforts qui font un bon humoriste selon toi ?
La principale qualité je pense c’est l’humilité. Sans humilité on n’arrive à rien, si on est incapable de se remettre en question, et de mettre le doigt sur là où on a merdé, on n’y arrivera pas. Je pense que le parcours et les efforts qu’il faut fournir, c’est un minimum de cours de théâtre. Ca me fait un peu rire, quand on rencontre des gens qui s’imaginent qu’ils sont humoristes parce qu’ils ont réussi à faire rire leurs copains en bas du quartier, c’est très gentil, mais c’est un métier, ça s’apprend, j’ai pris des cours de théâtre à Paris, je pense qu’il ne faut pas non plus faire un cursus, mais prendre le minimum de cours, parce qu’on parle pas de la même manière en bas avec ses potes, et sur la scène, il faut savoir maitriser l’espace, occuper la scène de manière plus que convenable, pour que les gens entendent et comprennent ton propos, pour moi c’est un minimum. Après tu peux faire ce que tu veux, mais il faut au moins avoir la base. Quand tu veux être plombier, tu ne t’improvises pas plombier en testant tous les boulons et et regardant si cela fonctionne, sinon tu risques de provoquer des catastrophes, donc l’idéal, si on veut devenir humoriste, c’est d’abord de passer par cette case là, d’abord apprendre le théâtre, les classiques, les bases.

Comment on peut choisir un sujet de spectacle, et y a – t – il une recette miracle ?
Je ne pense pas qu’il y ait de recette miracle, mais je pense que ce qui est important, c’est de parler de ce qu’on aime, et de ce dont on a envie de parler. Cela ne sert à rien de vouloir emprunter un style ou de vouloir entrer dans un truc parce que « ça a fonctionné », il faut parler de quelque chose qui te touche, plus ça va te toucher, plus ça va être sincère et plus les gens vont aimer. Moi dans mon spectacle, c’est ma vie que je raconte, et les gens viennent toujours me voir en me disant « mais c’est vrai que tu es mariée avec un noir ? Que tu n’as pas d’enfants ?» etc., et en fait, tout ce que je raconte est vrai, et du coup cela les touche. Quand je raconte mon histoire, c’est l’histoire de tout le monde que je raconte en même temps, parce que toutes ces choses que j’ai pu rencontrer, tout le monde les a rencontrées à un moment donné.

Notre article s’adresse aussi aux humoristes en herbe, quel serait ton conseil contre le trac ?
Aller faire caca. (rires) Il y en a qui respirent, moi c’est le caca, il faut aller faire caca. De toute façon, il ne faut pas complètement éradiquer le trac, parce que c’est grâce au trac que l’on donne le meilleur de soi même. Sarah Bernard avait rencontré une fille dans les coulisses, la fille était en train de lui dire qu’elle n’avait pas du tout le trac. Elle lui a alors répondu avec un sourire « ne vous inquiétez pas, ça viendra avec le talent ».

Quels seraient tes propres conseils pour les jeunes humoristes qui souhaitent se faire connaître du public ?

Samia Orosemane

Alors, certains disent qu’il faut choisir, moi je n’ai pas choisi. Toutes les fois où on m’a invité à venir jouer, j’ai couru. Sans réfléchir, sans calculer, sans savoir où on m’invitait. Je me rappelle même d’une fois où ça m’a mis un peut en porte à faux, parce que je me suis dit « mais merde, qu’est – ce que j’ai fait ? », j’étais super contente de participer, puis après en cherchant, je me rends compte que c’est le premier cabaret homosexuel féminin de France. (rires) Là je me dis donc « mince, ce n’est peut être pas l’endroit pour moi », puis j’ai réfléchi, je me suis posé des questions et j’en ai parlé autour de moi, et puis il y a une maman maghrébine qui m’a dit sur la question « et c’est quoi le problème ? Eux ont l’ouverture d’esprit de t’inviter pour faire un spectacle chez eux, il faut avoir l’ouverture d’esprit d’aller faire un spectacle là bas, quand tu vas aller là bas, tu ne vas pas devenir homosexuelle toi-même, mais tu vas expliquer que nous sommes des gens ouverts ». Elle a eu totalement raison, je suis du coup allée jouer, et ça s’est hyper bien passé. J’ai fait un sketch où je défendais le voile, et elles ont adoré, et ont pleuré de rire, m’ont félicitée et remerciée !

Finalement les appréhensions n’étaient que dans ma tête. Partout où on m’a invitée à jouer, j’ai couru, sauf lorsque c’était politisé et à l’encontre de ma manière de penser. Quand on a cherché à me récupérer politiquement, pour des associations comme « ni putes ni soumises » par exemple, que  je ne cautionne absolument pas, ou qui soutiennent des causes avec lesquelles je ne suis pas du tout d’accord, je m’éloigne. C’est le seul aspect qui peut me déranger, sinon j’ai joué partout. Hier, j’ai joué dans des escaliers, il y avait des filles qui ont fait un grand événement entre nanas, elles ont mis des stands un peu partout dans une salle qui n’avait pas de scène. Donc si tu joues au milieu, et que les gens sont debout, personne ne peut te voir, donc je me suis placée dans les escaliers de secours, je me suis mise sur les marches, et j’ai joué. Je suis une humoriste tout terrain ! J’ai joué pour des roms, dans des chapiteaux, où on donnait à manger pour les nécessiteux, et des roms ne parlant même pas le français, j’ai joué dans des caves, dans un salon de thé, avec des nanas qui faisaient des milk – shakes, mais toutes ces situations, c’est génial, parce que c’est ce qui m’a forgée, et qui fait qu’aujourd’hui, dans un beau théâtre, je prends du plaisir à jouer ! (rires)

Pour conclure

Pour conclure, aurais – tu un petit mot pour les fans qui nous suivent sur Youhumour ?
Simplement que s’ils veulent vraiment rigoler, ils peuvent venir à mon spectacle ! Je joue tous les mardis, au théâtre populaire dans le XXème, jusqu’à fin juin, si dieu veut, et il y a des invitations sur billetreduc, pour ceux qui veulent venir et avoir des places gratos, comme ça ils sont sûrs de rien perdre à part une heure de leur temps !

Vas tu faire Avignon 2014 ? Et quelle est ton actu ?
Je ne ferai pas Avignon, mais aurai peut être une date exceptionnelle, j’avais une amie qui m’a proposé de jouer une fois exceptionnellement, ma fan page est accessible pour ceux désirant me suivre et savoir quand je passerai !

Samia Orosemane est au théâtre populaire du Reinitas, tous les mardis à 20h jusqu’à juin 2014.

Elsa en compagnie de Samia Orosemane


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