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Rediffusion : Qui veut la peau de la Vème République ?

Publié le 15 août 2014 par Délis

Un « choc », un « séisme », le Front national s’est hissé en tête des élections européennes en recueillant les voix de plus d’un Français ayant voté sur quatre. Face à lui, comme le souligne Gérard Courtois « depuis deux ans dans les sondages, depuis deux mois dans les urnes, François Hollande paye cet échec [hausse du chômage et stagnation de l’économie française] au prix fort ». Ainsi, la gauche de François Hollande a perdu onze élections : huit législatives et trois cantonales auxquelles se rajoute la déroute des élections municipales et européennes qui s’est soldée par une spectaculaire avancée du Front national. S’y ajoute, une rupture du contrat de confiance entre des citoyens désabusés et des partis de gouvernement dont les « affaires » font les gros titres de la presse . Ces dernières encouragent l’abstention qui lorsqu’elle n’est pas passive exprime de plus en plus une « défection active assumée » à l’égard des politiques menées. La question qui se pose est désormais celle de l’écroulement de notre système politique. En votant ainsi les citoyens ont-ils souhaité mettre au banc la Vème République ?

La désaffiliation partisane

La Constitution de 1958 reconnaît un rôle pivot aux partis politiques dans le fonctionnement de la vie politique. D’après son article 4 : «Les partis et groupements politiques concourent à l’expression du suffrage. Ils se forment et exercent leur activité librement. Ils doivent respecter les principes de la souveraineté nationale et de la démocratie.» Pourtant, le baromètre de la confiance politique du CEVIPOF souligne que seuls 11% des Français ont confiance dans les partis politiques, qui se présentent ainsi comme l’une des institutions suscitant le plus grand rejet des citoyens dans une démocratie qui pour 65% d’entres eux ne fonctionne pas bien.

Le poids de la présidentialisation

Si la Vème république est une constitution elle est aussi une pratique du pouvoir qui tend à se focaliser sur l’élection d’un homme : le Président de la République avec des partis qui se transforment en véritables « écuries présidentielles ». Ce système fondé sur l’élection présidentielle pèse lourd, lorsqu’il n’occupe pas tous les esprits, jusqu’à l’obsession. On le constate à gauche comme à droite où 2017 est dans toutes les têtes.

A gauche de l’échiquier politique, la capacité de François Hollande à se représenter est clairement posée, ce qui complique l’adoption des réformes promises ou en cours faute de majorité suffisante et solide au Parlement. L’abstention de 41 députés socialistes lors du vote du pacte de compétitivité le 29 avril 2014 ou « l’Appel des 100 » illustrent à eux seuls cet éclatement de la majorité présidentielle. Malgré la légitimité que lui confère son élection dès que le Président de la République est accusé de faiblesse par rapport à l’institution qu’il représente, la Vème République se fragilise.

A l’UMP cette fois, le climat est miné depuis deux ans par l’absence de leader incontesté avec en toile de fond de moins en moins improbable : le retour de Nicolas Sarkozy dans la course pour 2017. Après l’hypothèse Dominique Strauss-Kahn à gauche, le fantasme de l’homme providentiel est de retour, à droite cette fois, au plus grand regret des citoyens souhaitant un renouvellement programmatique et idéologique d’un côté ou de l’autre de l’échiquier. Le primat de l’équation individuelle semble trop fort…

La distorsion de la représentation

Le quinquennat accentue ces effets. Il amplifie la logique des blocs en venant systématiquement confirmer les résultats du scrutin présidentiel. Ainsi le système électoral structure et impose des majorités de conquête plus que d’exercice du pouvoir, qui viennent distordre l’impératif de représentation en accentuant encore davantage le fait majoritaire.

Ce souci de stabilité politique souhaité par le général De Gaulle et rendu possible par la Vème République a eu pour effet d’organiser le système politique autour de partis politiques d’élus et de techniciens. Bien souvent coupés des mouvements sociaux, ils sont les seuls à s’adonner à la « conquête des palais ». C’est d’ailleurs sur ce terreau, fertile, que des alternatives populistes nationalistes ont émergées. La première d’entre elles s’appelle le Front national avec sa volonté affichée de combattre « l’UMPS » et de « redonner la parole au peuple ».

A défaut d’y voir un écroulement de notre système politique, la Vème République souffre de son obsession pour l’élection présidentielle. L’obsession de 2017 en est l’exemple. Celle-ci a des conséquences lourdes puisqu’elle fait des partis de simples « écuries présidentielles » qui abandonnent leur fonction idéologique et programmatique dans un climat globalisé marqué par la crise économique, pourtant demandeur de repères et de grilles de lecture(s).

Les questions pour l’avenir sont nombreuses : mode de scrutin, statut et recrutement des élus, démocratie locale, mais toutes ont le même intérêt : faire en sorte d’agir pour éviter les ruptures et maintenir le vivre ensemble.


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