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Les tablettes numériques détruisent-elles de l’emploi ?

Publié le 26 août 2014 par Chahidhamza @ChahidHamza

Le reproche avait déjà été fait lors des premières automatisations en usines, puis lors de l’essor de l’informatique. Alors que les entreprises ont supprimé 132 000 emplois en 2013, on peut s’interroger sur le rôle de l’essor de l’économie numérique mobile sur ces destructions. Et notamment sur celui des tablettes numériques, dont le marché a plus que doublé l’an dernier.

Economie numérique mobile et emplois détruits

Avec la fulgurante croissance de l’équipement en tablettes en 2013 (6,2 millions d’unités ont été vendues), de nombreux secteurs mis à mal par la généralisation des smartphones et de l’économie numérique ont poursuivi leur descente aux enfers. Côté filière industrielle, les fabricants de lecteurs MP3 ou de DVD portables n’ont plus vraiment de raison d’être aujourd’hui sur le marché. Pourtant, en tant que nouveau marché (un positionnement inédit entre le PC portable et le smartphone), les tablettes devraient « remplacer » ces emplois industriels perdus. Ce qui est le cas, certes, mais la quasi totalité de ces emplois est délocalisée en Asie. Cela ne fait que confirmer une tendance qui était déjà bien amorcée dans le secteur de l’électronique, et sur laquelle il semble de plus en plus improbable de faire marche arrière.

tablette numérique

Mais la filière numérique a ceci de particulier qu’elle impacte de façon transverse des pans entiers de l’économie, car elle modifie les usages et le fonctionnement de la société en profondeur. Le commerce classique en a fait les frais : en témoignent la liquidation judiciaire subie par Virgin ou la fonte massive du nombre d’agences de voyages, deux secteurs qui n’ont pas résisté à l’intrusion du numérique dans leurs marchés. L’essor des tablettes n’a fait qu’appuyer ces phénomènes, rendant les offres numériques plus accessibles, plus simples, et plus attractives encore. Or la balance de l’emploi, au moins local, n’a sans doute pas ici retrouvé son équilibre : quelques géants internationaux fragilisent des filières entières, sans compter l’effet « optimisateur » du numérique qui réduit les besoins en main d’œuvre sur bon nombre de processus.

La dématérialisation, la valeur et l’emploi

Mais ce n’est pas toujours le cas. Dans le domaine de l’édition par exemple, le livre numérique ne modifie en rien le travail en amont qui doit être réalisé sur l’œuvre : accompagnement de l’auteur, travail sur le texte, mise en forme… Il représente en revanche une opportunité de diffuser plus largement les ouvrages, et surtout de ne pas rater un virage qui ferait perdre le contact avec les lecteurs. Hachette Livre, le troisième éditeur mondial, développe ainsi depuis plusieurs années une politique très volontariste de numérisation de ses contenus. D’ailleurs, dès 2009, Arnaud Nourry, son PDG, déclarait que la numérisation de livres était « techniquement possible et socialement souhaitable, pour autant que l’on préserve la création ». A ce jour, la totalité des titres du catalogue sont disponibles en format électronique – soit plus de 90 000 œuvres. « Il faut que nous allions là où sont les consommateurs », explique Tim Hely Hutchinson, qui dirige la filiale anglaise de Hachette, pays où l’ebook est beaucoup plus développé qu’en France. Ayant tiré les leçons de la filière musicale, les comptes d’exploitation des éditeurs ne se sont pas dégradés avec l’arrivée du numérique.

livres numériques

<img src='http://delivery.us.myswitchads.com/adserver/www/delivery/avw.php?zoneid=2738&amp;amp;amp;cb=&amp;amp;amp;n=afc5b3b5' border='0' alt='' /><p>En France, o&#249; les usages sont plus timides, l&#8217;offre est d&#233;j&#224; disponible. En anticipant la demande, en se pr&#233;munissant contre les risques du piratage et de la d&#233;valorisation des contenus (fixation du prix de vente par l&#8217;&#233;diteur et non le distributeur), la fili&#232;re s&#8217;est pr&#233;serv&#233;e &#8211; elle, et ses emplois &#8211; de la crise qui a touch&#233; les autres industries culturelles (musique, vid&#233;o) avec l&#8217;arriv&#233;e du num&#233;rique. Dans un <a href="http://www.nytimes.com/2012/06/21/books/french-bookstores-are-still-prospering.html?_r=1&" rel="external nofollow">article</a> de juin 2012, Elaine Sciolino, la sp&#233;cialiste du livre au &#171;&#160;New York Times&#160;&#187;, notait avec un certain &#233;merveillement le statut encore conf&#233;r&#233; &#224; l&#8217;&#339;uvre litt&#233;raire et &#224; l&#8217;auteur en France, et mettait en avant le r&#244;le protecteur de la loi Lang sur la pr&#233;servation de l&#8217;&#233;cosyst&#232;me litt&#233;raire. Non soumis aux seules lois du march&#233;, le livre peut s&#8217;&#233;panouir sous les deux formats, de fa&#231;on compl&#233;mentaire. La comparaison qu&#8217;elle r&#233;alise avec le syst&#232;me anglais est sans &#233;quivoque&#160;: les libraires disparaissent &#224; vue d&#8217;&#339;il, les &#233;diteurs sont fragilis&#233;s et la cr&#233;ativit&#233; litt&#233;raire s&#8217;en ressent.</p><p>Dans d&#8217;autres secteurs traditionnels, l&#8217;explosion du num&#233;rique mobile n&#8217;a eu que peu d&#8217;impact sur l&#8217;emploi &#224; ce jour, en raison du positionnement adopt&#233;. &#171;&#160;<em>Lorsqu&#8217;un acteur traditionnel survit sur un secteur en forte mutation, c&#8217;est qu&#8217;il a une r&#233;elle valeur ajout&#233;e, laquelle est souvent li&#233;e &#224; une dimension de conseil et de relation humaine</em>&#160;&#187;, explique Elizabeth Vinay, de l&#8217;APCE, qui cite l&#8217;exemple des pharmaciens ou des libraires.</p><h2>Tablettes et destruction cr&#233;atrice</h2><p>Finalement les tablettes peuvent causer, selon les cas, ou des disparitions, ou le maintien, voire le renforcement, de fili&#232;res et d&#8217;emplois traditionnels. Mais elles s&#8217;inscrivent &#233;galement dans le sch&#233;ma de la &#171;&#160;<em>destruction cr&#233;atrice</em>&#160;&#187;, tel que l&#8217;a formalis&#233; Schumpeter, en cr&#233;ant des emplois nouveaux. Il suffit de penser aux entreprises existant autour de la conception de ces appareils &#8211; Apple en t&#234;te. Les emplois g&#233;n&#233;r&#233;s par l&#8217;industrie des applications, dont les tablettes sont l&#8217;un des supports privil&#233;gi&#233;, sont &#233;galement &#224; prendre en compte&#160;: d&#8217;apr&#232;s un <a href="http://www.visionmobile.com/product/the-european-app-economy/" rel="external nofollow">rapport</a> publi&#233; en septembre dernier, celle-ci serait &#224; la source de pr&#232;s de 800&#160;000 emplois directs et indirects dans l&#8217;Union europ&#233;enne depuis 2008. La France compte d&#8217;ailleurs quelques belles success stories en la mati&#232;re comme celle d&#8217;Urbans, &#224; Vannes, qui a multipli&#233; ses effectifs et son chiffre d&#8217;affaire par trois en 2013, en d&#233;veloppant des applications professionnelles nomades.</p><p>Les r&#233;ussites et innovations du secteur de l&#8217;internet des objets, comme celles du c&#233;l&#232;bre Netatmo par exemple, sont aussi li&#233;es au d&#233;veloppement des tablettes. Et sont une source de comp&#233;titivit&#233; et d&#8217;emploi actuels et futurs. &#171;&#160;<em>Les emplois perdus dans la production industrielle des biens pourraient &#234;tre surcompens&#233;s par la demande de nouveaux produits-services r&#233;volutionnant les modes de vie</em>&#160;&#187;, proph&#233;tisent les &#233;conomistes David Encaoua et Mich&#232;le Debonneuil. Et c&#8217;est souhaitable, pour que l&#8217;emploi tire &#224; terme, lui aussi, b&#233;n&#233;fice de la r&#233;volution num&#233;rique.</p><blockquote><p><span>Ceci est un article invit&#233; r&#233;dig&#233; par Paul Simon. Apr&#232;s un temps comme Community Manager &amp; Chef de Projets TIC en collectivit&#233;s territoriales, pour l&#8217;accompagnement des administrations dans la maitrise de l&#8217;&#233;conomie num&#233;rique et gestion de l&#8217;image et de la s&#233;curit&#233; num&#233;rique, je suis d&#233;sormais Consultant Sp&#233;cialiste en Usages et S&#233;curit&#233; Num&#233;riques, Technologies et services de l&#8217;information, chez Paul Simon Consultant.</span></p></blockquote>

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