Une tribune de Serge Federbusch pour Atlantico.
Cherchant, comme à son habitude, à tirer parti des situations en minimisant son exposition personnelle, François Hollande a sur-joué depuis mercredi un air grave et contrit de circonstances tout en escamotant les sujets délicats, notamment le débat sur la présence du Front national dans une manifestation. Il a laissé Dray, Valls, Cambadélis & Co s'empêtrer dans des querelles d'interprétation du politiquement correct.
Résultat : le soupçon de récupération politicienne a commencé à enfler sur les réseaux sociaux. «La France a tenu bon» a dit Hollande dans son allocution, en pensant tellement fortement à lui que cela s’entendait. Les responsabilités réelles sont solubles dans l'union nationale. Quant aux conditions rocambolesques de la cavale des frères Kouachi et au sort des otages tués, ils furent à peine évoqués ... Mais cela viendra vite quand le climat de concorde construit par les médias se dissipera.
De même, l’obstination du discours présidentiel à dresser une séparation étanche entre un islam bien sous tous rapports et le terrorisme relève d’une langue de bois désormais usée. Le Coran, comme la plupart des textes dits sacrés, est plein de contradictions et d’interprétation divergentes des disciples. Le seul sort promis aux apostats, voués à la mort selon certaines traditions ou seulement méprisés par d’autres, démontre que la violence y est parfois légitimée. Il faudra bien qu’un jour la question soit posée plutôt que systématiquement évacuée dans la logorrhée présidentielle.
Les rassemblements de soutien à Charlie Hebdo, où l'on a vu infiniment peu de femmes voilées ou d'hommes portant tunique, soit dit en passant, servent d’abord à Hollande à tenter de recoller les morceaux avec une gauche de la gauche pour qui le journal satirique était encore un brevet de radicalité. Sûr qu'il y aura beaucoup de bobos pour défiler dimanche, comme on a vu Hidalgo, Delanoë et Nathalie Kosciusko-Morizet fraterniser sur la place de la République des bons sentiments.
Hélas pour Hollande, Besancenot et Mélenchon font déjà défaut. D'autres suivront et, si elle était moins prompte à tomber dans les panneaux politiciens, la droite le renverrait à ses calculs sans craindre les foudres de la presse socialisante et subventionnée ou regretter de ne pas poser avec Cameron et Merkel sur les photographies. Bah, pour Hollande cela suffira peut-être à limiter la casse aux prochaines cantonales ...