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The leftovers (2014): mieux vaut être parti que de rester

Publié le 23 juillet 2014 par Jfcd @enseriestv

The Leftovers est une nouvelle série de dix épisodes diffusés sur les ondes de HBO aux États-Unis et au Canada depuis la fin juin et sera aussi disponible sur Super Écran au Québec dès septembre. L’action démarre alors qu’un jour, 2 % de la population disparait de la surface de la Terre sans que l’on sache pourquoi, qu’il s’agisse de bébés, de vieillards, parents, etc. Trois ans plus tard, on nous transporte dans la petite ville fictive de Mapleton où la communauté s’apprête à souligner la disparition de ces êtres chers. La vie ici a bien changé depuis le drame qui affecte tout le monde et certains ont trouvé refuge dans des sectes, dont une qui préconise le mutisme, mais surtout pas dans la religion traditionnelle. On suit en particulier les membres de la famille Garvey qui chacun à leur façon peinent à se remettre de cet étrange phénomène. Adaptation d’un roman de Tom Perrotta et du créateur Damon Lindelof (Lost), The leftovers est une série complexe qui après trois épisodes nous laisse encore sur notre faim. Sa force est lorsqu’elle s’attarde au cheminement des individus endeuillés, mais c’est l’ajout d’éléments paranormaux et le manque de cohésion entre les différentes intrigues qui lui font défaut. Il est dans la nature de HBO de prendre son temps et d’aiguiser la patience des téléspectateurs, mais en aura-t-on assez pour se rendre jusqu’à la fin? Rien n’est moins sûr.

The leftovers (2014): mieux vaut être parti que de rester

Science-fiction réaliste

Trois ans après la disparition d’une partie des êtres humains, la population ne s’est toujours pas remise du drame survenu. Le microcosme qu’est Mapleton nous en offre un bon exemple, de même que la famille Garvey dont les membres ont pris des directions opposées. La mère, Laurie (Amy Brenneman) a rejoint une sorte de congrégation, les Guilty Remnant, où ses membres ne portent que du blanc et ont fait vœu de silence. Ceux-ci, bien qu’ils souffrent toujours, semblent avoir abandonné tout espoir de revoir un jour les disparus et ont pour caractéristique d’avoir toujours une cigarette au bec. Lors de la cérémonie commémorative, ils se présentent à contre-courant avec un message qu’ils affichent :« Don’t waste your breath »; comme quoi, se questionner sur ce qui s’est passé est une perte de temps.

À l’écart de la ville, nous retrouvons le fils Tom (Chris Zylka) qui travaille pour Wayne Gilchrest (Paterson Joseph), le maître d’une secte qui parvient à redonner espoir à ses membres par une seule étreinte. On ne sait trop si celui-ci adhère vraiment à la philosophie de l’établissement, mais toujours est-il que Wayne est recherché par la police pour pédophilie et que plusieurs jeunes filles ne jurent que par lui. Jill Garvey, la sœur de Tom (Margaret Qualley) vit toujours avec son père, mais est surtout en pleine crise d’adolescence et on sent surtout que sa mère lui manque terriblement. Enfin, c’est surtout le père Kevin (Justin Theroux) qui retient notre attention. Il tient tant bien que mal le fort familial malgré l’absence de Tom et de Laurie et tout en exerçant son métier de policier, mais on a l’impression que son système nerveux est à la veille de flancher de par plusieurs comportements bizarres, sa consommation de bière et la maison où les traineries s’accumulent.

The leftovers (2014): mieux vaut être parti que de rester

Moult séries ces dernières saisons ont eu pour thème l’apocalypse causée par différents facteurs, que ce soit à cause de la pollution dans The 100, du départ de Dieu dans Dominion, de l’arrivée d’un vaisseau bourré d’extra-terrestres dans Star-crossed ou encore qu’une partie de la population ait été décimée lors d’une guerre contre des Voltans dans Defiance. Ce qu’il y a de redondant dans ces séries, c’est qu’on nous met devant le fait accompli : des dizaines d’années se sont déjà écoulées, les êtres humains restants se sont fait une raison et l’intérêt est de les voir évoluer dans un nouvel environnement. Dans tous ces cas, on a conscience qu’on vit dans une réalité fantasmée.

C’est le contraire qui se produit dans The leftovers. D’une part, le drame s’est produit il y a à peine trois ans si bien que les gens n’ont toujours pas digéré ce qui s’est passé. D’autre part, on ne s’intéresse nullement aux défunts ou ce qu’ils sont devenus, mais à ceux qui sont resté, d’où le titre. L’intérêt ne repose pas sur le pourquoi ni le comment, mais sur le deuil. Comme l’écrit Matt Zoller Seitz dans son article : « The event was 9/11 multiplied by a couple million. Everyone knew someone who vanished. » Dans cette optique, il est très intéressant de voir les différentes réactions. Si les Guilty Remnant refusent de se poser des questions, les commentateurs à la télévision débattent toujours sur ce qui a pu se passer d’un point de vue philosophique et théologique. D’ailleurs, c’est la religion qui écope le plus de ce qui s’est passé. Matt Jamison (Christopher Eccleston) est le prêtre d’une église épiscopale désormais vide. Ce qui l’obsède, c’est que toutes sortes d’individus (criminels, mères, bébés, etc.) ont disparu si bien qu’il ne peut affirmer que Dieu a fait disparaitre les pécheurs, ni qu’il n’a délivré de la terre les bons chrétiens. Tout ce qui lui reste, c’est son église qui a été mise en vente et le troisième épisode, à la fois touchant et grinçant, est entièrement consacré à ce personnage.

The leftovers (2014): mieux vaut être parti que de rester

Rendre l’exercice (volontairement) difficile

The leftovers n’est pas pour autant exempte de défauts. Ce qu’il manque d’abord et avant tout, c’est une certaine cohérence entre les épisodes. Après un pilote qui éveillait notre curiosité, on est allé de tous bords tous côtés dans le second, lequel aurait dû suivre l’exemple scénaristique du troisième dans lequel toute l’attention est portée sur un seul personnage. On nous livre aussi les informations trop au compte-goutte et cette création de HBO semble vouloir que l’on prenne délibérément notre mal en patience, ce qui n’est pas pour plaire à une majorité de téléspectateurs. Puis, c’est tout cet ajout d’éléments paranormaux, comme les chiens qui dévorent en meutes d’autres animaux, un cerf qui aurait détruit la cuisine des Garvey et le mystérieux chasseur qui ne semble exister que dans la tête de Kevin. Bref, le paranormal offre une distraction inutile aux deuils des personnages, lesquels se livrent encore trop peu à nous. True detective y allait aussi d’une lenteur exacerbée et au bout de quelques épisodes, on avait sans conteste mal au cœur pour le personnage de Matthew McConaughey qui fumait et buvait une bière par scène, philosophant un peu trop et ne nous donnant pas assez d’indice. Par contre, les courageux qui ont tenu le coup jusqu’à la fin en ont eu pour leur argent, alors on se dit qu’il pourrait en être de même pour The leftovers… à suivre.

Cette série estivale peine pour le moment à faire le plein de téléspectateurs et voit ses audiences baisser de semaine en semaine, soit, 1,77 million pour le pilote, 1,55 et 1,38 pour les deux épisodes suivants. À titre de comparaison, True detective a fait une moyenne de 2,3 millions et son plus bas score enregistré était de 1,70. La série tiendra-t-elle le coup? Avec des concurrents dans la plage de 10 heures les dimanches soir comme Reckless, Halt & catch fire, The Strain, The lottery et Masters of sex, souhaitons-lui bonne chance.


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