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Julliard veut couper le sifflet des conservatoires municipaux !

Publié le 30 novembre 2014 par Delanopolis
L'adjoint hidalguesque à la culture se lâche dans les colonnes du Monde, quotidien vespéral de la bien-pensance "hollandaise". Et les employés de ces instruments essentiels d'acquisition des pratiques musicales que sont les conservatoires ne sont pas contents du tout ! Julliard veut couper le sifflet des conservatoires municipaux ! "Il y a quelques jours, le journal Le Monde publiait les propos de Bruno Julliard, notre adjoint à la culture. Il s’exprimait alors sur l’état des conservatoires municipaux parisiens. Des propos qui n’ont pas laissé indifférents les personnels de ces établissements qu’ils soient administratifs ou pédagogiques.

Il est vrai que pour fustiger « le manque de mixité sociale » dans les conservatoires municipaux parisiens notre élu n’y va pas avec le dos de la baguette de chef d’orchestre. Pour Bruno Julliard, ces établissements d'enseignements artistiques municipaux sont « trop académiques », c'est-à-dire un peu trop ringards pour une municipalité qui veut entrer aux forceps dans le concert des smart-cities. « Les conservatoires portent bien leur nom » s’est d’ailleurs lâché notre élu dans cet article.

D’aucuns ont été amusés de constater que les propos de l’adjoint au maire étaient repris uniquement par un quotidien qui n’est autre que le porte parole des élites et dont le lectorat est très loin de la mixité sociale voulue par notre édile. Paradoxal, non ?

Autre paradoxe qui, cette fois ci, n’a pas prêté à sourire : Il faudrait enrichir la palette des activités au sein de ces mêmes conservatoires en faisant appel à des associations extérieures, seules à même de pouvoir apporter un peu de vraie « créativité innovante ». Pourtant, souvenons-nous que la remunicipalisation des conservatoires, au cours de la première mandature Delanoë, avait pour but de sortir de cette structure associative que la Ville avait de la peine à encadrer. A noter que ces associations sont loin d’être gratuites. C'est gênant alors que les conservatoires voient par ailleurs leur budget baisser chaque année.

Mais surtout prétendre qu’il y a une pauvreté de l’offre à Paris a été ressenti comme une injure pour tous nos collègues qui n’ont pas attendu la prise de parole du maire pour « avoir des pédagogies innovantes » (ateliers de hip-hop, de musique générée par ordinateur, musiques du monde, entre autres.)

Alors s’agirait-il d’un grand mépris envers les agents ou d’une grande ignorance de ce qui se passe dans les conservatoires dont notre élu a pourtant la charge politique depuis bientôt trois ans ?

Peut être un peu des deux tant les visites de l'adjoint à la culture dans les établissements se font au pas de course et sans un regard pour le personnel présent...quand elles ont lieu. Ce qui ne lui permet pas, bien sûr, de prendre la mesure de ce qui se joue pour l’éveil culturel des petits parisiens. Sait-il d’ailleurs que des ateliers de découverte existent depuis bien longtemps ?

Ignorance ou mépris également pour le travail remarquable d’un bon nombre de directeurs qui sont impliqués dans l'évolution de leur établissement mais limités dans leur budget : l'article du Monde ne fait état, à aucun moment, du budget très conséquent mis sur la table par la ville pour la mise en place des rythmes éducatifs (ARE), mais passe sous silence le fait que les conservatoire municipaux d’arrondissement (CMA) voient leurs dotations baisser de façon significative chaque année.

Quant à la question de la mixité sociale que l’élu appelle de ses vœux, il y a belle lurette que tous dans les conservatoires travaillent à la favoriser. Ainsi beaucoup d’entre eux réussissent à faire entrer dans leurs classes des enfants des couches sociales moins favorisées, par le biais de l’aménagement des rythmes éducatifs notamment.
Les personnels qui œuvrent dans les conservatoires peuvent, bien entendu, entendre que ces structures doivent évoluer mais faut-il encore leur en donner les moyens humains et matériels. Les bâtiments actuels ne permettent pas d’accueillir les enfants dans les meilleures conditions qui soient.

Studios d'études trops petits, en nombre insuffisants pour les répétitions, mal chauffés, avec problèmes accoustiques réccurents. Dans la plupart des conservatoires sous dimensionnés, il n'y a pas de salle des professeurs – pas de lieu de restauration pour les agents. Sans parler des problèmes thermiques et inondations à gogo....

Pour conclure, imaginer que la mixité sociale va naître de la nouvelle proposition d’inscription par tirage au sort est un leurre. Elle facilitera peut être le travail des équipes et permettra évidemment d'eviter la catastrophe de cette année (ce qui n'est pas rien), mais comme elle reste basée sur un jeu de probabilité, elle ne supprimera en rien la surreprésentation des classes aisées. D'ailleurs la mixité sociale existe-t-elle toujours dans la capitale ? Car c'est cette surreprésentation qui dessine désormais le visage de Paris. Un phénomène qui s’est d’ailleurs amplifiés depuis 2001, n’est-il pas ?

Toutefois d’autres pistes existent comme l’accueil sur dossier avec des critères de priorité comme dans les crèches et les logements sociaux ou la mise en place de passerelle à partir d’une collaboration plus étroite avec les écoles, par exemple.

Mais pour vraiment changer la donne, un long travail de communication devra être mis en place, un travail de fond en direction de toute une population qui estime que la culture musicale n’est pas pour elle.

Si la Ville de Paris veut changer le visage de ses conservatoires, qu’elle commence par faire évoluer son propre regard et qu’elle valorise mieux et plus ce qui s’y passe. Qu’elle sollicite et intègre à sa réflexion l’ensemble des acteurs de terrain et non quelques-uns triés sur le volet. Elle sera surprise de la richesse des propositions. Qu’elle évite surtout de remettre en cause, même par maladresse, les qualités professionnelles des personnels qui, au jour le jour, accueillent et forment tant d’enfants.

Quant au fait que certains s’éloignent entre le collège et le lycée, là encore, c’est une réalité que connaissent malheureusement l’ensemble des services publics (bibliothèques, piscines, stades….) et pas seulement dans la capitale. L’adolescent, cet ingrat, a ceci de particulier qu’il ne se reconnaît pas dans ces structures.

Alors conservateurs les conservatoires ? La question est posée mais rappelons à la Maire de Paris qu’un des objectifs des conservatoires définis par le ministère de la culture pour l’ensemble du territoire est la transmission de notre patrimoine musical. Alors oui, forcément, et n’en déplaise à nos élus qui n’ont peut être pas fait le deuil de leur propre apprentissage musical, il y aura toujours une part d’académisme dans le foisonnement des pratiques proposées, foisonnement que semble ignorer nos édiles.

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