Nino Gvetadze / Photo Allard Willemse
Kevin John Edusei, le directeur musical du Münchner Symphoniker, propose cette semaine un programme en forme de parcours musical, dont la sélection si pertinente témoigne d´une sensibilité extrêmement fine et d´une grande intelligence symphonique. On ne peut encore une fois que se féliciter du choix si heureux du nouveau chef principal de l`Orchestre symphonique munichois.Kevin John Edusei a organisé sa soirée autour d´un thème de Bach. Il ouvre le concert avec la sixième des 6 Fugues sur le nom De B.A.C.H de Robert Schumann, un jeu alphabético-musical qu´il prend soin de nous expliquer durant l´introduction qui précède le concert. On sait que des compositeurs ont utilisé la notation alphabétique pour constituer des thèmes musicaux à partir de mots, et particulièrement à partir de noms propres. Ainsi Bach en fit-il usage pour signer des quatre notes de son nom (-B.A.C.H. selon la désignation allemande, le B y correspondant au Si bémol, le A au La, le C au Do et le H au Si bécarre- ) la dernière fugue, inachevée, de l´Art de la fugue. Par la suite, des compositeurs, dont Schumann, utilisèrent ce même jeu pour rendre hommage au Maître de Leipzig. Schumann ouvre ainsi une tradition que reprendront Liszt, Richard Strauss et Reger, ou encore Schönberg, Webern et Honegger. Le Maestro Edusei et son orchestre nous offrent cette oeuvre étrange et envoûtante qui constitue progressivement une peinture sonore arachnéenne d´une exquise poésie.
A la fugue de Schumann succède le clou de la soirée, le quatrième concerto de Beethoven pour piano et orchestre magistralement exécuté par la pianiste géorgienne Nino Gvetadze, qui aborde avec une autorité et une virtuosité confondantes cette oeuvre si exigeante du répertoire pianistique, qu´elle exécute avec une rigueur mise au service d´une interprétation sensible et profonde. Méditatif et fluide dans le premier mouvement, plus sombre et orphique dans l´andante, glorieux, joyeux et superbe de virtuosité dans le rondo, en parfait dialogue avec l´orchestre, le jeu de Nino Gvetadze séduit et enchante.
Kevin John Edusei ouvre la deuxième partie avec la Fugue à 6 voix de l´Offrande musicale de Jean-Sébastien Bach (BWV 1079/2) dans la version pour orchestre retravaillée par Anton Webern, une oeuvre que Bach aurait composée alors qu´il était reçu le 6 mai 1747 par Frédéric II de Prusse à l´occasion d´une visite qu´il rendait à son fils Carl Philipp Emmanuel. Jean-Sébastien Bach aurait alors demandé au Roi de lui soumettre un thème à partir duquel il lui propose d'improviser. Le résultat en est le célèbre Ricercar à 6 voix, qu´il mettra en forme et publiera deux mois après sa visite au Roi, en faisant à nouveau un jeu alphabético-musical puisque Ricercar est l´anagramme de Regis Iussu Cantio Et Reliqua Canonica Arte Resoluta. Le Roi en recevra la partition le 7 juillet.
Retour ensuite à Schumann pour la deuxième symphonie avec ses lumières changeantes, du sombre au plus lumineux, bien rendues par le Münchner Symphoniker, notamment pour la puissance du contrepoint des bois et des cuivres dans l´univers sonore des cordes.
Un enchantement pour l´oreille et l´intellect, que l´on pourra encore apprécier dans l´après-midi de ce dimanche 1er février au Prinzregententheater. Quelques places restantes dans plusieurs catégories de prix.
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