Hier j’ai donné un cours avec mon amie Huang Bei à l’université de Fudan sur la chanson française. Certains des élèves étudiaient la littérature française, d’autres se préparaient à un programme d’échange avec l’ENS à Paris.
Ce fut un grand plaisir de partager ces airs et ces textes souvent si beaux ! Au programme la renaissance; le XVIIIe, Piaf Vian Bourvil Brel Brassens Barbara Ferré Ferrer Renaud et je dois en oublier.
Les questions furent très intéressantes :
- Une étudiante trouve que plusieurs chansons sont très bien construites avec une intensité dramatique qui va croissante. Elle demande si c’est un trait de la chanson française ?
Surpris par sa question j’acquiesce et prends conscience du lien entre théâtre et chanson. Brel introduit une rupture majeure au dernier couplet de “ces gens là” (dans le texte comme dans la musique). En chantant “La solitude” Barbara fait un véritable coup de théâtre avec les quatre derniers mots de la chanson. Le “monsieur le commissaire” du dernier couplet des “bourgeois” créent un effet énorme : on comprend soudain que Brel est en train de porter plainte au commissariat. Brassens n’a pas son pareil pour raconter des histoires d’une manière tout à fait captivante (le Gorille ; Brave Margot…)
- Un jeune homme demande si toutes les chansons françaises sont un peu molles et sentimentales ? Si d’autres n’ont pas un peu d’énergie…
Je lui passe la marseillaise ; il est rassuré.
- Une étudiante demande si Piaf roulait autant les R pour se donner un style ou si elle parlait vraiment comme cela ?
Je lui réponds que Piaf avait l’accent ti’parisien, qu’on roulait généralement plus les R à l’époque qu’aujourd’hui, mais qu’elle forçait sans doute un peu le trait pour se donner un style.
—————————————————————————————————————————–
Nous avons repris avec Bei une partie des textes déjà traduits il y a quelques années (et postés sur ce blog) ; et nous avons traduit quelques nouvelles chansons que voici
Belle qui tiens ma vie : composée par Thoinot Arbeau, chanoine de Langres, au XVIe S.
Belle qui tiens ma vie
Captive dans tes yeusse,
Qui m’as l’âme ravie
D’un sourire gracieusse,
Viens tôt me secourir
Ou me faudra mourir.(bis)
Pourquoi fuis-tu mignarde
Si je suis près de touai,
Quand tes yeux je regarde
Je me perds dedans mouai,
Car tes perfections
Changent mes actions.(bis)
给我生命的美人 你的眼睛多迷人
摄取了我的灵魂 笑意盈盈的你
快来救我吧 不然我会死去
为什么逃逸,美人 如果我在你身边
凝视你的双眸 我会迷失在里头
因你的完美 改变我的行为
Le cœur bien au chaud
Les yeux dans la bière
Chez la grosse Adrienne de Montalant
Avec l´ami Jojo
Et avec l´ami Pierre
On allait boire nos vingt ans
Jojo se prenait pour Voltaire
Et Pierre pour Casanova
Et moi, moi qui étais le plus fier
Moi, moi, je me prenais pour moi
Et quand vers minuit passaient les notaires
Qui sortaient de l´hôtel des “Trois Faisans”
On leur montrait notre cul et nos bonnes manières
En leur chantant :Les bourgeois, c´est comme les cochons
Plus ça devient vieux, plus ça devient bête
Les bourgeois, c´est comme les cochons
Plus ça devient vieux, plus ça devient…Le cœur bien au chaud
Les yeux dans la bière
Chez la grosse Adrienne de Montalant
Avec l´ami Jojo
Et avec l´ami Pierre
On allait brûler nos vingt ans
Voltaire dansait comme un vicaire
Et Casanova n´osait pas
Et moi, moi qui restais le plus fier
Moi j´étais presque aussi saoul que moi
Et quand vers minuit passaient les notaires
Qui sortaient de l´hôtel des “Trois Faisans”
On leur montrait notre cul et nos bonnes manières
En leur chantant :Les bourgeois, c´est comme les cochons
Plus ça devient vieux, plus ça devient bête
Les bourgeois, c´est comme les cochons
Plus ça devient vieux, plus ça devient…
Le cœur au repos
Les yeux bien sur Terre
Au bar de l´hôtel des “Trois Faisans”
Avec maître Jojo
Et avec maître Pierre
Entre notaires on passe le temps
Jojo parle de Voltaire
Et Pierre de Casanova
Et moi, moi qui suis resté l´plus fier
Moi, moi je parle encore de moi
Et c´est en sortant vers minuit, Monsieur le Commissaire
Que tous les soirs, de chez la Montalant
De jeunes peigne-culs nous montrent leur derrière
En nous chantant :
Les bourgeois, c´est comme les cochons
Plus ça devient vieux, plus ça devient bête
Les bourgeois, c´est comme les cochons
Plus ça devient vieux, plus ça devient…
和朋友球球在一起
还有朋友皮埃尔
一起为我们的20岁痛饮
球球自以为是伏尔泰
皮埃尔自比卡萨诺瓦
我呢,我最骄傲
我,我,我就拿自己当自己
当午夜时分,公证员们
走出“三雉鸟”俱乐部,经过那里
我们向他们展示我们的屁股与风度
对着他们唱:
“布尔乔亚就像猪 越是老就越是蠢
布尔乔亚就像猪 越是老就越是……”
心头热乎乎的 眼睛在啤酒里
在胖胖的阿德里安家
和朋友球球在一起
还有朋友皮埃尔
我们要燃烧我们的20岁
伏尔泰跳舞跳得像个神父
卡萨诺瓦不太敢乱来
我呢,我最骄傲
我差不多醉得跟我自己一样
当午夜时分,公证员们
走出大楼,经过那里
我们向他们展示我们的屁股与风度
对着他们唱:
“布尔乔亚就像猪 越是老就越是蠢
布尔乔亚就像猪 越是老就越是……”
心不再激荡
眼睛盯着地面
在“三雉鸟”俱乐部的酒吧
和公证员先生球球
和公证员先生皮埃尔
我们一起消磨时光
球球谈起伏尔泰
皮埃尔讲起卡萨诺瓦
我呢,我还是最骄傲
我只说我自己
当午夜时分走出大楼,警察先生
每天夜里当我们经过阿德里安咖啡馆
总有可恶的年轻人向我们翘起屁股
对着我们唱:
“布尔乔亚就像猪 越是老就越是蠢
布尔乔亚就像猪 越是老就越是……”
Brassens : La non-demande en mariage
我不向你求婚
Ma mie, de grâce, ne mettons
Pas sous la gorge à Cupidon
Sa propre flèche
Tant d’amoureux l’ont essayé
Qui, de leur bonheur, ont payé
Ce sacrilège…
J’ai l’honneur de ne pas te demander ta main
Ne gravons pas nos noms au bas d’un parchemin
Laissons le champs libre à l’oiseau
Nous seront tous les deux priso-
nniers sur parole
Au diable les maîtresses queux
Qui attachent les cœurs aux queues
Des casseroles!
J’ai l’honneur de ne pas te demander ta main
Ne gravons pas nos noms au bas d’un parchemin
Vénus se fait vielle souvent
Elle perd son latin devant
La lèchefrite
A aucun prix, moi je ne veux
Effeuiller dans le pot-au-feu
La marguerite
J’ai l’honneur de ne pas te demander ta main
Ne gravons pas nos noms au bas d’un parchemin
On leur ôte bien des attraits
En dévoilant trop les secrets
De Mélusine
L’encre des billets doux pâlit
Vite entre les feuillets des li-
vres de cuisine.
J’ai l’honneur de ne pas te demander ta main
Ne gravons pas nos noms au bas d’un parchemin
Il peut sembler de tout repos
De mettre à l’ombre, au fond d’un pot
De confiture
La jolie pomme défendue
Mais elle est cuite, elle a perdu
Son goût “nature”
J’ai l’honneur de ne pas te demander ta main
Ne gravons pas nos noms au bas d’un parchemin
De servante n’ai pas besoin
Et du ménage et de ses soins
Je te dispense
Qu’en éternelle fiancée
A la dame de mes pensées
Toujours je pense
J’ai l’honneur de ne pas te demander ta main
Ne gravons pas nos noms au bas d’un parchemin.亲爱的,求求你,不要
把丘比特的箭
插进他自己的喉咙
那么多的恋人已经试过
他们付出了幸福的代价
为这亵渎神圣的错误
我很荣幸地不向你求婚
不要把我们的名字刻在羊皮纸的下方
留给鸟儿自由的空间
我们会成为诺言的奴隶
见鬼去,家庭主妇们
把心系在油锅的长柄上
我很荣幸地不向你求婚
不要把我们的名字刻在羊皮纸的下方
维纳斯常常变成老太婆
在烤肉器的接油盘前变得笨嘴笨舌
而我,无论如何我不会
在炖锅里一片片地投入
雏菊的花瓣
我很荣幸地不向你求婚
不要把我们的名字刻在羊皮纸的下方
当美人鱼
不再有她的秘密
多少魅力也会随之失去
情书上的墨水
在菜谱的纸页间
淡去了痕迹
我很荣幸地不向你求婚
不要把我们的名字刻在羊皮纸的下方
看起来好像很平静
在影子里,在果酱瓶的底部
放一只美丽的苹果
可是禁果已经煮熟,已经没有
自然的味道
我很荣幸地不向你求婚
不要把我们的名字刻在羊皮纸的下方
我不需要女仆
我不要你操持家务
当我想到你
我的心上人
你是我永远的未婚妻
我很荣幸地不向你求婚
不要把我们的名字刻在羊皮纸的下方
Magnifique premier couplet : les registres de la cuisine et de l’amour se croisent et s’entre-mêlent.
Je n’avais jamais vraiment compris les paroles de cette chansons, et j’ai appris le mot de Queux : cuisinier (signifie aussi pierre à aiguiser)
Douce France 温柔的法国
Il revient à ma mémoire 我的脑海里有时会浮起
Des souvenirs familiers 过去的熟悉记忆
Je revois ma blouse noire 我又看到那件黑色外衣
Lorsque j´étais écolier 那时我是一个小学生
Sur le chemin de l´école 在去学校的小路上
Je chantais à pleine voix 高声地唱着
Des romances sans paroles 无词的小调
Vieilles chansons d´autrefois 过去的歌谣
Douce France 温柔的法国
Cher pays de mon enfance 亲爱的童年国度
Bercée de tendre insouciance 带着甜美的无忧
Je t´ai gardée dans mon cœur! 摇荡在我的心中
Mon village au clocher aux maisons sages 村庄,钟楼,安静的房屋
Où les enfants de mon âge 与我同龄的孩子
Ont partagé mon bonheur 分享着我的幸福
Oui je t´aime 是的,我爱你
Et je te donne ce poème 我把这首诗送给你
Oui je t´aime 是的,我爱你
Dans la joie ou la douleur 在欢乐中在痛苦中
Douce France 温柔的法国
Cher pays de mon enfance 亲爱的童年国度
Bercée de tendre insouciance 带着甜美的无忧
Je t´ai gardée dans mon cœur 摇荡在我的心中
J´ai connu des paysages 我见过另一些风景
Et des soleils merveilleux 和美好的阳光
Au cours de lointains voyages 在遥远的旅途
Tout là-bas sous d´autres cieux 属于别处的天空
Mais combien je leur préfère 而它们哪儿能比上
Mon ciel bleu mon horizon 我的蓝天我的地平线
Ma grande route et ma rivière 我的大路我的河流
Ma prairie et ma maison 我的草地我的房屋
Beaux moments de préparation et de partage.