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La France, libre de cultiver ou non des OGM

Publié le 12 juin 2014 par Blanchemanche
AFP 12 JUIN 2014
La culture de maïs génétiquement modifié à Chappes, en France, le 20 mai 2014.
La culture de maïs génétiquement modifié à Chappes, en France, le 20 mai 2014. (Photo Sandra Laffont. AFP)

Ce compromis entre l'UE et ses Etats membres doit désormais obtenir l'aval du nouveau Parlement européen, qui entre en fonctions le 1er juillet.


Les gouvernements européens ont laissé jeudi le champ libre aux producteurs de semences OGM dans les Etats disposés à les cultiver et espèrent avoir le soutien du nouveau Parlement européen pour un accord très attendu par les multinationales américaines. Sept OGM sont en attente d’une autorisation de culture dans l’UE, dont le maïs MON810 de Monsanto et le maïs TC1507 du groupe Pioneer.Tous ont obtenu le feu vert de l’Autorité européenne pour la sécurité des aliments (EFSA), mais le président de la Commission européenne José Manuel Barroso a préféré les retenir pour éviter l’affrontement avec les gouvernements. Le compromis approuvé jeudi à Luxembourg par les ministres de l’Environnement de 26 des 28 Etats membres donne la possibilité aux Etats d’autoriser ou d’interdire la culture sur «tout ou partie de leur territoire».Le processus recommande désormais aux semenciers de limiter géographiquement leur demande d’autorisation pour la culture aux seuls pays qui le veulent. Le MON810, seul OGM actuellement autorisé dans l’UE et qui attend le renouvellement de cette autorisation, est cultivé en Espagne, au Portugal, en Roumanie, en République Tchèque et en Slovaquie. Mais huit pays dont la France ont pris des clauses de sauvegarde pour l’interdire sur leur territoire.Si l’entreprise refuse de restreindre le champ de sa demande, les pays qui refusent de le cultiver seront habilités à l’interdire. Ils devront transmettre à la Commission les motivations de leur décision. Une liste non exhaustive de motifs a été élaborée et des combinaisons sont possibles. La liberté de choix rendue aux Etats a emporté leur décision de soutenir le compromis élaboré par la présidence grecque de l’UE. Si le nouveau Parlement l’avalise, «cela fera sauter un verrou qui paralyse le processus d’autorisation des OGM depuis quatre ans», a souligné jeudi Tonio Borg, le commissaire à la Santé responsable de ce dossier sensible.

LIBERTÉ DE CHOIX

«Le nouveau système garantit aux Etats la possibilité de choix, s’ils souhaitent cultiver ou non», a expliqué la ministre française de l’Environnement Ségolène Royal. Ce nouveau système «permet du sur mesure», s’est félicitée la ministre néerlandaise Wilma Mansveld.Tous les gouvernements ne partagent pas cet enthousiasme. La ministre de l’Environnement du Grand Duché du Luxembourg Carole Dieschbourg a ainsi émis de sérieuses réserves sur la solution retenue en raison du «rôle important laissé aux entreprises de biotechnologies» et a dit redouter «une vague d’autorisation de cultures» dans l’UE. Le représentant belge Olivier Belle s’est également abstenu sur ce compromis. La crainte des disséminations transfrontalières motive ces réserves. Ségolène Royal a souhaité que ce sujet soit abordé avec le Parlement européen.Des doutes sont également émis sur la validité des motifs d’interdiction en cas de litige au sein de l’Union européenne et devant l’OMC. Les défenseurs de l’environnement entendent batailler pour convaincre le nouveau Parlement européen de refuser le compromis. Mute Schimpf, de l’organisation des Amis de la Terre, a ainsi dénoncé le pouvoir inacceptable donné aux compagnies comme Monsanto sur toute décision d’interdire la culture de leurs produits. «Les gouvernements doivent avoir la possibilité de bannir des semences OGM sans avoir à demander la permission aux compagnies», a-t-elle soutenu dans un communiqué.

«UN ACCORD AU RABAIS»

L’ancienne député européenne française Corine Lepage a pour sa part dénoncé «un accord au rabais» qui «ne comporte aucune base juridique solide pour réellement interdire les OGM et confère un pouvoir exorbitant aux compagnie dans le processus de décision».Si l’accord adopté jeudi par les gouvernements de l’UE est avalisé par les députés, il ouvrira les terres de l’Union européenne à la culture des OGM, une mesure attendue par les semenciers depuis quatorze ans. Mais ces derniers sont loin d’être satisfaits.«Cette proposition permet à un pays de décider d’une interdiction pour n’importe quel motif», a déploré un de ses porte-parole, Brandon Mitchener. «Ce serait tragi-comique si cela n’adressait pas un signal aussi mauvais au reste du monde, à savoir que l’on peut sans difficultés ignorer la science et interdire des produits pour des raisons populistes», a-t-il argumenté.Brandon Mitchener a confirmé que Monsanto ne comptait pas présenter de nouvelles demandes d’autorisation de culture dans l’UE et allait continuer ses investissements dans les biotechnologies dans d’autres régions que l’Europe.

BRUXELLES VA AUTORISER LA CULTURE D'UN NOUVEAU MAÏS OGM 

Par ailleurs, un nouveau maïs transgénique, le TC1507, va être prochainement autorisé à la culture dans l’Union européenne, a annoncé jeudi à Luxembourg Tonio Borg, le commissaire chargé de la Santé.«La décision a été prise, mais à ce stade je ne peux pas vous dire quand elle sera appliquée», a-t-il expliqué au cours d’une conférence de presse, à l’issue d’une réunion des ministres de l’Environnement de l’UE au cours de laquelle ont été approuvées de nouvelles règles pour les autorisations de culture OGM.La Commission rappelle ainsi brutalement les Etats à la réalité. Ils soutenaient en effet que cette autorisation serait retenue jusqu’à l’entrée en vigueur des nouvelles dispositions. Tonio Borg a souligné jeudi avoir été contraint de prendre cette décision par un arrêt de la Cour de Justice de l’UE (CJUE).

LES OGM AUTORISÉS SI LES ETATS NE S'ACCORDENT PAS POUR LES INTERDIRE

«La Commission n’a pas d’autre choix que d’approuver l’autorisation de culture», a-t-il insisté. La demande d’autorisation est en effet régie par les anciennes règles en vigueur dans l’UE. Elle prévoient que l’OGM est autorisé à la culture dès lors que les Etats ne sont pas parvenus à s’entendre pour l’interdire.La Commission avait été obligée de relancer le dossier du maïs TC1507 en novembre, après avoir été condamnée par la CJUE pour les retards pris dans la procédure d’autorisation, lancée en 2001 et bloquée depuis 2009 par les dissensions entre Etats. «Nous n’avons pas beaucoup de marge. Les Etats le savaient quand ils ont refusé de prendre une décision et de renvoyer la balle dans le camp de la Commission», a argumenté Tonio Borg.Cinquante voix, dont les 29 de l’Allemagne et les 12 de la Belgique, ont manqué en février aux 19 pays opposés à la culture de ce maïs transgénique pour réunir la majorité qualifiée requise de 260 voix afin d’interdire la culture du TC1507. La Commission a laissé passer les élections européennes du 25 mai, mais elle ne peut plus retarder davantage la décision d’autoriser la culture. Les Etats pourront l’interdire sur leur territoire, mais leurs clauses de sauvegarde pourront être attaquées en justice.AFP

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