Les responsables de deux associations reprochent à la Ville de ne pas être pris en compte.Réactions Nadia Bahri, porte-parole de l’association ATE, pointe la responsabilité des élus, lesquels ne veulent pas jeter d’huile sur le feu.
Le centre socioculturel a été victime d’un acte de vandalisme début octobre. © Photo PHOTO XAVIER Léoty
Raouf Fredj (à gauche), adjoint de M. Fountaine, regrette le « manque de confiance dont souffrent les jeunes ». © Photo archives x. L.
- Le centre socioculturel a été victime d’un acte de vandalisme début octobre.© Photo PHOTO XAVIER Léoty
Publié le 23/10/2014 par Éric chauveauhttp://www.sudouest.fr/2014/10/23/malaise-et-ressentiment-dans-le-quartier-de-mireuilun-clip-video-d-avertissement-1713180-1391.php
Compris dans la zone urbaine sensible rochelaise (ZUS), le quartier ouest à habitat social de Mireuil et ses 15 000 habitants partent avec un désavantage. L'étiquette ZUS colle à la peau et passe sous silence les choses qui fonctionnent. Et voilà que de récents actes délictueux, bris de vitrage au centre socio-culturel (1) et gazage lacrymogène d'un cours de danse au local du collectif Ultimatum, ramènent le quartier dans la rubrique faits divers. Ces actes traduisent aussi du relatif divorce entre des habitants du quartier et des équipements, a priori mis à leur disposition. Cela n'est jamais de bon augure. Même si ces faits sont l'objet d'une minorité, ils attestent, tout du moins, d'un malaise.
Un clip vidéo d’avertissement Jean-Philippe Allochon, dit Nano, 33 ans, artiste, fondateur en 2012 de l’association Vie à Mireuil, n’est pas surpris des bris de vitres. « Les jeunes sont en colère. Il y a des petits [au sens des plus jeunes NDLR] qu’on ne contrôle pas », dit-il.
Mettant en avant sa capacité créatrice et le fait qu’il ne roule pour aucun politique, Nano considère tout de go que son association (il a aussi contribué à impulser l’association Tous Ensemble) représente la majorité des gens du quartier, même si cette « majorité est silencieuse ». Il est taraudé par « le sentiment d’être évincé » alors qu’il œuvre à la promotion de talents locaux et à l’organisation d’événementiels. Ses détracteurs le considèrent, au minimum, comme outrancier et qu’il ne représenterait que lui-même.
Nano est déjà prêt à passer par la provocation sur fond de buzz (ou l’inverse) revendiquée, via le tournage d’un clip intitulé « Avertissement !… » (à la mairie de La Rochelle qui se permet d’évincer une majorité de la communauté très productive sur le terrain […], précise l’annonce sur Facebook).
Le rendez-vous est donné, ce dimanche, à 16 heures, devant le collège Mendès-France, à Mireuil. L’appel est très large « mais ce n’est pas un appel à la haine. Il s’agira de mimer une manifestation. S’il y a dix personnes, je serai satisfait », ajuste-t-il.
Promesses
Ce malaise des adultes et des jeunes qui dénoncent également ces actes de casse et de perturbation, vise plus haut. Ils contestent la nouvelle municipalité jusqu'à affirmer que des promesses préélectorales (non écrites) n'ont pas été tenues concernant le soutien à la récente association ATE, « Association Tous Ensemble ».Nadia Bahri, porte-parole d'ATE se dit ainsi déçue de la rencontre, le 4 octobre, avec le maire Jean-François Fountaine et plusieurs adjoints. Dans ses statuts, l'ATE (qui concerne Mireuil mais aussi le quartier sud de Villeneuve-les-Salines voire d'autres) a pour objet de proposer des activités sportives, culturelles, sociales et divertissantes aux jeunes. La porte-parole considère qu'il s'agit d'une alternative.
Dénonçant aussi la discrimination et affirmant qu'il y a des énergies et des compétences non exploitées dans le quartier, il s'agit aussi de rompre avec la stigmatisation dont fait l'objet Mireuil en terme d'affaires de drogues et autres délits.
Un élu pourtant en soutien
Nadia Bahri pensait donc que la demande d'une subvention de 450 000 euros - « un dossier avait été préparé. Nous avions prévu huit emplois et des CAE (contrat d'accompagnement dans l'emploi) » -, était tout à fait réalisable, acceptable de la part de la nouvelle municipalité. Cela n'a pas été le cas alors qu'il est plus que susurré qu'un élu, Raouf Fred, adjoint aux activités sportives de la jeunesse, habitant à Mireuil, appuyait l'association. Cet homme avait été un potentiel rabatteur de voix en faveur de la liste ratissant large conduite par Jean-François Fountaine dans le duel, à gauche, l'opposant à la liste Jaumouillié soutenue par Maxime Bono.Finances et doublon
Le discours dominant de l'actuelle municipalité rochelaise est que les finances de la Ville sont limitées et, au fond, qu'il ne s'agit pas de faire un centre socioculturel bis.L'adjoint à la culture, Arnaud Jaulin, centriste rallié, insiste aussi sur la future tenue des assises de la culture à Mireuil afin de pouvoir sereinement traiter de cette question portée par l'association ATE (2).
En effet, la réunion du 4 octobre avec les élus s'était clôturée dans une relative tension. Et c'est dans la nuit du même samedi à dimanche que des vitres du centre social ont été brisées. La relation de cause à effet n'a pas été établie et il n'a pas eu, pour l'instant, d'interpellations.
(1) Le centre social le Pertuis, après avoir longtemps fonctionné sur plusieurs sites délabrés, est presque flambant neuf. Il a été inauguré en 2012. (2) Une question d'autant plus sensible depuis le naufrage financier, fin 2013, de l'Astrolabe, le centre culturel de la Ville installé à Mireuil. À ce moment, diverses revendications avaient émergé, parfois dans la veine « nous voulons être plus reconnus et pris en compte et prendre les choses en mains ».
« Les jeunes se sentent abandonnés »
« Il n’y a pas eu de manque de respect des jeunes envers les élus. » Nadia Bahri, vice-présidente et porte-parole de l’Association Tous Ensemble, est affirmative. Le cœur du problème, pour cette habitante de Mireuil, est le sentiment d’abandon que ressentent les ados et les jeunes adultes dans ce quartier.
« La ludothèque et le centre social font du bon travail pour les enfants, mais il n’y a aucune structure qui accompagne les 13-30 ans. C’est pour les aider qu’on a voulu créer une association. Au début, le maire s’est dit prêt à nous aider si le projet lui paraissait viable, en passant par la CdA s’il le fallait. Atlantic Aménagement nous a trouvé un local, mais l’aide de la Ville n’est pas venue. Les jeunes sont déçus, on ne leur fait pas confiance. Ils ne comptent plus sur la politique, ils ont l’impression qu’on se sert d’eux pendant les campagnes et qu’on les oublie après les élections. Ils ont perdu l’espoir », déplore Nadia Barhi.
Le maire Jean-François Fountaine, contacté hier, n’a pas souhaité « jeter de l’huile sur le feu ». Raouf Fredj, adjoint en charge des activités sportives de la jeunesse, originaire de Mireuil, ne cache pas son malaise par rapport aux événements de ces derniers jours. Lui qui avait affirmé avoir apporté des voix à la liste Fountaine pendant les municipales après avoir soutenu Anne-Laure Jaumouillié, faute de subventions pour les associations locales (« Libération » du 21 février), regrette le manque de confiance dont souffrent les jeunes de Mireuil. « Qui, mieux que les habitants, connaît les besoins du quartier ? », interroge-t-il, sans vouloir s’étendre plus largement sur le sujet.
F. Z.