C’est au 8 rue Elzévir que le Musée Cognacq-Jay a consacré trois salles de ses locaux à l’exposition ‘Le Siècle d’or de l’éventail, du Roi Soleil à Marie-Antoinette’. C’est une exposition qui n’impressionne pas par la quantité des œuvres exposées mais par leur qualité. La mise en valeur d’un objet de pas très grande utilité vous diriez? Je vais vous contredire en disant que si!, l’éventail n’est pas un objet ordinaire, c’est un outil de communication, comme vous allez le voir si vous visitez l’exposition, assez subtile mais, aussi un accessoire important dans la garde-robe d’une femme qui se respecte.
C’est pendant la Renaissance que l’éventail va être importé en France, mais la période qui fait de Paris la capitale de cet objet artisanal, est celle de XVIIIème siècle. Les éventaillistes français se servaient de matières très fines comme l’ivoire, l’or, l’argent, l’écaille et bien sûr des pierres précieuses pour élaborer les plus beaux éventails de toute l’Europe. Très somptueux, mais extrêmement fragile, l’éventail devient aussi un objet de communication sociale parmi la haute aristocratie de XVIIIème siècle notamment avec les scènes dessinées qui y sont représentées. Les thématiques peuvent être très diverses: des scènes de bataille, des événements marquants la période de l’élaboration, des mythes de l’Antiquité comme celui de Cléopatre, ou de Pygmalion et Galatée, des illustrations d’œuvres éternelles de la littérature comme celui de Don Quichotte, des scènes d’amour ou des paysages de pays exotiques, des portraits. L’exposition nous montre aussi qu’avec le temps on aperçoit une évolution dans l’élaboration avec les éventails pliables, les éventails loupes mais aussi dans les thèmes avec ce qu’on appelle les éventails coquins avec un côté assez érotique que je vous laisse découvrir en visitant l’exposition ;). Elle montre l’excellence de ces artisans et leur rend hommage.
On voit des œuvres d’une extrême finesse et précision des détails. Mais…finalement on se demande si le but caché de cette exposition n’est pas de nous suggérer que la touche finale de cette oeuvre d’art, qui est la manière dont la femme la porte, ne fait pas sa vraie beauté mystérieuse? Parce qu’à vrai dire c’est la grâce avec laquelle on porte l’éventail et l’importance qu’on lui donne qui captent l’attention sur l’objet.
Cette petite réflexion sur le fusionnement (dont les limites sont floues) de l’esprit fin avec le bel objet, m’a fait penser à l’époque moderne. C’est comme si avec le temps on a perdu la subtilité de la communication interpersonnelle. Avec les nouvelles technologies et Internet on oublie le vrai échange. On joue avec le temps et la distance mais on n’arrive pas à jouer avec le fond, avec ce qui rend une conversation intéressante. Je voudrais citer Dominique Wolton, directeur de recherche au CNRS, qui dit: "Pourtant si depuis cent ans le progrès technique dans les technologies de communication est considérable, est-ce pour autant que les hommes se comprennent et se tolèrent mieux ? Il y a hélas peu de rapport entre le progrès scientifique et technique, indéniable dans le domaine de l’information et de la communication et le "progrès" des hommes vers plus de compréhension."
Absolument d’accord avec lui, je laisse les réflexions à vous.
Informations pratiques: Vous pouvez visiter la belle exposition ‘Le Siècle d’or de l’éventail, du Roi Soleil à Marie-Antoinette’ jusqu’au 2 mars 2014 au musée Cognacq-Jay, 8 rue Elzévir dans le 3ème arrondissement de Paris