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Résumé de La construction sociale de l’inégalité des sexes de Paola Tabet

Publié le 15 octobre 2014 par Juval @valerieCG

Je vais vous résumer le livre de Paola Tabet La construction sociale de l’inégalité des sexes. Des outils et des corps.
(l'article contient des descriptions explicites de viols et de tortures).

L'auteure veut étudier la différenciation par sexe des outils. La division sexuelle du travail est souvent vue par les anthropologues comme une relation de complémentarité, de réciprocité et de coopération, qui insistent sur le caractère naturel et biologique de cette division et donc sur sa nécessité.
Godelier dit par exemple que la reproduction empêche les femmes de chasser et faire la guerre.
Pour Tabet la division du travail n'est pas neutre mais orientée, asymétrique et de domination.
Pour cela elle va étudier les outils employés parles hommes et les femmes. Il est souvent dit que comme les femmes ont des tâches simples à faire, il est normal qu'elles n'aient que des outils simples.
La thèse de Tabet :
- les femmes accomplissent certaines tâches et pas d'autres selon les outils à utiliser
- ce sont dans les formes du contrôle masculin des outils (et donc dans le sous-équipement des femmes) qu'il faut chercher les facteurs de la division sexuelle du travail.
Sa démarche :
- montrer que dans beaucoup de sociétés de chasseurs/cueilleurs l'équipement féminin est moindre
- montrer que dans les activités nécessitant un outillage complexe, même si la part des femmes est la plus importante, les femmes ont les outils les plus rudimentaires
- les activités qi reviennent aux femmes sont souvent les plus archaïques
- l'emploi et le contrôle des outils par les femmes sont limités
- il n'y a pas d'activité proprement féminine.
- les activités féminines sont des activités qu'on peut qualifier de résiduelles. Elles ne sont permises aux femmes que si elles peuvent être faites sans outils ou avec des outils simples. dés qu'il y a l'obligation d'utiliser des outils, il y a masculinisation.
Chez les !Kung, il a été calculé qu'une femme parcourt 7800 km les 4 premières années de la vie de son enfant pour chasser et cueillir. Elles ont juste un bâton à fouir pour cela. une journée de cueillette leur permettra de rapporter entre 7 et 15 kg de nourriture.
Les hommes chassent et ont pour cela des arcs, des flèches et des sagaies.
Chez les Yamana, les femmes ne peuvent fabriquer leurs outils car seuls les hommes ont le droit de posséder les outils servant à les fabriquer.
Dans de nombreuses sociétés les femmes dépendent des hommes pour fabriquer leurs outils.

Constat :
La cueillette des végétaux est féminine à 80,3 % parce qu’elle se fait à main nue ou avec des outils rudimentaires comme le bâton à fouir.
La récolte du miel est masculine à 91,7 % parce qu’elle nécessite une hache pour couper les troncs et en extraire larves et miel. La chasse est à 100 % masculine pour les grands mammifères aquatiques, à 99,4 % pour les gros animaux terrestres, à 98 % quand il s’agit d’oiseaux, à 97,5 % pour la chasse avec pièges de petits mammifères terrestres.

LA CHASSE :
Quand les femmes chassent, elles ont les outils les moins perfectionnés. par ex chez les esquimaux, elles chassent le phoque et le caribou mais là où les hommes ont des arcs, des harpons et des fusils, elles ont juste un couteau domestique ou une massue en bois.
Dans beaucoup de sociétés, les femmes chassent si elles ne sont pas mariées.
Beaucoup font la battue à la chasse en courant et en aboyant pour effrayer le gibier. Elles ne sont pas armées. Elles servent d'épouvantail pour l'animal sans aucune protection.
Chez les Yamana, les femmes pagaient pendant que les hommes ont la lance.
Très souvent les femmes ont des massues quand les hommes ont des arcs.
La chasse aux petits animaux est pratiquée à égalité entre les hommes et les femmes. Beaucoup de femmes utilisent des pièges. Les hommes peuvent chasser à mains nues s'ils le souhaitent mais les femmes ne peuvent pas chasser avec des armes.
Conclusion : ce n'est donc pas la chasse qui est interdite aux femmes mais les armes.

LA PECHE :
Les femmes ont une plus large gamme d'outils et en fabriquent. En revanche l'embarcation est la plupart du temps fabriquée parles hommes.
Les outils masculins pour pêcher ont en général une rentabilité supérieure. L'activité des femmes est limitée par des tabous et des interdits.
La pêche au quotidien est souvent faite par des femmes ; les hommes pêchant dans des cérémonies prestigieuses. Les femmes fournissent souvent la majeure partie du produit de la pêche.

L'AGRICULTURE :
- En général la charrue est réservée aux hommes.
L'agriculture se divise en deux catégories si elle est rudimentaire :
- le bâton à fouir et la houe ; utilisés parles femmes
- la hâche, le coupe-coupe ; par les hommes qui sont aussi des armes et permettent de fabriquer d'autres outils.
Les hommes contrôlent souvent le processus entier.
Ils sont chargés de défricher ce qui est une activité de prestige.
On constate que quand la hâche a été introduite à l'époque coloniale, les hommes ont pu gagné du temps de loisir mais comme la surface défrichée avait augmenté, le travail des femmes a augmenté en durée.

L'ARTISANAT :
Sous-équipement des femmes. La poterie est faite à main nue parles femmes et avec un tour par les hommes.
Pour le tissage, les hommes ont un métier à pédale alors que les femmes ont un métier horizontal ou vertical.
Pour les matières premières, les métaux, pierre, os, bois, coquille sont réservés aux hommes et la terre, argile, peau, fibre végétale et animale aux femmes.

Les hommes ont donc les armes et les outils. Plus les outils sont complexes, plus la productivité est élevée. Lorsqu'il y a machinisation, les femmes en sont complètement exclues. Elles font toujours les travaux mais à main nue. Leur rendement est bas et demande beaucoup de temps et de patience. Les outils pour fabriquer d'autres outils sont détenus par les hommes.

L'appropriation physique des femmes par les hommes ne se limite pas à l'exploitation sexuelle et reproductive. Elle atteint aussi l'intégrité et l'expression corporelle : motricité contrainte, claustration, délimitation de l'espace, mutilations sexuelles, bandage des pieds etc
Chez les dugum dani, au décès d'un proche, les hommes donnent des porcs, les femmes donnent les doigts qu'on leur coupe.

Les hommes contrôlent la production des outils et des armes.
En détenant les armes, ils peuvent exercer de la violence envers les femmes.
En détenant les outils, ils sous-équipent les femmes.

FERTILITE NATURELLE, REPRODUCTION FORCEE :
On parle de reproduction et de fécondité féminine pour justifier l'état de subordination des femmes.
La position subordonnée des femmes serait dûe à des contrainte biologiques ; on pense souvent à la procréation come un événement biologique extérieur aux rapports sociaux.
Il y a une intervention généralisée sur la reproduction. ce qui va suivre sert à démontrer que la grossesse est socialement contrôlée et n'est pas un processus naturel.
L'humain est un mammifère relativement infertile. (vache avec insémination artificielle ; 75% de chances d'être enceinte, femme ; il faudra pour atteindre ce pourcentage 3 à 4 cycles avec 3 inséminations).
Comme les femmes n'ont pas de chaleur on ne sait pas quand elles sont fécondables. Le mariage semble la réponse sociale à la spécificité de la sexualité féminine.
Le mariage permet de les rendre "toujours copulables". Le mariage les expose en permanence au coït et au risque de grossesse.
Le mariage n'est pas le lieu où les deux partenaires réalisent leurs envies sexuelles dans une égalité réciproque. Il est souvent forcé pour l'un ou les deux par un dressage, un forçage.
les femmes sont dressées au coït. Tabet ne dit pas que les femmes n'ont pas de désir mais leurs envies sexuelles sont canalisées vers une seule chose le coït en expliquant que la maternité est leur seule véritable fonction, qu'elles sont faites pour procréer.
Chez les Hausa de l'Ader "la femmes a sa terre entre ses jambes".
Il y a un dressage psychologique, des menaces, de la violence, de la contrainte.
En Nouvelle Guinée, une femme qui se refuse à son mari subit un viol collectif.
Dans certains rites australiens, les femmes sont enlevées, introcisées avec un couteau de pierre puis violées afin qu'elles se "tiennent tranquilles".
elles sont contraintes au devoir conjugal et dans beaucoup de sociétés elles sont soumises à la volonté sexuelle du mari par des coups. Elles sont aussi frappées si elles veulent le quitter.
Engrosser une femme est un bon moyen de la garder à domicile.

La fécondité et la grossesse sont souvent surveillées.
Dans certaines sociétés, on gère la contraception et l'IVG. Parfois la femme enceinte est surveillée tout au long de sa grossesse.
Chez les chagga on excise la femme ce qui rend l'accouchement dangereux et très douloureux mais il lui est interdit de crier.
Il existe un infanticide sélectif des filles chez les esquimaux. Comme seuls les hommes peuvent chasser, les filles sont moins importantes. Or si une femme a une fille elle n'aura pas d'enfant pendant 3 ans avec l'allaitement donc la fille est tuée ou donnée à l'adoption.
Dans les sociétés nomades, si les naissances sont trop rapprochées cela épuisera la mère qui ne pourra travailler ; on va donc tuer la fille.
Dans beaucoup de sociétés, l'allaitement dure 1 à 3 ans ce qui fait que la femme n'est pas exposée au coït.  Dans certaines populations si le père veut un autre enfant immédiatement, on ôte l'enfant à la mère et on le nourrit artificiellement. On le voit en Occident avec la mise en nourrice. Chez les bourgeois florentins du XVème et XVIème siècles, le père gère complètement l'accouchement. Il signe un contrat avec le mari ou le père de la nourrice.
Le corps reproducteur de la femme de bourgeois produira l'enfant
Le corps allaitant d'une femme de classe inférieure assura la deuxième partie du travail reproductif.
La contraception moderne sépare la reproduction de la procréation et introduit la non nécessité de procréer. Elle permet aux femmes d'avoir la maitrise des femmes sur leur corps mais elle conduit aussi les femmes à l'unique sexualité coïtale.
Les femmes sont divisées en catégories ; une à sexualité reproductive, une à sexualité non reproductive. Le contrôle de la prostitution au XIXème siècle, sert aussi à contrôler la sexualité extra conjugale et à faire en sorte qu'elle demeure "conforme à la nature".

Dans beaucoup de sociétés, il y a des structures arrangeant la sexualité pré-conjugale avec de nombreuses manières de structurer la sexualité juvénile non reproductive : coït interrompu, filles pas nubiles, autres actes que le coït, IVG et infanticides en cas de grossesse.
Chez les Rukuba, il existe des relations prémaritales pour les filles non mariées. Les hommes mariés peuvent avoir des relations avec ces filles. L'inverse (femmes mariées avec garçons non mariés est impossible). les hommes peuvent avoir plusieurs partenaires. Si la fille tombe enceinte, elle est avortée ou l'enfant est tué à la naissance. le coït interrompu et la préservatifs sont connus mais pas utilisés.
Chez les Samo un homme prend une maîtresse. elle tombe enceinte. Il se marie et prend l'enfant pour l'élever avec sa femme.

La reproduction est un système de contrôle et de manipulation de tout individu femelle (mâle aussi mais à un degré moindre) qui devient le pivot de rapport entre les sexes.
Il est possible que la mise en place de l'obligation à la reproduction ait empêché une sexualité polymorphe.

La grossesse représente une dépense énergétique importante comme l'allaitement. Unr journée d'allaitement correspondrait à 2 h de coupe de bois/9 h de marche. La grossesse correspondrait à 1 mois de coupe du bois.
Tabet étudie la procréation comme un travail car c'est différent des autres processus organiques :
- pas indispensable à la vie de l'individu qui se reproduit
- aboutit à un nouvel être
Pour s'approprier les instruments de travail dans la reproduction, on s'approprie le corps de la femme.
Le travail reproductif peut être libre ou forcé.
- on peut imposer la grossesse
- on peut imposer le choix du partenaire ; choix du temps de travail (quand va-t-elle tomber enceinte), du rythme de travail (combien de fois)
- imposer le type de produit : sexe, couleur de peau etc
- exproprier la femme de son produit (lui prendre l'enfant)
- l'exproprier symboliquement de sa capacité et de son travail (dire que la femme n'a aucun rôle dans la reproduction).

Dans le cas de l'allaitement, il a été fait des calculs (en Afrique par exemple) pour calculer le coût du lait maternel. On s'est rendu compte qu'il revenait moins cher de garder l'allaitement maternel car on ne nourrit pas assez les femmes et cela revient ainsi peu cher alors qu'un allaitement artificiel nécessiterait de nourrir correctement des vaches.

Tabet étudie la location d'uterus (GPA). Vente dans laquelle la force de procréation est échangée  comme force de travail. C'est limité dans le temps. La force de procréation est offerte et vendue par son possesseur.

Elle étudie ensuite l'idée de famille monoparentale qui va croissant. L'appropriation privée des reproductrices n'est plus une condition nécessaire de la reproduction. Seule l'appropriation individuelle est atteinte par le phénomène des familles monoparentales pas l'appropriation collective. On se demande si cela constitue une remise en cause de la domination masculine ou juste un aménagement. Les femmes  paient seules le coût de cette transformation sociale. Les hommes n'ont plus à payer pour le travail reproductif tout en continuant à en bénéficier.
Néanmoins il faut aussi noter qu'il y a réappropriation parles femmes. Certaines font le choix d'être seules.

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