Eradiquer le VIH par endogénéisation, c’est-à-dire par une sorte de verrouillage ou désactivation génétique, plutôt que par destruction de toutes traces de VIH, c’est la toute nouvelle voie thérapeutique envisagée par ces chercheurs de l’Inserm qui publient leurs conclusions dans la revue Clinical Microbiology and Infection. Leur étude, basée sur le cas de 2 patients infectés mais qui n’ont jamais développé la maladie, révèle en effet un nouveau mécanisme, génétique, qui pourrait peut-être être favorisé et qui, de plus, pourrait être transmissible à la descendance ?
L’endogénéisation est le processus selon lequel les génomes des humains ou d’autres mammifères, vont assimiler des séquences d’ADN transmises de façon virale –pouvant ensuite entrainer des mutations avec des effets sur la santé et l’évolution. Les chercheurs de l’Inserm expliquent que de nombreuses espèces, dont les humains, présentent ainsi des « traces » d’exposition à d’autres rétrovirus dans leurs génomes, ce qui suggère possible l’hypothèse d’une endogénéisation du VIH.
Chez ces 2 patients, infectés par le VIH mais qui n’ont jamais présenté de symptôme de maladie, les tests de routine n’avaient pas permis jusque-là de détecter la présence du VIH dans le plasma ou les cellules des patients. Donc ces patients n’ont jamais reçu de traitement.
Mais, en étudiant par séquençage « profond » le génome des patients, les chercheurs parviennent ici à identifier les séquences d’ADN du VIH intégrées dans le génome. Ils remarquent que les virus chez ces 2 patients ont été inactivés par modification de certains gènes.
En réévaluant les réponses immunitaires au VIH chez les 2 patients, les chercheurs identifient une réponse forte chez l’un et modérée chez l’autre, ce qui confirme qu’une infection productive a bien eu lieu chez les 2 patients.
Stimuler Apobec? Les chercheurs expliquent, à l’issue de ces analyses, que la stimulation d’un groupe d’enzymes, Apobec, généralement inhibé par la protéine Vif du VIH, a, chez ces 2 patients, probablement été amplifié et a retrouvé son efficacité au moment de l’infection initiale, bloquant la propagation du VIH. Le virus devient alors Incapable de se multiplier mais ses séquences ADN restent néanmoins « imbriquées » dans le génome des patients.
Il s’agirait donc bien de cas d’endogénéisation ayant conduit à la guérison de l’infection à VIH. Favoriser ce mécanisme -en simulant Apobec ?- ouvre une toute nouvelle voie thérapeutique possible. Ensuite, alors que –dans certains cas- cette modification de l’ADN humain est transmissible à la descendance, on peut même imaginer la transmissibilité de cette protection contre le VIH.
Source: Clinical Microbiology and Infection DOI: 10.1111/1469-0691.12807 HIV infection en route to endogenization: two cases (Visuel@NIH@David S. Goodsell, RCSB PDB “Visuel illustration of the structure of HIV, with identified proteins labeled”)