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Capitalisme apatride

Publié le 02 mai 2014 par Malesherbes

Dans notre société libérale, quel est le but de l’entreprise ? Faire du profit, générer le plus d’argent possible. Quel peut bien être l’objectif de General Electric en achetant la division énergie d’Alstom ? Je distingue deux possibilités :

- Mettre à profit la qualité de ses équipes et de ses produits pour augmenter son chiffre d’affaires et ses bénéfices.

- Se débarrasser d’un concurrent dangereux en vendant ses produits, récupérant ses clients et réalisant des économies par la suppression des unités qui font  double emploi.

Pourquoi la division énergie d’Alstom est-elle à vendre ? Parce qu’elle est à court de trésorerie. Et si elle se trouve dans une telle situation, c’est peut-être parce que ses dirigeants, habiles à lui assurer un leadership technologique, se sont révélés de piètres financiers. Si l’on en croit le Canard enchaîné, cela n’a pas empêché le salarié qui préside aux destinées de l’entreprise, Patrick Kron, de voir ses revenus, situés à 2 180 000 euros pour l’exercice 2010-2011, passer à 2 295 000 pour 2011-2012 et bondir à 2 555 000 pour 2012-2013. Voilà qui est bien singulier dans un modèle économique efficace parce que récompensant la performance.

Si Alstom accepte de brader son savoir-faire, Martin Bouygues, détenteur de 29,4% de son capital, empochera l’argent retiré de la vente de ses actions. La vente de la division énergie d’Alstom pouvant rapporter 10 milliards, la part de Bouygues pourrait être de l’ordre de 3 milliards. Comment croire qu’il ait besoin de cette trésorerie, lui qui, il y a moins d’un mois, était prêt à verser 16 milliards d’euros pour racheter SFR !

Il est contraire à l’intérêt national de brader ainsi des joyaux de notre industrie. Contrairement à l’idée selon laquelle le capitalisme serait apatride, des considérations nationales viennent trop souvent fausser le jeu. Ainsi, en 2008, EADS avait remporté l’appel d’offres lancé par le Pentagone pour ses futurs avions ravitailleurs. Boeing a alors  réussi, avec l’aide des parlementaires démocrates, à faire annuler l’appel d’offres. Il fut modifié pour favoriser Boeing. L’avionneur américain fut ensuite déclaré vainqueur. Le patron d’Airbus, Tom Enders, s’était fâché ainsi : « "Contrairement au premier appel d'offres, que nous avions clairement gagné il y a deux ans, l'appel d'offres en cours est biaisé en faveur de l'avion plus petit et moins performant de la concurrence (...) Il ne s'agit plus ici ni du meilleur avion, ni de concurrence loyale. »

Les cocoricos d’Arnaud Montebourg ne sont pas si ridicules qu’ils paraissent. Mais il vaudrait mieux conduire dans notre pays une vraie politique industrielle.


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