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219 – limites de l’esprit scientifique

Publié le 19 décembre 2014 par Jeanjacques

Une des plus grandes naïvetés de notre époque est de croire que la science est scientifique - ou du moins la physique que nous connaissons mieux - Dans un monde sans référent ultime pour certifier la vérité, la science est devenu le domaine du certain puisque l'expérimentation et la mathématique apparaissent comme des modes de preuve incontestables : nous ne croyons plus en Dieu mais en la science. Cette assurance de posséder les instruments de la vérité permet à beaucoup de rejeter la métaphysique dans la géhenne du non-sens, du verbiage oiseux, de l'opinion aux multiples facettes. Avec la science nous avons les deux pieds solidement arrimés sur terre, la dure l'épreuve de l'expérimentation nous fournissant les certitudes désirées, la logique sans patrie de la mathématique devant convaincre le plus récalcitrant. Et, raffinement épistémologique ultime, on introduit un doute méthodologique compensatoire et marginal alors même que l'essentiel du dogme demeure inébranlé.

Qu'en est-il de ces deux grands piliers de la vérité scientifiques que sont l'expérimentation et l'usage des mathématiques ? L'expérience est censée valider une hypothèse, mais tout va dépendre de l'interprétation des résultats. Ainsi en est-il du boson de Higgs devant conforter le modèle standard. Ce qui est en jeu, c'est le mode d'acquisition de la masse par une particule. La découverte effective de ce boson valide cette hypothèse alors même que nous pouvons douter que la masse est acquise par ce mode-là. Le lien entre boson de Higgs et le mode d'émergence de la masse était posé a priori dans l'hypothèse et nous devons nécessairement interpréter les résultats dans le sens de cette hypothèse elle-même indémontrée.

Il en va de même en astrophysique où les observations s'interprètent à partir d'un cadre théorique préexistant. Ainsi le redshift des galaxies lointaines s'analyse comme mesurant la vitesse de fuite des galaxies dans un univers en expansion issu du big-bang. Mais à partir d'une autre théorie, nous pouvons comprendre tout autrement ce redshift, comme par étant exemple le résultat d'un " freinage " des photons dû aux propriétés spécifiques de l'espace. Pareillement lorsqu'on observe des planètes évoluant dans le disque de poussière environnant une étoile : rien ne prouve que la formation de ces astres se soit effectuée à l'aide des débris restants de l'étoile centrale.

Les mathématiques, quant à elles, peuvent être mises au service de n'importe quelle hypothèse ou modèle. Ce qui importe, c'est la cohérence et plausibilité de l'hypothèse rationnelle qui précède sa formulation mathématique et l'interprétation des résultats d'autre part. Une équation en elle-même ne veut rien dire sinon de mettre en relation des valeurs numériques. L'essentiel, c'est leur traduction en raison, l'explication des phénomènes qu'elles mesurent et relient. La mathématique n'est pas un langage " en soi ", refermée sur lui-même sans possibilité d'être traduit en concepts rationnels permettant l'élaboration de lois et principes.

En définitive, s'il apparait certain que les exigences de " l'esprit scientifique " peuvent nous prémunir contre nombre de dérives de la raison, il n'en demeure pas moins que nous devons demeurer vigilants contre une trop grande idolâtrie des vertus de l'approche scientifique. Dogmatisme, intolérance, sectarisme ont trop souvent cours chez certains de ceux qui prétendent posséder enfin une méthode infaillible d'accès à la vérité.


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