Parmi les séries que j’avais choisies pour le Challenge Séries 2015, j’ai eu envie de me replonger dans l’une des rares séries Bad Robot que je n’avais pas encore vues, à part quelques épisodes diffusés sur TF1. La série, en effet, faute de succès avait été rapidement déprogrammée. Les amateurs ne furent pas mieux servis en DVD, puisque seule la Saison 1 est disponible, malheureusement. Mais tout d’abord, voyons…
De quoi ça parle ? (le pitch de la série) : Sur un coup de coeur, Felicity Porter a tout quitté pour rejoindre l'université de New York où Ben Covington - pour lequel elle nourrit des sentiments - y poursuit ses études. Mais une fois sur place, les choses ne se déroulent pas comme elle l'espérait. La jeune fille va devoir malgré tout s'adapter à cette nouvelle vie et se faire de nouveaux amis... (source : Allociné.com)
Les raisons d’y jeter absolument un œil ! (mon avis critique après visionnage de la Saison 1) : Felicity est, comme je l’indiquais en préambule, une des toutes premières séries Bad Robot, et celle qui lança véritablement la carrière de J.J. Abrams dans l’univers télévisuel. Parmi les autres noms que l’on peut mentionner parmi l’équipe ayant travaillé sur la série, on peut mentionner Matt Reeves, co-créateur de la série, réalisateur de Cloverfield et Dawn of the Planet of the Apes; Jennifer Levin, qui a travaillé comme scénariste sur les séries Brothers & Sisters, Unforgettable mais aussi et surtout… Beauty and the Beast, de la CW ; Ed Redlich a lui travaillé sur les séries The Practice, Without A Trace (FBI : Portés Disparus, en VF) ou encore Unforgettable également.
Quand on revoit Felicity désormais, et qu’on a connu le paysage télévisuel des années 90, on ne peut s’empêcher de penser à d’autres séries ayant mis en scènes des héroïnes à la fois fortes et fragiles, aux histoires de cœur compliquées. La voix-off et l’idée de la série, une étudiante décidant de choisir comme ville New York pour poursuivre ses études renvoient immanquablement à Ally McBeal, ainsi que les personnages quelque peu extravagants, comme Javier, le responsable homosexuel du café où travaille Felicity, ou Sean, qui cherche à faire fortune en essayant d’inventer différentes inventions par exemple (on croirait parfois voir une version masculine du personnage d’Elaine Vassal), le caractère très introspectif et psychologique à Buffy. Et donc est-ce que la série vaut le coup ? Oui, parce qu’elle est la 4ème grande série des années 90 sur les tourments de l’adolescence et la difficulté à rentrer dans la vie adulte, après Buffy, the Vampire-Slayer, Ally McBeal (même si les personnages sont de jeunes adultes, leur manque de maturité émotionnelle est flagrant pour certains, et leur comportement dans leur appréhension de relations sentimentales est digne d’adolescents parfois), et Dawson’s Creek. Oui, parce qu’elle possède en germe toutes les qualités et certains des thèmes des séries initiées par J.J. Abrams, comme ALIAS ou LOST. En plus de nous permettre de faire découvrir plusieurs des acteurs et actrices que l’on reverra dans ALIAS: Greg Grunberg, bien sûr (ami d’enfance de J.J., il apparaît dans plusieurs des productions Bad Robot), Kevin Weisman le temps d’un épisode, Amanda Foreman, ou… Jennifer Garner, dont le talent, encore en germe, laisse percevoir tout son potentiel le temps des quelques scènes et épisodes où elle apparaît.
Oui, enfin, parce que Felicity est une comédie dramatique réussie sur le milieu étudiant, période de la vie aussi essentielle et formatrice que le lycée, finalement peu exploitée à la télévision. (Est-il difficile d’écrire sur cette période ?). La série traite ses sujets avec beaucoup de sensibilité et de justesse, portée par Keri Russell, absolument adorable et charmante dans le rôle de cette jeune étudiante parfois un peu naïve. L’ambiance particulière de la série (ah, les années 90, où les séries se définissaient d’abord et avant tout par leur ambiance !!) est douce-amère, mais jamais totalement triste, même si la plupart des histoires de cœur mises en scène sont malheureuses. Certaines scènes placent leurs personnages dans des situations parfois désagréables mais jamais méchantes. Dans Felicity, on est à l’école du ressenti, et l’on cherche à mettre des mots sur les sentiments épars que l’on vit. Tout comme Ally McBeal, la série creuse les tréfonds de la personnalité de ses personnages, irrémédiablement attachants, en particulier Felicity, jeune fille calme, douce et sensible (à l’image de la série), ainsi que Ben et Noël, les petits-amis idéaux de ce type d’aventures. De ce fait, tous les stratagèmes narratifs pour laisser s’exprimer les personnages se déploient : aussi bien les séances avec un conseiller, que les prises de paroles en cours, le regard face caméra lorsque Sean souhaite réaliser un documentaire, ou le gimmick introductif de chaque épisode de la Saison 1 : Felicity, seule dans une chambre, enregistre des messages audio sur un magnétophone, à destination d’une certaines Sally, que l’on devine plus âgée, dont on entend parfois les réponses. Une présence mystérieuse, réconfortante, qui pourrait rappeler peut-être aussi la manie de Dale Cooper dans Twin Peaks de procéder de même. Mais pour une fois, ce recours à la voix-off est pertinent et cohérent, là où dans d’autres cas, elle peut apparaître comme la solution de facilité. Concernant le fond des intrigues, pas de grandes surprises, les passages obligés auxquels on peut s’attendre apparaissent, révision et passages d’examens, fêtes étudiantes, ainsi que les traditionnelles fêtes rythmant l’année comme Thanksgiving. Ainsi que, comme pour toute série du genre qui se respecte, l’incompréhension de parents parfois lointains, absents, qui doivent bon gré mal gré suivre de loin leurs enfants grandissants sans eux, et les difficultés à communiquer que cela engendre.
En bref : Felicity est une série à voir et à revoir, à redécouvrir absolument. Elle fait partie des grandes séries des années 90, présentant une écriture et une interprétation de qualité, à servi de matrice à l’excellente série ALIAS bien entendu, et a révélé un scénariste brillant, que certains aiment à réduire à un simple producteur et créateur de concepts. Bien sûr, le ton de la série demande qu’on ait quelque peu la patience de s’y attarder, mais ce n’est pas la première ni la dernière. Son manque de succès, surtout en France à l’époque (faute d’une diffusion adaptée, la série ayant été lâchée le samedi après-midi, dans la même case-horaire que Dawson’s Creek, horaire qui ne lui correspondait clairement pas) est une véritable injustice pour une série fine et sensible.
Et le Mystère ?... : Une série produite par J.J. Abrams ne serait rien sans un grand mystère maintenant en haleine et suscitant l’intérêt du spectateur. Lui aussi est déjà présent en germe. A travers la Boîte Mystérieuse de Meghan, la colocataire de Felicity, qui tient à ce qu’elle ne soit pas ouverte, et met en garde à plusieurs reprises la jeune fille à ce sujet. Qu’’y a-t-il à l’intérieur ? Mystère. Ce que l’on sait, c’est que les parents de Meghan, croyant qu’elle appartenait à Felicity, confrontent la jeune fille, s’inquiétant de ce qu’ils y ont découvert. Le téléspectateur, lui, en restera sur sa faim. Au terme de la Saison 1.
Le Générique d’ouverture : à l’image de la série, accompagné par une chanson interprétée par… Amy Jo Johnson (hé oui, la talentueuse Amy Jo chante aussi, la série permettra de le découvrir d’ailleurs), il insiste sur les instants fugaces de la vie d’étudiants. Succession d’instants choisis, il fait se succéder des photos en noir & blanc de Felicity, seule ou avec ses amis, souriante ou mélancolique. Et illustre à merveille les thèmes de la série : rêverie, réalité, joie, tristesse, mélancolie. Chaque instant compte, mais ou parce qu’il est éphémère.