Chroniques de l’ordinaire bordelais. Episode 112

Portraits de la Pointe du Raz (2)  

Pile et face : les deux facettes d’une même pièce

 Le touriste, il aime avoir des sensations fortes, et une mer déchainée qui fouette et s’engouffre partout… cela le fait frissonner… Il aimerait être là au milieu du carnage. Pour lui, ce serait un incroyable souvenir à raconter l’hiver aux copains dans le minuscule et douillet appartement parisien ! Il regarde avec envie les cartes postales. L’ile est déjà belle sous le soleil mais sur ces deux cartes-là: la mer en furie dans le port ou contre la digue qui encaisse plutôt mal que bien… « Waouh ! Ça pète… c’est juste INCROYABLE ! » s’exclame-t-il, hélant sa compagne. «Viens voir cette mer! C’est fascinant ! »

« Oui… enfin… non, pas trop » dit une petite voix au fond de la cahute de souvenirs… « Quand il fallait écoper déjà ce n’était pas drôle mais là, elle ne fait plus que se glisser dans les maisons, la mer, maintenant elle casse les portes, les fenêtres, elle arrache, détruit et repart comme elle est venue… et cet hiver, elle est revenue deux fois par mois de janvier à mars !! Alors non, vraiment pas fascinant, plutôt terrifiant ! »

Il baisse d’un ton le touriste devant le cri contenu de la dame du fond de la cale. Sa boutique en première ligne sur le port, c’est son radeau… et la mer, sa complice pour les ventes qu’elle lui procure mais de plus en plus l’ennemie de son antre les jours de tempête.

Le touriste ne résistera pas et achètera la carte qui le fascine et elle, lui vendra, engouffrant les quelques pièces dans le tiroir caisse…

Côté face ou côté pile, la vie ne résonne pas pareil !

Virginie Perchais