Mange tes Morts (Tu ne diras point) // De Jean-Charles Hue. Avec Jason François et Michaël Dauber.
Mange tes Morts permet à Jean-Charles Hue de nous plonger une nouvelle fois dans le monde des gitans ou de la communauté des gens du voyage. Il l’avait déjà fait notamment dans La BM du Seigneur (2010) qui n’était peut-être pas aussi intéressant que celui-ci mais c’est une autre question. Ce que ce film tente de nous raconter c’est nous plonger dans le monde des gitans, jouant également sur la dualité qui règne au sein de cette communauté avec d’un côté les chrétiens qui veulent d’une vie bien rangée et paisible et de l’autre ceux qui vont voler simplement pour permettre à leur famille de vivre. C’est tout de même assez électrisant comme plongée dans le sens où c’est un film brut et brutal. Pas toujours juste comme film, notamment car il semble faire dans l’excès et ne pas équilibrer son propos entre les deux visions du monde gitan qu’il donne (il faut attendre quelques références et la fin pour que l’aspect chrétienté soit réellement mis en scène). Mange tes Morts c’est avant tout l’histoire de Jason qui fait presque son enterrement de vie de garçon avant son baptême et donc d’entrer dans le droit chemin. C’est le retour de son demi-frère Fred qui va l’emmener sur les routes du danger dans une aventure violente et cinglante.
Jason Dorkel, 18 ans, appartient à la communauté des gens du voyage. Il s’apprête à célébrer son baptême chrétien alors que son demi-frère Fred revient après plusieurs années de prison. Ensemble, accompagnés de leur dernier frère, Mickael, un garçon impulsif et violent, les trois Dorkel partent en virée dans le monde des « gadjos » à la recherche d’une cargaison de cuivre.
Mange tes Morts parvient aussi à montrer à quel point les liens de famille sont importants au sein de cette communauté. Je ne connais pas du tout cette communauté mis à part ce que j’en ai vu à la télévision et au cinéma mais je dois avouer que c’est tout de même des gens fascinants qui ont une culture tellement différente de la notre. Jean-Charles Hue tente donc de nous en raconter une historie avec le langage qui va avec. J’aime beaucoup toutes ces expressions utilisées tout au long du film. J’ai fait quelques recherches afin de comprendre le titre du film et j’ai pu découvrir que « Mange tes Morts » est une insulte chez les gitans. Je suppose donc que c’est pour ça que le réalisateur a ajouté « Tu ne diras point ». On sent aussi que le film ne veut pas non plus être un documentaire sur la communauté bien qu’il emprunte énormément de choses. Cela ressemble donc à quelque chose de totalement différent, entre le road-movie et une sorte de western moderne. Avant d’aller voir Mange tes Morts on m’a mis en garde sur le fait que ce film avait une morale douteuse. Et pour le coup je suis assez en accord avec son commentaire dans le sens où l’issue du film s’achève de façon un peu trop facile après avoir transformé son histoire en point de non retour.
Car oui, tout au long du film, Mange tes Morts ne cesse de nous raconter le fait qu’ils ne vont pas pouvoir s’en sortir : la police, les morts, les faces à faces, etc. Tout s’enchaîne en plus de ça avec un rythme assez bien géré. Je ne me suis pas ennuyé une seule seconde alors que l’on nous balade dans différents lieux avec une histoire différente (l’Alpina - qui n’est pas sans faire référence au film précédent du réalisateur qui parlait de BM -). Ce n’est pas parfait comme film mais cela reste assez brut et cinglant pour nous donner envie d’en voir encore un peu plus. Il y a de la caricature dans l’air bien évidemment, ce qui entache aussi peut-être en partie le film qui veut donc apparemment trop en faire mais le plaisir reste malgré tout bel et bien présent grâce à la bonne volonté des comédiens qui nous font croire à leur histoire et surtout au fait qu’ils sont bien des gens du voyage que l’on a mis dans un western moderne avec leur dialecte, leurs codes et leur façon de faire ce qu’ils font pour venir en aide à leur famille « shoraver ».
Note : 6.5/10. En bref, une plongée brutale dans le monde des gitans. Réussie malgré les clichés.