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Réchauffement climatique : objectif Paris 2015 avec Nicolas Hulot

Publié le 12 octobre 2014 par Bioaddict @bioaddict

La journaliste scientifique Marion Spée a assisté le 6 octobre à Montréal (Québec) à une Conférence de préparation à la prochaine conférence des Nations Unies sur le climat à Paris en décembre 2015 (COP21). Voici ce qu'il faut retenir de cette conférence avec les commentaires de Nicolas Hulot, en exclusivité pour le journal bioaddict.fr.   Marion Spée Journaliste scientifique
Montréal

Je suis journaliste scientifique indépendante, entre la France et Montréal. Avant d'en arriver là, j'ai étudié les manchots Adélie pendant mon doctorat et suis partie en Antarctique pour les voir de près. Depuis je veux être de ceux qui parlent de l'environnement, et qui rendent la science accessible à tous.

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 Montréal, 6 octobre. Nicolas Hulot rencontre...
Montréal, 6 octobre. Nicolas Hulot rencontre David Heurtel, Ministre du développement durable, de l'environnement et de la lutte aux changements climatiques du Québec.

Le réchauffement climatique est sans équivoque, et de façon presque certaine (à 97%), les activités humaines en sont responsables. C'est ce dit le Groupe intergouvernemental d'experts sur l'évolution du climat (GIEC), qui compile près de 20 000 études et projections scientifiques par plus de 800 chercheurs. Le diagnostic est clair, mais le plus important, c'est la trajectoire que l'on prend. Et cela dépend bien entendu du comportement de nos sociétés. 194 états seront réunis à ce propos lors de la prochaine conférence des Nations Unies sur le climat à Paris en décembre 2015 (COP21). L'objectif affiché est de parvenir à un accord contraignant et applicable à tous, suffisamment ambitieux pour permettre de limiter le réchauffement climatique à 2°C à l'horizon 2100. Il faudra pour cela une somme d'engagements, une trajectoire, une évaluation palier par palier.

La première des 7 conférences en Amérique du nord

Pour préparer ce grand rendez-vous, Montréal a accueilli le 6 octobre la première conférence d'une série de sept, organisées par les ambassades de France au Canada et aux Etats-Unis (FACTS, French Ameri-Can Climate TalkS). Cet événement est une contribution à la préparation de la Conférence sur les changements climatiques des Nations Unies COP 21-Paris Climat 2015.

L'idée étant de mobiliser les opinions publiques et de renforcer le dialogue entre les experts de ces pays. Notons à ce propos que le Canada fait figure de résistant, avec son impact considérable sur la pollution industrielle du contient nord américain, mais aussi avec sa sortie du Protocole de Kyoto et de la convention des Nations Unies sur la désertification. " Le dialogue avec ce type de pays stratégique est important, parce que son action peut être déterminante ", avoue Nicolas Hulot, sous la casquette d'envoyé spécial du Président de la République Française pour la protection de la planète, dans un entretien avant la conférence. " Au delà des intérêts économiques à court terme de chaque pays, Paris Climat 2015 sera l'occasion de leur rappeler qu'à long terme on sera tous gagnants ou tous perdants ". L'écologiste souhaite que le grand rendez-vous parisien " ne soit pas un moment d'empathie, mais d'engagement ".

La nécessaire évolution des villes face au changement climatique

La conférence de Montréal a souhaité mettre les villes au coeur du débat. Aujourd'hui, et pour la première fois de l'histoire de l'humanité, elles hébergent plus d'un habitant sur deux. Leur minéralité les met d'office en surchauffe : la température y est de 5°C supérieure à celle des zones rurales. Leur forte population, leurs infrastructures et les activités économiques qu'elles renferment les exposent hautement aux catastrophes naturelles et aux risques liés au changement climatique. " Montées des eaux pour les centres urbains côtiers, fragilité par rapport aux épisodes de canicules, pollution de l'air ", énumère Jean Jouzel climatologue et glaciologue français et membre du GIEC, en insistant sur leur vulnérabilité. Alors pour s'adapter, elles devront adopter des mesures pour améliorer leurs infrastructures, optimiser leur efficacité énergétique : développement solaire, transport en commun, utilisation de l'eau, végétalisation... Pour Steven Guilbeault, cofondateur et porte-parole d'Équiterre, le transport, le bâtiment et l'agriculture sont des défis que les villes doivent transformer en opportunités. " A Houston, des parkings pour voitures sont condamnés pour en faire des voies de transports en communs! Alors si le Texas peut le faire... ", donne-t-il comme exemple.

Mais surtout, les villes sont à l'origine de 70% de l'émission mondiale de gaz à effet de serre. Considérable. " En prenant deux engagements forts, à savoir arrêter les subventions ou les exonérations aux énergies fossiles et conditionner les achats publiques à une économie décarbonnée, les villes pourraient à elles seules aider à faire la moitié du chemin! ", affirme Nicolas Hulot. Ainsi, en plus du processus onusien qui ne concerne en théorie que les Etats, l'engagement des villes (et des régions) pourrait faire de la conférence le COP21 une belle réussite.

Pourquoi Nicolas Hulot est optmiste pour la Conférence sur le climat Paris 2015

Les attentes sont nombreuses, et face au raté de la conférence de Copenhague en 2009, les espoirs sont frêles. Pourtant, le contexte n'est pas le même et plusieurs arguments indiquent que le terreau est fertile. " Les évènements climatiques sont autant de rappels à l'ordre ", explique Nicolas Hulot. Ils touchent aujourd'hui aussi les pays industrialisés et ont consécutivement une lecture économique en coût. Si l'argument éthique, qui devrait pourtant primer, ne touche pas, l'augment économique lui attire davantage l'attention. Aux Etats-Unis par exemple, le coût des catastrophes " naturelles " est exponentiel. En 1980, il était de l'ordre de 2 milliards de dollars, puis est passé à 40 milliards dans les années 2000 pour atteindre 200 milliards de dollars en 2012, seulement pour l'Ouragan Sandy!

" Entre temps, l'innovation s'est mise en marche et l'opportunité économique est plus lisible dans plusieurs secteurs ", poursuit l'envoyé spécial pour la protection de la nature. Investir dans les énergies renouvelables, l'efficacité énergétique ou encore les modes de transports durables sont des intérêts que certains comprennent, d'autant plus que dans beaucoup de pays, le coût de l'énergie est devenu le premier facteur de compétitivité.

Un autre argument, et non des moindres, constitue une belle nouveauté qui laisse espérer : " la Chine et les Etats-Unis, deux pays clés, ont changé d'état d'esprit ", note Nicolas Hulot. Pour deux raisons différentes, mais qui touchent particulièrement ces deux géants. Aux Etats-Unis, les militaires et le pentagone ont montré que le risque climatique pesait autant sur la sécurité intérieure que la menace terroriste. En cause notamment, les déplacements de population, ou la mobilisation de l'armée pour les catastrophes climatiques. La Chine quant à elle est entrée dans l'enjeu climatique par la porte de la pollution. Une inquiétude majeure pour les autorités. " Ces deux pays peuvent déverrouiller la dynamique ", espère l'écologiste.

Au-delà des accords qui seront pris à Paris en 2015, " il faudra s'interroger sur les raisons qui nous ont menés vers ce carrefour de crise ", recommande Nicolas Hulot qui insiste sur la nécessité de " redéfinir les fins pour adapter les moyens ". Si demain, les innovations scientifiques et technologiques nous permettent de retrouver une profusion énergétique avec les énergies renouvelables, les limites physiques des matières premières et des ressources naturelles se poseraient encore. Tel un recommencement.
" Il faut redéfinir le sens du progrès, savoir quelles sont nos priorités ", conclut Nicolas Hulot.

Rendez-vous en 2015...

Marion Spée


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