Le docteur Denis Mukwege est un gynécologue exceptionnel. Le documentaire diffusé sur France 5, hier soir, rendait un hommage simple et sincère à cet homme et ses équipes. Depuis des années, ce médecin congolais du Kivu (1) « répare » les femmes dont le corps est devenu « un champ de bataille » pour des rebelles armés et qui ont ordre de violer, de torturer, de « saccager » les femmes congolaises. L’objectif de ces agressions et violences sexuelles est simple : chasser les jeunes filles, les femmes de tous âges de leurs villages où les sous-sols regorgent de diamants, de coplan, d’or, d’argent et richesses en tous genres. La lutte pour l’espace plein de promesses et de richesses entraîne un exil forcé de ces femmes rejetées par leur communauté, leur mari, leur famille. Souillée, elles sont condamnées à se reconstruire ou à se détruire.
Le docteur Denis Mukwege
Denis Mukwege est heureusement là et bien là. Malgré trois tentatives d’assassinats qui l’ont condamné, pour un temps, à quitter sa région, il est revenu conscient de l’importance de son rôle et de celui de ses assistants : chirurgiens français, psychologues, infirmières, enseignantes etc. Cet homme est la bonté même. Il parle franc, il parle bien, ses gestes sont ceux d’un homme respectueux du corps des femmes, des corps abîmés qu’il doit « réparer » afin de préserver l’avenir de futures mères et de leur garantir un avenir sexuel… Il se trouve que ce documentaire a été diffusé une journée avant la date commémorative de la loi Veil adoptée en 1974. Une loi de liberté de disposer de leur propre corps pour les femmes qui, enceintes, ne désiraient pas l’enfant qu’elles portaient. Grâce à VGE (Valéry Giscard d’Estaing) ancien président de la République et aussi avec le soutien d’une majorité de parlementaires de gauche et de droite (pas tous pour ces derniers) la loi sur l’interruption volontaire de grossesse a représenté un progrès immense et mis fin aux avortements clandestins avec le concours des « faiseuses d’anges » et leurs conséquences dramatiques avec septicémies, hémorragies et souvent stérilité future. Sans oublier la promotion de la contraception destinée à éviter IVG et grossesse non désirée. Souvenons-nous. Avant la loi Veil, 300 000 femmes avortaient en France dans la clandestinité ou à l’étranger. Les voyages à Brighton permettaient aux Françaises « chanceuses » d’interrompre leur grossesse dans d’excellentes conditions sanitaires. A louviers, le Dr Ernest Martin fut un précurseur dans la mise en place d’un centre d’IVG au sein de l’hôpital de la ville. Je me souviens de sa relation bienveillante à l’égard des femmes en détresse puisque tel était le terme utilisé par la loi. Aujourd’hui, la notion de détresse a disparu. Demeure la liberté de chaque femme, un bien essentiel. Et pourtant, en 1974, l’église catholique, les obscurantistes de tous poils, des machos infâmes se sont battus pour empêcher l’adoption de la loi. Comme rien n’est jamais acquis (voir la tentative espagnole de revenir sur l’IVG, tentative…avortée) les citoyen(nes) français(e)s doivent demeurer vigilant(e)s. Une revanche est si vite arrivée. (1) Cette région de la République démocratique du Congo connaît des guerres perpétuelles.