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En matière de liberté, la peur est bien mauvaise conseillère

Publié le 16 janvier 2015 par Magazinenagg
En matière de liberté, la peur est bien mauvaise conseillère Depuis le 11 septembre 2011, les actes insensés des fondamentalistes islamiques se succèdent : Londres, Madrid, Paris, Moscou, etc. Bien sûr, nous ne devons pas laisser faire, mais nous devons aussi veiller à ne pas laisser la peur nous imposer des politiques liberticides. Le renforcement irréfléchi des pouvoirs de l’État est une solution facile, qui rassure, mais qui recèle des dangers autrement plus néfastes : la perte de notre liberté.
Il est plus que jamais important de se rappeler les paroles que Benjamin Franklin prononça en 1759: « Ceux qui troquent leur liberté en échange d’une sécurité temporaire ne méritent ni la liberté ni la sécurité. » (They that can give up essential liberty to obtain a little temporary safety deserve neither liberty nor safety.) La peur, source de pouvoir
La peur est une émotion causée par un danger réel ou imaginaire. Elle est programmée dans notre code génétique parce qu’essentielle à la survie de l’espèce humaine. Elle nous permet de rapidement identifier les dangers qui menacent notre bien-être et parfois nos vies. Elle nous protège en nous obligeant à évaluer la situation à laquelle nous sommes confrontés et à choisir le meilleur moyen de se protéger. Si nous ignorons la peur, nous nous exposons à des dangers dont les conséquences peuvent être dramatiques.
Les politiciens, mieux que tout autre, comprennent cette caractéristique fondamentale de l’être humain. Ils la cultivent et l’exploitent à satiété. Que ce soit un État impérialiste, comme les États-Unis, ou un État-providence, comme la France ou le Québec, l’un et l’autre exploitent la peur pour dominer leur population. S’il est vrai que les démocraties modernes dépendent de l’opinion publique, il est aussi vrai que celle-ci est largement dictée par la peur.
Machiavel a très bien exprimé ce principe: « Puisque l’amour et la peur peuvent difficilement coexister, si nous devons choisir, il est préférable d’être craint que d’être aimé. » 
Un rappel historique
Les premiers gouvernements se sont imposés par la guerre et la conquête. Les vaincus qui n’avaient pas été exécutés ou vendus comme esclaves devaient payer un tribut aux vainqueurs. Au moindre signe de rébellion, les vainqueurs menaçaient de confisquer les biens des conquis et de les réduire à l’esclavage. Dans ce contexte, le paiement d’un tribut était un moindre mal. Ainsi apparurent les premiers régimes d’impôts.
Ces régimes s’apparentaient plus à l’esclavage qu’à un système de taxe équitable. Le moindre signe de faiblesse de la part des conquérants se soldait par la révolte des conquis. Faute de pouvoir reprendre leur liberté, ils redoublaient d’ingéniosité pour se soustraire aux exactions du gouvernement. Ainsi, le maintien du gouvernement par la force était une entreprise coûteuse qui donnait rarement les résultats escomptés.
Éventuellement, les gouvernements s’allièrent au pouvoir religieux. Les représentants religieux détenaient un pouvoir considérable. De connivence avec les pouvoirs politiques, ils dictaient les comportements acceptables – obéissance et soumission – pour s’assurer une place privilégiée dans l’au-delà. Ainsi, le pouvoir politique menaçait la sécurité et la vie des gens sur terre et le pouvoir religieux menaçait leur bien-être dans l’au-delà. Le cumul de ces pouvoirs constituait une force beaucoup plus considérable que ces mêmes pouvoirs opérant séparément. Ce stratagème est toujours utilisé dans les États islamiques.
Avec le temps et l’éducation des populations, l’utilisation de la peur à des fins politiques s’est raffinée. Les politiciens se sont arrogé le rôle de protecteur du citoyen. Le mandat du gouvernement devient celui de protéger la population contre les dangers réels et imaginaires. Celui-ci n’a plus le choix: il est protégé de gré ou de force et contre lui-même si nécessaire.
Gestion de la peur
L’utilisation de la peur comme moyen de contrôle des populations doit s’adapter aux réalités changeantes des époques et des sociétés.
L’effet de la peur s’amenuise avec le temps. À moins que les catastrophes annoncées se matérialisent, le doute s’installe rapidement. Le gouvernement doit posséder un inventaire toujours renouvelé de dangers pouvant raviver la peur dans la population. Le choix est illimité.
Les médias véhiculent avec enthousiasme la peur. Elle se prête bien aux grands titres spectaculaires qui moussent les ventes. Le leitmotiv des journaux et des bulletins de nouvelles semble être: à chaque jour sa peur. La population est maintenue dans un état constant d’appréhension. Cette stratégie détourne l'attention et camoufle les vrais problèmes. Ainsi, il est plus facile de faire accepter de nouvelles taxes, lois et réglementations et de faire oublier les bévues. 
L’environnement
La guerre froide (1945-1990) est un excellent exemple de l’utilisation de la peur pour obtenir le soutien populaire. Si la perception du danger représenté par le bloc communiste s’amenuisait dans l’opinion publique, les bénéficiaires du complexe politico-militaro-industriel américain identifiaient un nouveau danger. On nous informait que les Russes possédaient un nouvel avion de chasse, un nouveau sous-marin ou une nouvelle génération de satellites et le tour était joué. Comme par hasard, les budgets militaires augmentaient en conséquence.
 À la fin de l’ère communiste, il y eut une période de flottement. Les populations exigeaient que les gouvernements réduisent les dépenses et les budgets militaires. Le désarroi des politiciens était évident. Il devenait urgent de trouver une nouvelle source de danger pour éviter une perte graduelle du pouvoir politique.
C’est au cours de cette période que les gouvernements, avec l’aide de l’ONU, déclarent l’environnement la source de tous les dangers du 21e siècle. La Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC), ratifiée par 189 pays, entre en vigueur le 21 mars 1994. Le protocole de Kyoto, sa suite logique, est signé par 156 pays et entre en vigueur en février 2005. Les écologistes, marchands de peur par excellence, militent ardemment en vue de la signature d’une nouvelle convention à Paris en décembre prochain.
L’environnement est un domaine idéal pour perpétuer la stratégie de gouvernance par la peur. Il y a toujours eu des catastrophes naturelles et il y en aura toujours.
Les dangers environnementaux sont réels, frappent sans avertir et sont présents partout sur la planète. Chaque ouragan, tsunami, inondation, sécheresse donne aux politiciens, secondés dans cette tâche par les écologistes, l’occasion de rappeler à la population que le gouvernement existe pour les protéger et les assister dans le besoin. Quoi de mieux pour maintenir la population dans un état constant d’appréhension du danger et de bienveillance envers le gouvernement.
Le terrorisme
De tout temps, la sécurité publique représente la forme la plus efficace d’utilisation de la peur pour gouverner. La guerre est la menace ultime en matière de sécurité publique.
En temps de guerre, le pouvoir de l’appareil gouvernemental est illimité. Les politiciens, bureaucrates et entrepreneurs militaro-industriels comprennent d’instinct qu’ils ont la chance de vivre une période exceptionnelle. Les opportunités d’enrichissement personnel ne sont limitées que par le manque d’imagination des individus qui exercent le pouvoir. Les politiciens obtiennent les augmentations de budget tant attendues. De nouveaux organismes nécessitant des milliers de fonctionnaires sont créés instantanément. Les demandes des militaires sont approuvées sans discussion. Les contrats sont accordés sans soumission.
Ceux qui oseront contester le bien-fondé de certaines décisions seront accusés d’antipatriotisme, ou pire, de traîtres. Ils seront harcelés par les services de sécurité et abandonnés par leurs amis, voisins et confrères. Les autres qui songeaient à dénoncer les abus et les fraudes y penseront à deux fois. Les événements tragiques du 11 septembre 2001, et ceux qui ont suivi depuis, ont fourni aux politiciens du monde entier une occasion inespérée d’assurer la pérennité du mode de gouvernance par la peur.
Le terrorisme est une source inépuisable de dangers potentiels. Les actes terroristes sont spectaculaires et créent un fort sentiment d’insécurité dans les populations. La plupart des gens sont convaincus que les gouvernements sont les seuls organismes susceptibles de protéger les populations et de prévenir les actes terroristes. Depuis 2001, la guerre au terrorisme est devenue le véhicule privilégié pour limiter les libertés individuelles et maintenir les populations en état de soumission.
Conclusion
Les politiciens ont toujours su que la peur est le meilleur moyen de convaincre les populations réticentes à accorder leur soutien inconditionnel au gouvernement. Que ce soit pour détourner l’attention de la population, pour justifier plus de taxes ou pour faire accepter une législation impopulaire, les politiciens peuvent toujours compter sur un événement dramatique réel ou annoncé.
Graduellement, en maintenant les populations dans un état d’appréhension constant, l'État gruge les libertés individuelles au profit des politiciens et de la bureaucratie gouvernementale.  Le processus s’est grandement accéléré depuis les attentats du 11 septembre 2001. Les gens acceptent à peu près tout ce qui leur est imposé, incluant la perte graduelle de leur liberté. La liberté que nous connaissons aujourd’hui a coûté la vie à des centaines  de milliers de nos ancêtres et concitoyens auxquels il faut maintenant ajouter les héros de Charlie Hebdo. Il ne faudrait surtout pas qu’ils aient sacrifié leur vie en vain.

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