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Le Front de gauche a vécu

Publié le 04 février 2015 par Despasperdus

Le moins que l'on puisse dire, au regard de l'élection partielle dans le Doubs, c'est que le Front de gauche ne profite ni de la trahison d'un PS au pouvoir qui a définitivement abandonné la justice sociale, tant il est devenu un pilier du système capitaliste et oligarchique, ni non plus de l'effet Syriza ou Podemos.

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Le FDG n'a plus la dynamique politique et militante qu'il avait à sa création et qui lui avait permis d'émerger comme une force nouvelle, alternative au PS, jusqu'à la présidentielle de 2012. A cela, je vois au moins cinq raisons :

. La stratégie du Front contre Front.

Elle a été hélas plus profitable au FN qu'au FDG. Ce dernier était toujours dans la comparaison, passant auprès d'un corps électoral non politisé pour celui qui veut piquer le leadership de l'autre. Le FDG a peut-être même donné l'image -auprès d'un électorat socialement et politiquement en marge qui subit la relégation sociale depuis au moins la parution de La Misère du monde de Bourdieu - de ne faire que de la politique politicienne à cent lieues des difficultés quotidiennes et des craintes des classes populaires et moyennes. En se focalisant sur le FN, le FDG a brouillé son discours, lequel devait s'en tenir strictement à une critique du capitalisme et de ses dérives, dont l'un des avatars est le FN. Ce faisant, il s'est éloigné d'un électorat qu'il avait commencé à séduire à la présidentielle. Il a même facilité la tâche des éditocrates - dont l'inculture politique et le relativisme historique sont criants - qui parlent indifféremment du FN et du FDG en employant le terme de populistes ou d'extrêmes. Plutôt que de s'adresser aux masses en souffrance sociale, le FDG a donné l'impression d'être obnubilé par le FN...

.Le discours et les pratiques.

Les organisations du Front de gauche, hormis Ensemble dont je ne connais pas le fonctionnement, ont un mode de fonctionnement traditionnel très hiérarchisé et vertical. Si les grandes orientations résultent de décisions collectives, le quotidien se gère par un bureau politique très puissant qui se situe en haut de la pyramide. Finalement, ces forces ont grosso modo le même mode fonctionnement que la Cinquième République qu'ils combattent au nom de la démocratie... Et, que dire alors des synthèses écrites au sommet, après moult négociations entre ses composantes ? Le décalage est frappant. C'est un repoussoir.

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.Les leaders.

Loin de moi de rejeter la responsabilité du surplace du FDG sur tel ou untel. A mon avis, les leaders en place depuis des dizaines d'années dans les médias et à la tête des organisations devraient laisser leurs places respectives et trouver un autre moyen d'être utile à la cause. C'est probablement injuste, mais aux yeux d'un électorat non engagé, ils incarnent eux aussi le système oligarchique de la Cinquième République.

.Les termes du discours.

L'une des causes de la renaissance de l'extrême droite tient à son discours. Le fond idéologique est pourtant le même, sauf qu'elle a substitué l'obsession de la race par celle de la culture pour à nouveau dénoncer comme bouc émissaire telle ou telle supposée communauté du corps social. Elle a également, à l'instar des néo-libéraux, travesti certains mots, et substitué des mots par d'autres mots, moins choquants à première vue, moins datés historiquement mais dont le sens reste identique. Son discours est identique mais renouvelé, terriblement efficace et simpliste. Le FDG n'a pas su tenir un discours renouvelé, cohérent et simple à base de lutte des classes, de dénonciation de la dette, d'écologie et de souveraineté populaire.

.La ligne politique.

Il est évident que les municipales ont été désastreuses pour le FDG. Des forces éparpillées, partant seules à la bataille, ou faisant des alliances avec d'autres forces, pas toujours les mêmes, selon les lieux... Rien de tel pour casser une dynamique et brouiller un discours. La ligne politique est fluctuante, difficile à suivre, et a les apparences de l'opportunisme électoral.

. La coalition.

Bref, la création du FDG a redonné vie à la gauche radicale, l'autre gauche, cette gauche qui ne se reconnaît pas dans le PS, ni dans les forces traditionnelles de l'extrême gauche. Pour autant, on ne peut s'en satisfaire devant la régression sociale en marche et sa conséquence politique, l'extrême droite. La coalition est impuissante. Elle n’apparaît pas crédible pour gouverner, et moins encore pour emporter la majorité des suffrages.

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Je crois que les maux décrits, ci-dessus, tiennent en partie au fait que le FDG n'a pas su se transformer pour devenir un seul et même force politique. Chacune des forces qui le composent, hormis Ensemble peut-être, se sont même engagées dans une sorte de compétition lors des municipales. D'où la désagréable impression du déjà vu avant et ailleurs, l'intérêt des chapelles et des carrières dépassant l'intérêt général de construire une force politique unie et dynamique. L'unité, un temps retrouvé lors des européennes n'a pas pu masquer que le FDG n'est qu'une coalition, un mariage de raison...

QUE FAIRE ?

Le militant qui s'investit beaucoup doit trouver l'analyse amère. Voire même donneuse de leçons, ce qui n'est pas ma démarche. Je l'expose rapidement parce que j'ai aussi milité au FDG et que son état fait mal. De plus, j'ai l'impression de pas être le seul à m'être mis, peu-à-peu, en retrait. Remarquez, nul n'est indispensable...

Je fais ce constat parce qu'il me semble que le FDG n'a pas su réfléchir à ce qu'il voulait devenir, ou n'a pas voulu... Et pourtant, il suffisait de s'inspirer de nos camarades européens.

Syriza - le FDG grec à sa création - a su évoluer, et rapidement pour devenir une force politique unie, crédible pour gouverner. Il a su renouveler ses cadres, concentrer son discours sur le social, l'écologie, la souveraineté populaire et la dette ! Qu'est-ce qui empêche le FDG de s'en inspirer ?

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Podemos aussi, et pourtant, elle n'est partie d'aucune force existante, seulement de mouvements populaires opposés au néolibéralisme. Qu'est-ce qui empêche le FDG d'apprendre de Podemos, de se rapporcher des ZAD, des liex de lutte et d'exclusion, voire même de s'ouvrir à des forces informelles pour renouveler son militantisme, son mode de fonctionnement ?

Alors, on pourra m'objecter par A + B que la situation ailleurs est différente d'ici, il n'empêche que Syriza et Podemos mettent en relief toutes les insuffisances du FDG et la suffisance de certains de ses membres.

Soit le FDG reste tel qu'il est et il est condamné à stagner, à l'instar de Izquierda Unida, le FDG espagnol qui n'a pas su se transformer, soit il fait sa propre révolution... A toi de décider camarade !


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