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Le retour attendu d'Ataï. Une page très sombre de notre histoire.

Publié le 29 août 2014 par Micheltabanou

La grande révolte canaque qui éclata en juin 1878 renforça en son temps dans la France colonialiste et émancipatrice l'image forcément négative qui collait dans l'imaginaire populaire aux Néo-Calédoniens. Sa nature sauvage, qui l'apparentait aux brutes sanguinaires ayant fait éclater la mince pellicule de civilisation qu'un quart de siècle de présence française avait pu faire apparaître, le Canaque était encore jugé capable d'être dangereux dans la plupart des articles de journaux, illustrés d'images suggestives, qui relataient les péripéties de la révolte. Médias qui se complurent à insister sur la fourberie, la lâcheté, la férocité supposées d'indigènes cannibales! Malheureusement ce type de médias existe encore aujourd'hui avec les chaînes de télévision ou quelques journaux ou magazine toujours bien intentionnés pour caricaturer le réel et véhiculer des horreurs.

Revenons en Nouvelle-Calédonie où à l'exception notable de Louise Michel, les déportés de la Commune n'hésitèrent pas à choisir le camp de la " civilisation " contre celui de la " sauvagerie ". Dans cette île lointaine de l'exclusion - bagnards et criminels de droit commun, algériens et Communards, il fallait qu'une femme exemplaire vienne à se rapprocher des Canaques et approcher puis comprendre et partager leur culture. Louise Michel faisait œuvre d'humanité. Il y eut effectivement en Nouvelle-Calédonie une déportation de Maghrébins. Entre 1864 et 1897, plus de 2000 Maghrébins, en très grande majorité des Algériens, sont déportés, transportés ou relégués en Nouvelle-Calédonie, qu’ils dénomment « Calédoun ». En Calédoun, et à la suite de mariages mixtes avec des femmes d’origines européenne, kanake ou encore indonésienne, une communauté dite « arabe », puisque c’est ainsi qu’ils s’appellent eux-mêmes, a pris corps, s’est enracinée et a prospéré. Bien que privés de la langue arabe et de l’islam, lointains souvenirs d’un autre monde que leurs pères évoquaient sous le nom d’Afrique, ils ont créé une communauté parmi celles qui peuplent la Nouvelle-Calédonie et ils sont, eux aussi, aujourd’hui, appelés par et avec le peuple kanak à la fondation d’une communauté de destin. Ces Menfiyyun el djazaïriyyun sont partie prenante du processus de décolonisation affirmé par l’accord de Nouméa. Leur destin, leur passé, leur devenir sont autant de facettes d’une expérience humaine inédite et passionnante qui devrait nous interpeller. 
 

En 1878 donc les militaires participèrent à la répression de la révolte et en ramenèrent quelques " trophées " qui virent grossir le nombre d'objets canaques arrachés à leur espace original. Parmi ces trophées se trouvaient quelques têtes soigneusement conservées dans l'alcool phenique comme celle du chef de l'insurrection Ataï et de son sorcier. Cela dans le but de " recherches " permettant " d'utiles" rapprochement avec les résultats obtenus par les paléontologues. En effet on pouvait comparer les ossements des fossiles de Cro-Magnon et de Neandertal à ceux des canaques et des aborigènes d'Australie! Un chaînon entre le singe et l'homme? C'est tout le travail d'Abel Hovelacque pour nous faire glisser du sauvage au primitif. Jugé très primitif le Canaque semblait voué à disparaître rapidement au contact des " races supérieures ". Il était donc indispensable de le montrer, de recueillir le maximum de traces de sa présence avant qu'il ne soit trop tard. C'est ainsi que la tête rejoignit le Musée de l'Homme pour y être étudiée, exposée et oubliée sur des étagères avant d'être retrouvée pour revenir le 1er septembre 2014 sur son île natale pour y être réceptionnée par ses descendants et enfin être inhumées selon la coutume. Le deuil peut être fait. Il faut maintenant rendre à ce chef ses terres, biens confisqués. 
Cette actualité nous restitue une part de notre histoire qui il faut aborder. Ce retour est bonne choses car il va pacifier les rapports sur cette île qui a retrouvé la paix alors qu'il y a un peu plus de deux décennies l'assassinat de Jean-Marie Tjibaou mettait en péril son avenir. 

dans un prochain post je m'attacherai à d'écrire cette révolte, à en comprendre les raisons et à établir le bilan sanglant de la répression. Le seul sauvage fut la soldatesque aidée de ses supplétifs. 
 

Le retour attendu d'Ataï. Une page très sombre de notre histoire.
Le retour attendu d'Ataï. Une page très sombre de notre histoire.
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