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[anthologie permanente] Dominique Meens

Par Florence Trocmé

Dominique Meens publie Dorman aux éditions P.O.L. 
 
 
III 
OVIDE AUGMENTÉ 
Métamorphoses 
(I-II, 530) 
 
voilà six vers pour épigraphe au livre 
si tu juges devoir les placer prends 
 
ce volume orphelin qui que tu sois 
qui le touches donne-lui place en ville 
protège ce qui n’a paru sans être 
pris au bûcher funèbre de l’auteur 
quelque faute que ce poème aurait 
l’eût-on permis je l’aurais corrigée 
 
 
 
porté à dire les formes changées 
en corps neufs dieux qui vous changez et elles 
soufflez-moi ce départ dès l’origine 
et jusqu’ici sans fin tenez mes vers 
 
avant terre et mer et tout le couvert 
de ciel la vue de la nature était  
une en tout son orbe dite chaos 
une masse grossière et embrouillée 
rien d’autre qu’un poids inerte et brouillon 
le grain des choses discordant mal jointes 
Soleil n’offrait nulle lumière au monde 
Lune ne s’arrondissait en croissant 
n’était suspendue en l’air dans sa ronde 
la terre d’elle-même équilibrée 
Amphitrite n’embrassait ses rivages 
tout du long terre et ciel de l’air de l’eau 
instable la terre immobile l’onde 
sans éclat l’air aucun ne recevait 
sa forme ils se butaient tous en un corps 
le chaud et le froid l’humide et le sec 
le dur et le mou sans poids combattaient 
 
nature meilleure ou le dieu rachètent  
le litige du ciel les terres et 
des terres les eaux ils tranchent et séparent 
essorent de l’air dense un ciel limpide 
tout cela délogé sorti de la masse 
aveugle en leurs lieux est laissé en paix 
la force ignée sans poids du ciel convexe 
jaillit fait sa place au plus haut de l’arche 
tout proche l’air et sa légèreté 
plus dense la terre tire vers elle 
nombre d’éléments que sa lourdeur presse 
le flux humide se possède enfin 
clôt tout entier l’orbe d’un seul tenant 
 
ainsi disposant quel qu’il fût des dieux 
l’amas découpé coupes remembrées 
la terre d’abord qu’il n’y ait de part 
inégale il l’agglomère en grand orbe 
puis répand les flots qu’ils gonflent aux vents 
emportés jusqu’à boucler les rivages 
ajoutés sources grands marais et lacs 
il ceint l’eau qui court de rives obliques 
elle selon est absorbée ou gagne 
la mer là reçue l’eau bat le rivage 
plutôt que plus haut ses berges libre 
[...] 
 
Dominique Meens, Dorman, éditions P.O.L., 2014, pp. 197-201.  
 
Dominique Meens dans Poezibao : 
bio-bibliographie, ext. 1, ext 2 


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