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Saga Monaco Part 6 : Le Casino et l’Opéra

Publié le 02 septembre 2014 par Pascal Iakovou @luxsure

À l’aube des années 1860, alors que la révolution industrielle accentue l’urbanisation en Europe, la Principauté de Monaco reste à l’écart des ces évolutions et demeure un îlot isolé et désormais sans ressources après la séparation avec le territoire riche de terres cultivables de Menton. Les tentatives de développement initiées autour des jeux de hasard se sont rapidement soldées par des échecs, si bien que l’on se retrouve dans une impasse. Mais la roue de la fortune est faite pour tourner et l’ouverture en 1863 par François Blanc, d’un casino sur le plateau des Spélugues, jusque là désert, porte en germe les racines d’un essor imminent. Pour le Prince Charles III, « le nouveau Casino de la Société des Bains de Mer va très prochainement s’élever dans des proportions monumentales. Autour du Casino, de beaux hôtels seront bâtis qui ne craindront en rien la comparaison avec ceux que Paris, Londres ou New-York ont construit ». L’inauguration de l’Hôtel de Paris en 1864 et la mise en service du Café Divan en 1868 (qui deviendra le Café de Paris) consacrent la métamorphose fulgurante du plateau des Spélugues, qui en outre voit fleurir de superbes villas et jardins. La construction des Thermes Marins en 1860 à la Condamine, répond à un autre besoin manifesté par l’aristocratie européenne, qui a coutume de faire escale dans des stations thermales de la Côte d’Azur pour prendre les bains.

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Place du Casino
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L’accessibilité à ce quartier florissant est favorisée par l’arrivée du chemin de fer, synonyme de désenclavement. Une route relie directement le port à la place du Casino, réduisant ainsi la distance qui sépare les touristes du monde de plaisirs qui les attend. Cet univers ne cesse d’ailleurs de se diversifier. La restructuration profonde du Casino à la fin des années 1870 entraîne l’émergence de nouvelles formes de divertissement. Un théâtre y élit domicile pour proposer un répertoire éclectique de représentations avant-gardistes et accueillir les plus grands artistes du moment.

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Depuis son ouverture en 1863, le bâtiment a subi bien des modifications et des réaménagements. Il a fallu agrandir les salles de jeux pour faire face à un succès grandissant, créer une salle de théâtre (la Salle Garnier, inaugurée en 1879), des salons de lecture, des restaurants, des espaces où boire et fumer… De nombreux architectes en vogue (Dutrou, Schmit, Garnier, Touzet…) et artistes ont été sollicités pour faire du Casino un modèle de sophistication et de flamboyance. Marqueteries, peintures, sculptures, vitraux ornent toujours les salles, créant un décor Belle Époque luxueux, propice au rêve et à l’enchantement que François Blanc souhaitait offrir à ses hôtes…

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Alors que le Second Empire construit de nombreux théâtres, dont l’Opéra de Paris est à la fois le fleuron tout autant qu’un symbole de l’engouement de la Belle Époque pour les arts de la scène, Monte-Carlo mène sa vie culturelle dans son Casino. Une situation qui ne peut s’envisager plus longtemps. Aristocrates et grands bourgeois s’installent sur la Côte d’Azur avec leurs épouses et leurs familles pour des séjours de plusieurs mois. Monte-Carlo ne peut se réduire à un lieu de passage ! Pour continuer à rayonner, mais aussi attirer la gent féminine huppée, les artistes – tout ce qui rend un lieu incontournable en somme – la Société des Bains de Mer décide d’adjoindre à son casino une salle de concert digne de ce nom et d’institutionnaliser la vie culturelle à Monaco. Pour ce faire, Marie Blanc, qui depuis la mort de son mari dirige la SBM, fait appel à Charles Garnier. Dès le mois de juin 1878, plus de cent ouvriers s’activent sur le chantier. Mais, pour livrer l’édifice à temps – le théâtre doit être réalisé en 6 mois ! – l’architecte se rend vite compte que les moyens mis en oeuvre ne suffisent pas. Il a alors recours au travail de nuit et aux techniques les plus modernes. Pour résoudre la question de l’éclairage, il fait venir de Paris une locomotive à vapeur destinée à entraîner une dynamo qui alimente des bougies de Jablochkoff, symboles de l’entrée en lice de l’électricité dans l’éclairage public français. Les poutres en fer destinées à former la charpente ont été dessinées par Gustave Eiffel. Le 15 octobre, l’édification du mur sud marque la fin des travaux de maçonnerie. De grandes fenêtres donnant sur la mer font de la salle de spectacle un lieu unique au monde. Ornée de balcons et de colonnes en marbre, surmontée d’un dôme cerné par deux clochetons indiens, cette nouvelle façade s’impose désormais aux visiteurs, de toute sa hauteur baroque, dès leur descente du train. À l’intérieur, Charles Garnier a porté le luxe et l’ornement à leur comble : mariage des trois ors (jaune, rose et vert), abondant usage du symbole de la lyre, galbe de l’imposante loge princière, citations artistiques italiennes et antiques…
La soirée d’inauguration, qui a lieu le 25 janvier 1879, est à la hauteur de l’événement qu’elle consacre. De grandes têtes d’affiche de l’opéra et du théâtre sont au rendezvous, et, parmi elles, la plus grande d’entre les grandes : Sarah Bernhardt. Bientôt, l’Opéra de Monte-Carlo devient un lieu où s’épanouissent les avant-gardes culturelles pour se hisser au rang des scènes européennes les plus éminentes. Jules Massenet est un habitué, tout comme les ballets russes de Serge Diaghilev qui y effectuent plusieurs résidences et y montent, en 1911, Le Spectre de la Rose avec un jeune prodige, Nijinski. L’établissement accueille encore bien d’autres génies créateurs, tels que Georges Bizet, Gabriel Fauré, Camille Saint-Saëns, Verdi, ou Maurice Ravel. Les oeuvres de Berlioz, Rossini, ou Wagner y sont portées en triomphe. De nombreux ouvrages lyriques majeurs y connaissent leur première représentation, tels La Damnation de Faust (1893), L’enfant et les Sortilèges (1925), Don Quichotte (1910) ou Déjanire (1911). Les grandes voix de l’histoire lyrique du XXe siècle retentissent dans l’Opéra de Monte-Carlo, de Nellie Melba à Enrico Caruso, de Tito Schipa à Georges Thillet et plus récemment Ruggero Raimondi, Plácido Domingo ou Luciano Pavarotti. Entre 1905 et 1937, le grand Fedor Chaliapine y vivra quelques-unes de ses plus belles heures de gloire. Près de 80 oeuvres lyriques, ballets et opéras verront le jour à Monte-Carlo entre 1894 et 1945. En 2003, l’Opéra s’engage dans une ambitieuse opération de rénovation. L’institution se doit d’aborder le nouveau siècle avec des conditions de sécurité, de flexibilité et de confort améliorés. Autre objectif : redonner à l’une des oeuvres majeures de Charles Garnier son faste d’origine. Le projet est dirigé par Alain-Charles Perrot, Architecte en chef des Monuments Historiques, assisté d’une cinquantaine d’entreprises choisies pour la qualité de leur savoir-faire à travers toute l’Europe. Elles sont, pour certaines, les dernières ambassadrices des métiers d’art. Quatre ensembles majeurs définissent les travaux réalisés : la rénovation de la toiture, la reprise structurelle du bâtiment et les aménagements en sous-sol, l’aménagement de la scène, enfin la rénovation de la salle et du grand lustre. La salle rouvre ses portes en 2005, à l’occasion de l’intronisation de S.A.S. le Prince Albert II, pour offrir aux spectateurs le loisir d’admirer l’éclat du style Napoléon III.

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