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Entre variétoche et lobotomie : la petite musique du Barnum

Publié le 25 mai 2008 par Lgb

Le jeudi 22 mai, le Barnum sarkozyste a passé un nouveau cap en décorant un “artiste internationale” de la légion d’honneur, Marie Claudette Angélil, alias Céline Dion.

Il récompensait ainsi une vie tout entière consacrée à l’amour de la musique, à la langue française, à la poésie, à la hauteur d’âme et à la sûreté du goût.

Entre variétoche et lobotomie : la petite musique du Barnum

On pourrait railler, bien sûr. Mais il faut reconnaître qu’il y avait de bonnes raisons de décorer cette Immense Artiste.

Le tiroir caisse

N. Sarkozy étant l’exact reflet des français, il a bien sûr les goûts de tout le monde et aime ce qu’aime chacun d’entre nous : Johnny, le foot, Michel Drucker, la télé, Christian Clavier, Mireille Mathieu (?), et Céline Dion… D’où la petite tirade de Notre Président, expliquant que

la France ayant changé, ceux qui réussissent sont les bienvenus ici

ici étant l’Elysée. L’Elysée qui avait abrité le créateur d’un ministère dit de la culture, puis un certains nombre d’occupants à la pointe de ce qui pouvait se faire en matière artistique. L’Elysée dont Pompidou avait confié le relookage à Vasarely. L’Elysée qui autrefois était le siège d’une politique culturelle… Des ratés, tous ces minables! Des intellos qui ne vendaient rien. Car si Céline Dion est aujourd’hui décorée, c’est avant tout parce qu’elle fait du chiffre. Quatre de ses albums ont dépassé les 20 millions d’exemplaire vendus dans les années 90.

Entre variétoche et lobotomie : la petite musique du Barnum

N. Sarkozy félicite le mari-mentor-impresario pour l’habile gestion de son patrimoine

Voilà qui vaut bien une médaille.

La francophonie

Moins terre à terre, il s’agissait de récompenser une artiste qui, plus que tout autre, défend la langue française, un peu comme Boileau en son temps, mais sans toutes ces petites fioritures merdiques que plus personne ne comprend et dont tout le monde se fout. Car Céline Dion, Notre Président l’a bien dit,

fait rayonner notre langue au-delà de nos frontières

C’est certain. Céline Dion l’avait d’ailleurs déclaré elle-même :

Lorsque je chante en français, j’ai l’impression d’enfiler un vieux jean avec les genoux et les fesses à la bonne place.

C’est dire ! Mme de La Fayette n’a plus qu’à aller enfiler ses vieilles robes, bientôt, les examinateurs sadiques pourront coller les futurs fonctionnaires dans les concours avec des textes de Céline Dion.

Entre variétoche et lobotomie : la petite musique du Barnum

“Vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage” (Dr. Nicolas B., chirurgien-plasticien)

Et ça vaut bien une médaille.

La fraîcheur de l’amûr

Mais il ne faut pas croire Notre Président. La francophonie et le pognon, ça ne fait pas tout. Beaucoup d’autres choses le rapprochent de cette Immense Artiste. Un certain rapport à l’amûr, par exemple, qui, pour l’un comme pour l’autre, doit être autant que possible étalé sur tous les écrans jusqu’à plus soif. Car, d’après N. Sarkozy,

L’amour, il ne doit pas y avoir d’impudeur à le partager. Ca donne une certaine fraîcheur.

La déclaration ne manque pas de sel, à trois mètres du mari de l’Immense Artiste qui accuse quand même pas mal d’heures de vol… Mais on voit se dessiner là une affinité, un élan de vie commun où l’exhibition joue, évidemment, un rôle majeur.

Entre variétoche et lobotomie : la petite musique du Barnum

Dents blanches, médaille rouge et fraîcheur de l’amûr partagé

Voilà qui vaut bien une médaille.

Donc, N. Sarkozy se sent proche de Céline Dion. Mais qu’en est-il de l’inverse? Céline Dion se sent-elle proche de Notre Président ? Céline Dion est-elle sarkozyste ?

Variétés, lobotomie et sarkozysme

Après une longue (et pénible) enquête, la chose semble incontestable: Céline Dion est profondément sarkozyste. Car, alors même que le revenu du capital explose et que bosser rime de plus en plus avec se faire exploiter, l’Immense Artiste vient épauler Notre Président dans sa volonté de remettre la France au travail mal payé.

Elle vous l’a bien dit : si ta vie est pourrie, si tu craques au boulot, si tu deviens dingue dans le métro, ne cherche pas à réfléchir, à contester ou à te révolter. Ne lis pas de sociologie, ne fréquente surtout pas les AG, ne te syndique pas, ne fais pas grève et ne bouge surtout pas.

Non : évade toi “dans ta tête” en consommant des produits “culturels” de masse qui t’apprendront à supporter ton sort sans trop te poser de question, par exemples, la soupe produite par Marie-Claudette Dion.

Cette belle ode à la soumission du travailleur s’intitule “Je danse dans ma tête” :

Que je sois debout dans le métro
Que je sois assise à mon bureau
Tous les jours les mêmes mots
Les mêmes gestes de robot
Y a d’quoi dev’nir fou
Et vous qu’en pensez-vous?
Y a vraiment d’quoi dev’nir fou
Mais moi je m’en fous

Je de-de-de-danse dans ma tête
Je de-de-de-danse dans ma tête
Je de-de-de-danse dans ma tête
Je de-de-de-danse dans ma tête
Dans ma tête

Et ça, ça valait pas une médaille ?

Entre variétoche et lobotomie : la petite musique du Barnum

Si, si, Céline était au Fouquet’s

LGB vous souhaite bon courage à tous, et remercie tout particulièrement mademoiselle É. pour lui avoir écorché les oreilles avec cette merveilleuse chanson pendant une soirée entière…


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