Magazine Journal intime

Recherche génétique sur le SED!

Par Anniedanielle

Il y a bientôt 2 ans, quand j’ai rencontré mon généticien pour la première fois, il m’a demandé si j’accepterais de participer à une recherche génétique sur le syndrome d’Ehlers-Danlos, et a m’a fait remplir une feuille à cet effet… quand j’ai eu ma première prise de sang pour déterminer si j’avais des modifications aux 2 gènes liées au type classique, on m’a aussi pris du sang pour ce projet de séquençage de l’exome. Il m’a expliqué que les fonds n’étaient pas encore débloqués, mais que ça semblait vouloir se produire bientôt…

Quelques semaines plus tard, à l’automne 2013, un ami à moi participait aux 24h de vélo de Tremblant, une activité de levée de fonds au profit, entre autres, de la fondation du Grand Défi Pierre Lavoie… fondation qui a 2 objectifs : faire bouger les enfants du Québec, et la recherche médicale sur les maladies orphelines!
J’ai fait un petit don à la cause, pour encourager mon ami… surtout parce que je savais que la cause était aussi un peu la mienne! Je le lui avais dit, d’ailleurs. Je me souviens lui avoir écrit qu’en fait, c’était LUI, qui m’aidait.

C’était prophétique : le mois suivant, la fondation annonçait les projets de recherches récipiendaires de bourses pour 2014… et un de ceux-là était le projet de séquençage de l’exome pour tenter de découvrir le gène du syndrome d’Ehlers-Danlos de type hypermobile!

À mon rendez-vous suivant avec le généticien, nous en avons discuté un peu, surtout qu’après avoir fait un 2e test génétique, pour voir si j’avais la modification du gène de la ténascine-X… le séquençage était ma dernière option pour avoir une réponse claire sur mon type de SED. Le médecin m’avait alors dit que, maintenant que le projet allait de l’avant, ça devrait se faire à l’intérieur de 2 ans. Plus rapidement que je le croyais!

Gail, du Regroupement québécois des maladies orphelines, m’a aussi parlé du projet de recherche de son côté, et s’est assurée que j’y sois inscrite.

Au début de l’automne on m’a enfin appelé, et le 4 novembre j’avais rendez-vous à l’hôpital Ste-Justine, où je travaillais au début des années 2000… jusqu’à ce que je sois trop malade pour travailler.

J’ai rencontré un généticien, une infirmière et une étudiante en médecine, qui était là pour en apprendre plus sur les maladies rares dans le cadre de ses études. J’étais heureuse de pouvoir lui montrer que tous les patients ne se ressemblent pas.

L’étudiante en médecine m’a tout d’abord accueilli, expliqué en gros ce qu’était le projet.
Ayant participé à un groupe de discussion sur l’éthique de projets similaires l’hiver dernier, j’en savais déjà beaucoup. Nous avions dû nous pencher sur des questions comme “si dans un séquençage, les chercheurs découvrent qu’un participant a un risque de développer plus tard une maladie pour lequel il n’y a aucun traitement, aucune prévention possible, devrait-on lui dire? Ou juste l’indiquer au dossier pour quand il aura des problèmes? Ou garder cela secret?” etc. Autrement dit… doit-on tout dire, ou juste si ça peut changer quelque chose? …et autres questions éthiques du même genre.
Il y a eu des groupes de discussions avec des personnes atteints de maladies rares et chroniques comme moi, d’autres avec des gens en pleine santé… avec des médecins aussi bien sûr. Je ne connais pas les conclusions.

Elle m’a aussi posé quelques questions sur le SED et m’a examiné. J’ai eu droit au “ah, mais vous n’êtes pas si flexible!” Et “mais votre peau n’est pas vraiment veloutée comme on décrit”. Et autres impressions qui résument le syndrome à quelques traits, sans réaliser qu’il y a divers niveaux et que hypermobilité n’est pas nécessairement une flexibilité, d’où le gros problème du test de Beighton, qui ne regarde que 4 articulations (genoux, pouces, coudes et hanches) et dans une seule direction. Je réponds au critère SED selon le score Beighton… mais beaucoup moins que d’autres. Cependant j’ai une grande hyperMOBILITÉ, alors que je ne suis pas si flexible, comme j’en ai déjà parlé. J’espère qu’elle aura compris cela, au fil de son stage.

Puis l’infirmière est venue me porter le document expliquant la recherche en détail, que je devais bien lire d’un bout à l’autre. Elle est sortie du local pour que je le liste en paix, sans pression ni influence.
En voyant la première page, j’ai eu une surprise : parmi les co-chercheurs, nuls autres que mon généticien et Gail, du RQMO!

Et puis, moment vraiment émouvant pour moi… il était indiqué que la recherche était financée par le don de la fondation Pierre Lavoie. Le geste de mon ami, mon petit don… j’en voyais le résultat concret.
J’en ai eu les larmes aux yeux.
J’avais fait le don, d’abord pour encourager mon ami, puis pour aider d’autres personnes comme moi… un peu dans l’espoir qu’un jour, cette fondation aide le syndrome d’Ehlers-Danlos. Mais JAMAIS je n’aurais pensé que mon don, cette année-là, m’aide moi directement!
Je constatais la chance que j’avais…
Aussi, quand j’ai obtenu mon diagnostic et qu’on me demandais pourquoi j’y tenais tant, puisqu’il n’y avait pas de traitement… ou pourquoi maintenant je tenais à savoir quel type de SED j’ai… je répondais qu’une des raisons était de pouvoir participer à des recherches. Et ça y était!

Puis l’infirmière est revenue, m’a demandé si j’avais des questions, objections, etc.
J’ai demandé ce qui se produirait si on me découvrait d’autres problèmes suite aux tests… vu que c’est ce dont on avait discuté l’hiver dernier! Et moi, mon opinion, c’est que même s’il n’y a rien à faire, je veux savoir. C’était l’opinion générale… nous avons tous passé trop de temps à vivre avec des symptômes qu’on ne peut pas expliquer, à se croire fous, déprimés, et quoi encore… je ne veux jamais revivre une telle chose si c’est possible de l’éviter. Et si c’est possible de prendre des mesures pour ajuster ma vie en conséquence.
La réponse qu’on m’a donné, c’est que ça dépend :

Premièrement, il n’est pas assuré qu’on teste mon sang.
Vu le budget limité, seulement une partie de tous les participants seront testés, selon la sévérité de leurs symptômes (et selon qu’ils répondent le mieux aux critères du type hypermobile, j’imagine, vu que c’est le type qu’ils tentent d’identifier).
Si par la suite il reste des sous… alors ils vont en tester plus.
Il est donc possible que je ne sois pas dans la cohorte testée…

Si je suis testée… la façon dont la recherche fonctionne, c’est qu’ils vont faire une espèce de carte de l’exome de l’ADN. L’exome, c’est la partie de l’ADN qui peut être encodé sous forme de protéines; c’est aussi l’endroit d’où viennent la plupart des mutations génétiques liées aux maladies. (oui bon, j’ai vulgarisé, là, l’important c’est de savoir que c’est seulement 1% à 1.5% de tous nos gènes, mais la partie où une mutation a le plus de conséquences…). Cependant, les chercheurs vont s’en tenir à la partie de la séquence où on sait qu’il y a les atteintes au collagène, parce que c’est là que se trouve le problème du SED.
S’ils s’aperçoivent d’une anomalie frappante ailleurs “par hasard”, évidemment ils vont vérifier… de même que s’ils ne trouvent rien, ils vont étendre la “région de la carte” où ils cherchent.
Mais on s’entend qu’ils ne vont pas découvrir un truc complètement non-relié, à l’autre bout de mon exome.
L’ensemble de l’exome sera testé… mais l’ensemble ne sera pas analysé.

La façon dont ça va fonctionner : ils vont tenter de trouver des anomalies dans chacun des exomes.
Puis ils vont comparer avec celui des autres participants, et voir s’il y a des mutations aux mêmes endroits.
S’ils trouvent de tels recoupements, ils vont alors possiblement étendre le projet et tester plus de personnes atteintes pour confirmer le résultat.

Cela risque de prendre plusieurs années.

Le généticien est venu nous rejoindre, m’a posé plusieurs questions sur mes symptômes, mon historique… m’a réexpliqué le déroulement du projet de recherche.
Je lui ai donné une petite carte de ce blogue. Il était très impressionné. Il était curieux de savoir combien de personnes l’avaient consulté! Il m’a demandé une 2e carte afin d’en mettre une dans mon dossier, et a conservé la 2e. Je lui ai demandé si je pouvais vous informer au sujet de la recherche dans ce blogue ou si c’était confidentiel, et il m’a donné la permission.

Il m’a remis un long formulaire à remplir à la maison, à poster une fois rempli.
Puis il m’a donné sa carte afin que je puisse le contacter, n’importe quand, si j’avais des questions ou des inquiétudes. Je peux même le contacter dans quelques mois, ou dans un an, afin de demander des nouvelles de la recherche! Il ne pourrait évidemment pas me dévoiler de détails, mais je pourrais savoir si tout va bien, si ça avance, etc.

Je vais définitivement lui écrire afin de lui donner les statistiques qu’il demandait, à propos du lectorat, et l’aviser (s’il ne lit pas déjà le blogue!) que j’ai enfin publié cet article sur le projet de recherche!

Ensuite l’infirmière a fait les prises de sang (en m’aidant à prendre la photo, posant l’aiguille et le flacon!), et ce fut terminé.

prise sang 1

Je pensais aller saluer mes anciens collègues, juste à côté du département de génétique… mais j’étais tombée sur une ancienne collègue juste avant mon rendez-vous. Une femme avec qui j’ai beaucoup travaillé, avec qui je m’entendais bien… et qui ne m’a même pas reconnu. Et pourtant, j’ai bien peu changé.
Alors que je me souviens de toutes ces personnes et que je pensais retrouver des collègues qui seraient heureux de me revoir… j’ai réalisé que ce serait finalement bien décevant, voire désagréable… car eux m’ont oublié.
J’ai donc quitté l’hôpital sans faire de crochet par mon ancien département.

Dès mon arrivée à la maison, je me suis empressée d’aviser mon ami, celui qui avait participé à la levée de fonds, afin de lui dire que son geste avait eu une répercussion bien concrète, déjà. Qu’il m’avait effectivement aidée, moi, et toutes les personnes atteintes du syndrome d’Ehlers-Danlos. Il était très ému.

Ça m’a pris quelques jours remplir le long questionnaire. On y demandait une historique familiale détaillée. Je tiens d’ailleurs à remercier tous les membres de ma famille qui ont pris le temps de répondre à ma question. Il semble que je sois la seule de ma famille, à part ma mère, à avoir des symptômes. Ou alors leurs symptômes sont si minimes qu’ils n’y pensent même pas.
On me demandait aussi ma propre historique médicale, évidemment. Ainsi que des questions sur l’impact de la maladie. Gail, du RQMO, m’avait dit qu’une recherche sur l’impact social et psychologique du SED était greffée à la recherche génétique.
Je tenais à bien remplir le questionnaire, ne pas y aller rapidement par fatigue, ne pas faire d’erreurs. C’était vraiment important. C’est d’ailleurs pourquoi j’ai pris le temps de poser la question aux membres de ma famille plutôt que d’y aller avec des “je ne sais pas trop” ou “je pense que…”.

Ma mère m’a fait penser de prendre une copie du formulaire… ce travail n’aura pas été perdu, il pourrait m’être utile plus tard!

Maintenant, ne reste qu’à attendre!

Écrit en écoutant Can’t hold us, repris par Pentatonix (que je préfère à l’original!)

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