Le dépistage systématique par mammographie est remis en question par différentes études, dont le récent rapport d’un institut suisse indépendant, basé l’analyse des dernières données médicales et scientifiques disponibles. L’exemple de la Suisse où seuls certains cantons ont déjà mis en œuvre le dépistage systématique, offre ici l’opportunité de se reposer la question d’un dépistage par mammographie du cancer du sein systématique ou opportuniste. Ces conclusions suggèrent l’abandon, à terme, des programmes de dépistage systématique par mammographie.
Le Swiss Medical Board est un organe indépendant dont la mission est d’analyser les processus diagnostiques et les interventions thérapeutiques du point de vue de la médecine, de l’économie, de l’éthique et du droit. A noter, en Suisse, les femmes âgées de 50 et 69 ans (vs 50-74 ans en France*) sont invitées dans certains cantons, à se soumettre à l’examen radiologique. Le rapport basé sur l’évidence médicale actuelle remet à nouveau en question le dépistage systématique par mammographie. Une remise en question déjà documentée par de nombreuse études, comme celle publiée en2012 dans les Annals of Internal Medicine, ou encore en 2011 dans le Briitish Medical Journal, pour ne citer que les plus récentes.
*Rappel : En France, le dépistage du cancer du sein, par mammographie, est généralisé sur l’ensemble du territoire depuis 2004, pour les femmes âgées de 50 à 74 ans, tous les deux ans et sans avance de frais.
Le cancer du sein ne devient généralement symptomatique qu’à un stade avancé de la tumeur. L’objectif du dépistage par mammographie consiste à détecter les tumeurs à un stade plus précoce pour pouvoir prolonger la survie, avec une bonne qualité de vie, des femmes concernées.Il convient, lors de cette détection précoce, de distinguer entre le dépistage opportuniste, qui se déroule dans le cadre d’une relation médecin-patient individuelle, et les programmes de dépistage systématique proposé à l’ensemble des femmes appartenant à une tranche d’âge.
Un nouvel examen de la littérature : Le Conseil d’experts du Swiss Medical Board a effectué un nouvel examen de la littérature à partir de 132 études scientifiques sélectionnées et 5 finalement retenues. L’objectif était de réévaluer l’efficacité et la rentabilité économique d’un dépistage systématique du cancer du sein par mammographie. C’est-à-dire de vérifier si la mammographie systématique est efficace à déceler des tumeurs à un stade précoce, à apporter un bénéfice en termes de survie et de réduction des décès liés au cancer du sein. Les chercheurs ont également évalué l’incidence des effets négatifs du dépistage (faux positifs) et le rapport coûts-efficacité.
La méta-analyse révèle que le dépistage systématique par mammographie peut contribuer à déceler des tumeurs à un stade précoce et réduire légèrement la mortalité liée au cancer du sein, des effets positifs évalués à 1 à 2 cas de décès évités sur 1.000 femmes dépistées régulièrement. Ainsi, la réalisation d’un dépistage systématique se traduit par une réduction relative de la mortalité du cancer du sein de 20 % environ. La mortalité globale n’est cependant pas affectée.
Un bénéfice jugé faible au regard des effets indésirables des 10% estimés de faux positifs qui vont entraîner des examens supplémentaires, des traitements inutiles avec des répercussions physiques et psychiques. La conclusion est claire :
Le rapport déconseille le dépistage systématique et recommande de procéder à un examen médical approfondi et d’informer les femmes concernées des effets souhaités et des effets indésirables avant décision d’un dépistage par mammographie. En synthèse, le dépistage par mammographie devrait, selon l’organisme, s’effectuer, en fin de compte dans les mêmes conditions que le dépistage par PSA pour le cancer de la prostate, c’est-à-dire de manière opportuniste, par des patientes à profil de risque élevé et dans le cadre d’un processus de décision éclairé conjoint patiente-médecin. Le Swiss Medical Board recommande ainsi,
·l’abandon à terme des programmes de dépistage systématique par mammographie,
·la limitation dans le temps des programmes existants –dans certains cantons-
·la mise en place d’un contrôle qualité plus strict de toutes les formes de dépistage par mammographie
·un examen médical approfondi et une information compréhensible de la patiente, préalablement au dépistage par mammographie.
Ces nouvelles données ne modifient en rien les Recommandations pour la France.
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Source: Swiss medical Board Dépistage systématique par mammographie