Magazine Société

"Ailleurs" de Bertrand Schmid

Publié le 14 mai 2014 par Francisrichard @francisrichard

Qui n'a pas eu envie de partir ailleurs, de laisser tout derrière lui, de commencer une nouvelle vie, d'"être dans la liberté"? A fortiori quand au bout du chemin il y a une belle rencontre espérée.

Le narrateur du petit livre de Bertrand Schmid - petit livre par la taille et par le nombre de pages, mais d'une tout autre dimension par la qualité du style -, part ainsi, ailleurs, sa petite valise d'enfant à la main.

Il prend d'abord le train, puis le bus. Il achève son parcours à pied. Il a quitté la brume de ses montagnes pour d'autres montagnes bien différentes, suivies d'une morne plaine. On ne peut pas dire qu'il ait gagné au change. Tout ici semble vide et déserté, humide et ruisselant.

Seulement elle l'attend. Il ne l'a jamais vue, mais il a entendu sa voix. Certes il a vu des photos d'elle, "mais des photos ce n'est pas elle". S'il n'y avait pas eu elle, son voyage aurait avorté. Et, quand il la voit enfin et quand ils s'étreignent, il en oublie sa valise...

Il n'est pas déçu: "Elle est de Milo, mais des lumières dedans, des chairs pâles de Manet, des azurs comme ce lac où déjeunent les poètes, avec le vert qui les soutient, les muses qui les épuisent."

Alors à ses pieds il est déchu de lui-même: "Ce sera ça, nous deux, des redditions, pas de cessez-le-feu, pas de choix, la promesse est rompue."

Sa compagne travaille et se lève tôt matin. Il se lève de même. Mais que faire de ses journées? Chaque jour, il promène son ennui dans des rues toutes semblables, isolé par la pluie. "Chaque once de son absence", il la passe dans des troquets à boire des bières.

Puis un jour sa compagne l'emmène chez des amis en forêt. Pendant le souper il ne pipe mot, mais, à un moment donné, après que la politique a occupé la fin du repas et qu'il s'est terminé par un silence pesant  - "on ne veut plus voir l'autre, qui n'est plus à portée" - il le rompt en disant: "Je sors un peu".

Pendant le périple nocturne qu'il accomplit, il perçoit et saisit enfin le sens de son voyage. Qui le mène enfin chez lui.

"Le but n'est pas seulement le but, mais le chemin qui y conduit", dit Lao-Tseu...

Francis Richard

Ailleurs, Bertrand Schmid, 80 pages, Editions d'autre part


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Francisrichard 12008 partages Voir son profil
Voir son blog

Dossier Paperblog

Magazine