Au cours de cet entretien du 3 juillet, M. Sarkozy s’est à plusieurs reprises élevé contre le sort qui lui était réservé : « Monsieur Cahuzac […] n’a pas fait une seconde de garde à vue ». Pour une excellente raison. Aucun juge n’a eu à le convoquer. C’est lui qui a demandé à être reçu par le juge auquel il a fait des aveux, reconnaissant les délits qui lui étaient reprochés. Cette désapprobation de la mise en garde en vue est surprenante de la part de M. Sarkozy. C’est en effet lui qui, comme ministre de l’Intérieur puis comme président, a provoqué par une politique du résultat une croissance du nombre des gardes à vue. Entre 2002 et 2009, leur nombre a augmenté de 67 % pour culminer à 830000.
« Est-il normal par ailleurs qu’on choisisse pour instruire une affaire, où mon nom est cité, et j’y reviendrai, un magistrat qui appartient au syndicat de la magistrature ? » Les magistrats ont-ils le droit de se syndiquer ? Avant de leur confier une affaire, convient-il de s’enquérir de leur tendance politique, de leur religion, de leur orientation sexuelle, de la couleur de leur peau, de leur région d’origine, etc… ?
« Je demande à ceux qui nous écoutent ou nous regardent : qui aimerait, pour avoir à trancher un différend entre lui et la Justice ». Là, M. Sarkozy s’égare et montre qu’il n’a peut-être pas vraiment compris ce qu’était la Justice. On s’adresse à elle pour régler un différend que l’on peut avoir avec un tiers, un voisin, un parent, un fournisseur. Elle, elle veille au respect de la loi. Elle est souveraine, on ne peut avoir avec elle un différend. Elle est la Loi.
« Je ne veux aucun avantage, mais je vous rappelle que j’ai été interrogé dans le cadre de l’affaire dite Bettencourt, qui a été serinée pendant deux ans, et notamment au moment de la présidentielle, aux oreilles des Français. J’ai eu un non-lieu. J’ai été lavé de toute accusation. » Inexact. M. Sarkozy n’a probablement pas lu l'ordonnance de non-lieu qui lui a évité d’être poursuivi. On peut y lire : « le comportement incriminé de Nicolas Sarkozy, à savoir sa demande d’un soutien financier occulte […] formulée à Liliane Bettencourt, personne âgée et vulnérable, […], est un comportement manifestement abusif. » Comme certificat d’honorabilité, on peut rêver mieux.
À propos, qui aurait dit : « Parce qu'un Président de la République c'est quelqu'un qui n'a pas plus de droits, plus de privilèges et moins de devoirs. Mais quelqu'un qui au contraire a moins de droits, moins de privilèges que quiconque et plus de devoirs. » ? Ne cherchez plus, c’est le candidat Sarkozy, dans un discours à Tours, le 10 avril 2007. On ne peut qu’admirez une telle abnégation. Dommage qu’il y ait si loin des paroles aux actes.