Depuis la loi Pompidou-Giscard du 3 janvier 1973, le Trésor public ne peut plus présenter ses propres effets à l’escompte de la banque de France.
En clair, la banque de France a interdiction de faire crédit à l’État, le condamnant à se financer par des emprunts, contre intérêts, auprès de banques privées, au lieu de continuer à emprunter sans intérêt auprès de la banque de France…
Depuis l’application de cette loi, peu connue du grand public, l’État est obligé de passer par le système des banques privées pour financer son endettement. Une situation ubuesque en elle-même et qui s’est encore aggravée depuis la crise de 2008 où en volant au secours des institutions financières, l’État est également devenu le fournisseur en premier ressort de ces mêmes institutions qui lui reprochent aujourd’hui son endettement et lui appliquent en conséquence des taux usuraires.
Comment en est-on arrivé là ?
En 1973, après de 30 années de création monétaire, l'économie française était remise à flot. Dans l’esprit de l’ancien président de la République, Georges Pompidou, et des hauts fonctionnaires qui l’entouraient à l’époque, la France était désormais reconstruite suite aux destructions de la deuxième guerre mondiale. Il semblait donc plus aussi nécessaire de laisser persister des mécanismes qui s'étaient avérés bénéfiques pour le financement de dépenses d’investissements structurels. D'autant plus que ces mécanismes de création monétaire "facile" avaient été souvent utilisés pour financer le fonctionnement courant de l'Etat.
Il s’agissait avant tout d'instituer un garde-fou afin de préserver le pays de l’inflation et des dévaluations de la monnaie. Il apparut souhaitable à la fois d'encadrer les dérives potentielles de l'Etat et de sortir d'une ère d'économie administrée en établissant un autre système de financement reposant uniquement sur la volonté des gouvernements de s'imposer une discipline budgétaire.
Mais le problème, c’est que ces bonnes intentions finirent par faire le jeu du monde de la finance qui a vite vu l’intérêt qu’il pouvait retirer d’un système par lequel l’État devait obligatoirement passer pour emprunter. De ce point de vue, la loi de 1973 fut également le fruit d'un habile lobbying bancaire visant à neutraliser tous ceux qui étaient favorables au système en vigueur jusqu'ici.
Cette loi, dite aussi « loi Rothschild », du nom de la banque dont était issu le l’ancien président de la République, a été ensuite étendue et confortée au niveau de l’Union européenne par les traités de Maastricht (article 104) et Lisbonne (article 123) que la France doit appliquer à la lettre !
Et aujourd’hui, on le voit en Grèce, en Irlande, au Portugal, en Espagne, en Italie, en France…ce ne sont plus les états qui gouvernent mais la « troïka » (Union européenne, Fond monétaire international et Banque centrale européenne) qui resserre toujours davantage son emprise financière sur les pays, notamment du Sud de l’Europe.
Des chiffres qui donnent le tournis
Au final, comme on le sait, la loi de 1973 n’a pas empêché l’État de s’endetter et contrairement à ce qu’escomptaient ses initiateurs, l’endettement public s’est poursuivi. Circonstance aggravante, il a été contracté auprès de créanciers financiers privés pratiquant des rentes sur la dette, tant et si bien que l’État est progressivement devenu l’otage d’un système financier privé.
Si les taux d’intérêt ont fortement diminué ces deux dernières années, s’établissant à moins de 1%, ils ont été très élevés par le passé. Dans les années 2000, le taux d’intérêt à 10 ans était de 3,9%, dans les années 90 de 6,3%, dans les années 80, de 11,9% !
En 1978, la dette publique représentait 72,8 milliards d’euros et 21,2% du PIB.
En 1988, 302,8 milliards d’euros et 33,3% du PIB.
En 1998, 787,4 milliards d’euros et 59,6% du PIB.
En 2005, elle représentait 1147,6 milliards d’euros et 66,8% du PIB. La charge de la dette (paiement des intérêts seuls) se montait à 47,4 milliards d'euros, soit la presque totalité de l'impôt sur le revenu payé par les Français. Cette charge était le deuxième poste budgétaire de l'État français, après celui de l'Éducation nationale et avant celui de la Défense.
En 2007, la dette publique atteignait 1211,6 milliards d'euros et 64,2 % du PIB. La charge des intérêts se montait à plus de 50 milliards d'euros, soit l'équivalent du déficit public.
Fin 2013, la dette publique, « au sens de Maastricht » estimée par l'Insee, a été évaluée à 1 925,3 milliards d'euros, soit 93,5 % du PIB.
Elle a dépassé officiellement les 2 000 milliards au deuxième trimestre 2014.
Un calcul précis révèle en outre que de 1980 à 2008, la dette a augmenté de 1088 milliards d’euros, les intérêts payés se montant à 1306 milliards d’euros ! Sans les intérêts encaissés par les financiers privés, la dette publique française se serait élevée, fin 2008, à 21,4 milliards d’euros au lieu de 1327,1 milliards d’euros !
Mais le plus dramatique, c’est qu’on continue à pérorer sans fin sur les plateaux de télévisions, à la radio et dans les colonnes de la presse sur « l’insupportable fardeau de la dette », « la France en faillite », « les nécessaires sacrifices à faire », « la nécessité de ne pas vivre au-dessus de nos moyens » etc. Les « éminents journalistes » que sont les Apathie, Barbier, Calvi, Demorand, Joffrin, Lenglet, Pernaut, Pujadas, trahissent en fait chaque jour leur mission d’informer en occultant systématiquement le problème de la loi de 1973 au regard du niveau de l’endettement public…
Et c’est ainsi que s’imposent dans l’opinion les apparentes évidences biaisées qui confortent l'idée que l’austérité est inéluctable.
Aujourd'hui, cette escroquerie de la dette publique signe la mort de la démocratie politique car malheureusement les grands partis de gouvernement, UMP, PS et leurs alliés respectifs de droite ou de gauche, ont renoncé à remettre en cause le système des banques privées pour financer l’endettement des états…
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