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Sommes-nous émotifs à ce point?

Publié le 14 novembre 2014 par Magazinenagg
Sommes-nous émotifs à ce point? La mise au rancart du costumier de Radio-Canada a mis le feu aux poudres. À ce jour, plus de 55 000 personnes ont signé une pétition en ligne exigeant son maintien et près de 40 000 personnes adhèrent à sa page Facebook.
Selon Johanne Hémond, présidente de la section locale de Montréal du STARF, ce sont des milliers de souvenirs qui disparaissent. C’est un manque de respect pour le passé, pour l'expertise acquise à travers les années. Elle affirme même que c'est la mort annoncée de tout le secteur design.
Wow! On se calme. On nous annoncerait la fin du monde que je ne serais pas surpris.
Le costumier de Radio-Canada c’est deux employés et 90 000 pièces de vêtements. La plupart n’ont aucune valeur. Les quelques pièces ayant une valeur historique et patrimoniale seront récupérées par les musées ou achetées par des fournisseurs de l’industrie cinématographique ou théâtrale.  Il n’y a pas de quoi déchirer sa chemise sur la place publique.
Je n’arrive vraiment pas à comprendre qu’il y ait autant de gens prêts à monter aux barricades pour si peu, alors qu’ils ignorent des problèmes autrement plus importants.
Il existe des dizaines de pétitions sur le site de l’Assemblée nationale qui concernent des problèmes réels, mais qui recueillent tout au plus quelques centaines de signatures :
Pétition   Signatures (4 nov. 2014)
Maintien des services d’aide à la réussite scolaire   122
Flexibilité du placement des personnes âgées en CHSLD                                 13
Adoption d’une loi et création d’un organisme indépendant permettant le signalement d’anomalies dans l’administration publique   330
Les problèmes qui affligent les enfants, les étudiants, les personnes âgées, sans parler de la corruption, ne sont-ils pas des défis autrement plus importants que le costumier de Radio-Canada? Il est vrai que le dégraissement de Radio-Canada affecte toute la tribu culturelle québécoise qui ne ménage aucun effort pour dénoncer toutes compressions menaçant le moindrement son confort. De plus, toutes les raisons sont bonnes pour attaquer le gouvernement Harper. Malgré tout, cela ne me semble pas suffisant pour expliquer la levée de boucliers que nous connaissons depuis l’annonce de la fermeture du costumier.
Je crois que l’explication nous a plutôt été fournie par Wilfrid Laurier, il y a plus d’un siècle : « le Québec n’a pas d’opinions, il n’a que des sentiments ». Nos ancêtres avaient donc l'émotion facile. Nous en sommes malheureusement encore là. Ça doit être génétique.
Je crois que c’est la raison pour laquelle il est si difficile de discuter entre adultes des problèmes qui affligent le Québec. Avant même que la discussion débute, les protagonistes montent sur « leurs grands chevaux » et monopolisent le débat. Ils n’hésitent pas à manipuler les faits pour susciter une réaction émotive dans la population. Alors s’installe un dialogue de sourds où toute discussion raisonnée est exclue.
Ce comportement immature nous empêche de progresser. L’attention de la population est centrée sur des problèmes secondaires alors que les vrais problèmes sont escamotés. Il faut réinventer le système de santé, mais l’attention médiatique est centrée sur la taille et le tempérament du Dr Barrette. Le décrochage scolaire est une calamité qu’il faut absolument enrayer, mais l’attention de la population est dirigée sur la réduction du financement public aux écoles privées.
Malheureusement, les politiciens, les hauts fonctionnaires, les groupes d’intérêt manipulent ce trait de caractère des Québécois à des fins partisanes. Il est plus facile de détourner l’attention du public en montant en épingle une anecdote croustillante que d’agir en adulte responsable face aux nombreux défis qui nous assaillent. Il faut toutefois admettre que les médias, friands d’anecdotes croustillantes, font partie du problème.
Les Romains utilisaient « du pain et des jeux » pour pacifier la populace. Nous utilisons des programmes gouvernementaux et des anecdotes croustillantes, dans le même but. Autre temps, autres mœurs.

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