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SNCF : Guillaume Pépy en difficulté

Publié le 20 septembre 2014 par Blanchemanche
#SNCF

Cette semaine du 15 septembre 2014 s'ouvraient les auditions de RFF et de la SNCF dans l'affaire du déraillement de Brétigny, qui a causé la mort de 7 personnes le 12 juillet 2013. Un accident dramatique, dont la France n'est pas coutumière, mais qui a révélé l'obsolescence inquiétante d'un réseau pas suffisamment entretenu. Au cœur de la stratégie de la SNCF et de son patron, Guillaume Pépy : la réduction des coûts et la course à la performance. Au détriment des voyageurs naturellement.

Vers la multiplication des incidents ?


Il y a un peu plus d'un an donc s'éventait un secret : la dégradation avancée du réseau ferroviaire français. Après treize années dans déraillement mortel, celui du train Paris-Limoges, à Brétigny-sur-Orge dans l'Essonne, mettait brutalement en exergue la faillibilité d'un service public sinon parfait du moins sûr.

De fait, la SNCF n'a jamais été exempt de critiques. Les retards fréquents, les prix en augmentation, les sempiternelles grèves de cheminots exaspèrent les usagers de manière encore plus cadencée que la ligne de TGV Paris-Lyon. Mais ces dysfonctionnements sont, au final, bénins. Les trains circulent de manière fiable. Le territoire est relativement bien quadrillé. Personne n'est véritablement laissé sur le bord du quai, comme ça peut être le cas au Royaume-Uni où la privatisation a créé un petit chaos.

Mais avec Brétigny, c'est le fond de commerce de la SNCF qui est attaqué : celui de la sûreté des installations. Comment faire accepter les dysfonctionnements si, en prime, le réseau est mal entretenu au point de causer la mort d'usagers ? Les premiers rapports d'enquête, tout comme les témoignages des employés sont accablants.

« La sécurité ferroviaire c'est une chaine, et si l'on commence à affaiblir un maillon, la chaine casse. Aujourd'hui, cette chaine est fragilisée à plusieurs endroits », concède ainsi David Gobé, responsable du secteur fédéral Europe et International à la fédération des cheminots CGT.

L'UNSA, Sud Rail et la CGT Cheminots, les principaux syndicats du secteur, ne disent pas autre chose. « Les cheminots évoquent ce sentiment permanent de ne plus avoir les moyens de faire du travail de qualité. Ils nous disent le mal-être causé par les injonctions contradictoires entre la pression sur les délais ou les coûts et des moyens inadaptés », stipule une lettre commune adressée au ministère des Transports. Entre 2006 et 2010, ce sont 1,6 milliard d'euros qui ont manqué pour lutter contre le vieillissement du réseau. Au total, 3 000 des 29 000 kilomètres de ligne seraient non fiables.

Guillaume Pépy dans l'œil du cyclone


Légitimement visés par les juges d'instruction chargés de faire la lumière sur la catastrophe de Brétigny : Guillaume Pépy, patron de la SNCF et Jacques Rapoport, directeur de RFF, vont être mis en examen. Les deux entreprises, autrefois unies et appelées à de nouveau se regrouper, font front commun dans cette affaire. Même élément de langage : « sécurité et transparence ». Un plan d'action de 410 millions d'euros pour la maintenance des installations a été décidé, en même temps qu'un turnover parmi les cadres dirigeants. Pour le moment, les deux patrons sont toujours en poste.

Probablement parce que, malgré ces déboires, la SNCF renoue avec les bénéfices. M. Pépy explique ces bons résultats par la réussite de son plan d'économies et de son « plan de performance transverse », qui auraient déjà permis un gain de 300 millions d'euros. Les fruits de la sous-traitance à tout crin et de la réduction des effectifs.

Des résultats qu'il convient néanmoins de nuancer. Sur le long terme, la santé financière de l'entreprise n'est pas assurée. Le chiffre d'affaires de SNCF Voyages est en baisse de 3,1 % sur un an, tandis que la marge opérationnelle a également baissé de 8,1 %. Les lignes Intercités ont quant à elles coûté la bagatelle de 1 milliard d'euros à la SNCF entre 2010 et 2013, plus 175 millions sur le seul premier trimestre 2014.

Par conséquent, la pression judiciaire et économique n'est pas près de retomber pour Guillaume Pépy. L'avenir de ce dernier, qui bénéficie de soutiens politiques de premier plan – il est réputé proche de Nicolas Sarkozy, qui l'a nommé et de François Hollande, qui l'a confirmé – pourrait même s'obscurcir rapidement. Car si les considérations de sécurité et service public sont insuffisantes, peut-être que la fragilité financière de la SNCF donnera à réfléchir au gouvernement pour écarter un dirigeant dont la stratégie va manifestement à rebours de l'intérêt des usagers.

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