Michel Godet.
Voilà des mois que j’attendais l’occasion. Elle m’a été offerte par la chaîne Arte, hier soir, qui diffusait le film « les nouveaux chiens de garde » (1). En effet, les journalistes mis en cause dans ce documentaire sont la caution d’une société marchande où règnent évidemment l’argent, ses contempteurs, ses adorateurs, le tout sous le couvert de propos d’experts et de spécialistes, toujours les mêmes, qui courent les plateaux et les soirées mondaines. L’émission C dans l’air est caricaturale de cette mauvaise habitude. Quand je dis que j’attendais l’occasion, je pense en particulier à tous ces messieurs — Il s’agit d’un univers surtout masculin — dotés d’une science infuse colossale, sachant tout sur tout, parlant de tout mieux que tous les autres, racontant comment marche le monde et comment réparer la machine quand elle est en panne pour qu’il marche mieux encore. Surtout dans leur propre intérêt. Le comble de l’histoire c’est que les pannes (ou les crises économiques) sont fabriquées et ensuite racontées par ses minorités très agissantes, ces quelques dizaines de grands patrons, d’économistes distingués, de journalistes en mal de notoriété, dont le crédo est toujours le même depuis des décennies : il faut baisser les salaires, augmenter le temps de travail, supprimer tous les acquis de la Résistance à nos jours. Et on les paie grassement pour ça ! Le champion de ce discours illuminé est un certain Michel Godet (2), professeur à l’Ecole des Arts et métiers (50 000 euros de salaire par an) conférencier à ses heures et surtout «conférincé» à 80 000 euros par an pour ses PDF répétitifs. Et c’est lui qui demande la baisse du SMIC ! J’«adore» Michel Godet. Il n’est animé par aucun doute. Il affirme, il assène, il assure. Il est l’un des invités préférés d’Yves Calvi, sur France 5. Avec Elie Cohen, Christian Saint-Etienne, et quelques autres amis il représente le gratin des économistes (ou considérés comme tels) rejoints par Christophe Barbier, l’homme à l’écharpe rouge de l’Express, Dominique Reynié, de Fondapol, tous membres du fameux Cercle d’où rien ne doit sortir des réunions mensuelles (ni musique, ni parole) au cours desquelles on mange bien et on trinque à la santé des chômeurs. Comme dirait Coluche : « Du cercle, vous n’en êtes pas, ni vous ni moi n’en serons jamais. » Il faut s’appeler Alain Minc, Jean-Hervé Lorenzi, Bernard Brunhes, Patrick Poivre d’Arvor, David Pujadas, Franz-Olivier Giesbert, Christine Ockrent (18 000 euros pour faire un « ménage ») etc. pour accéder au pinacle. Le pinacle de quoi ? De la pensée toute faite, du prêt à porter idéologique de notre société libérale (au plan économique seulement) qui veut que capitalisme rime avec optimisme et finance avec chance. Invités à s’exprimer après la diffusion du film, Elie Cohen et Franz-Olivier Giesbert ont dit tout le mal qu’ils pensaient de ce navet-torchon si peu respectueux de l’ordre établi et, surtout, commenté par des économistes tels Frédéric Lordon, du « Monde Diplomatique » dont le style n’a rien à voir avec le titre du journal. Frédéric Lordon appelle un chat un chat et n’hésite pas à lister tous ces membres des conseils d’administration dont les seuls titres publics sont cités par les médias. On peut lire Professeur de ceci, expert de cela. Mais jamais, au grand jamais, on ne connaît la liste des sociétés au sein desquelles ils et elles émargent et qu’ils ou elles défendent, même sur les chaînes publiques comme n’hésitait pas à le faire Mme Isabelle Giordano du temps où elle était sur France Inter ! Il était temps qu'on dénonce ces amitiés convenues et suspectes. Nous suivrons dorénavant avec un regard différent et distancié ces émissions grand public où les participants étalent une science orientée vers deux objectifs : le conservatisme et le conformisme.(1) lu sur le site de présentation du documentaire : « Les médias se proclament "contre-pouvoir". Pourtant, la grande majorité des journaux, des radios et des chaînes de télévision appartiennent à des groupes industriels ou financiers intimement liés au pouvoir. Au sein d'un périmètre idéologique minuscule se multiplient les informations pré-mâchées, les intervenants permanents, les notoriétés indues, les affrontements factices et les renvois d'ascenseur. En 1932, l'écrivain Paul Nizan publiait Les chiens de garde pour dénoncer les philosophes et les écrivains de son époque qui, sous couvert de neutralité intellectuelle, s'imposaient en véritables gardiens de l'ordre établi. Aujourd'hui, les chiens de garde sont journalistes, éditorialistes, experts médiatiques, ouvertement devenus évangélistes du marché et gardiens de l'ordre social. Sur le mode sardonique, Les nouveaux chiens de garde dénonce cette presse qui, se revendiquant indépendante, objective et pluraliste, se prétend contre-pouvoir démocratique. Avec force et précision, le film pointe la menace croissante d'une information produite par des grands groupes industriels du Cac40 et pervertie en marchandise. » (2) Michel Godet obtient un doctorat en statistique à l'Université Paris Sorbonne-Paris IV en 1974, puis un doctorat en sciences économiques à l'Université Paris-1 Panthéon-Sorbonne en 1976 (Sujet de thèse : « Crise de la prévision, essor de la prospective »). Il est membre de la Commission économique de la Nation et membre de l'Académie des technologies. Il est aussi membre du Comité directeur de l'Institut Montaigne. Il a été membre du Conseil d’analyse économique rattaché au Premier ministrede 2004 à 2012. Il est administrateur d’AGIPI. Il est aussi membre depuis 2004 du conseil d’administration du groupe mondial laitier et fromager Bongrain. Il a créé le Cercle des Entrepreneurs du Futur qui organise chaque année le Grand Prix de l'impertinence et des bonnes nouvelles. Il est officier de l'ordre de la Légion d'Honneur et de l'ordre national du mérite. (source Wikipédia)