Accor a-t-il réussi sa "transformation numérique" ? Un article s'interroge.
Surprise, pour commencer. Les plates-formes de réservation sont une bonne nouvelle ! Car elles lui apportent des clients. (Ne serait-ce pas ce que les compagnies aériennes appellent du "yield management" ? Il s'agit d'augmenter le remplissage en abaissant les prix pour les places qui ont du mal à se remplir.) Moins bien : ce qu'il gagne en remplissage, il le perd en prix. La raison n'est pas claire. Les sites de réservation ont-ils une forme de monopole ? Ou les hôtels ont-ils tellement peur de perdre des clients qu'ils se livrent une guerre des prix ?
Curieusement nulle part l'article ne parle du client. S'il était question de lui, on nous dirait peut-être que la façon la plus économique de gagner sa vie est de le "fidéliser". Comment fidéliser un client ? La question est laissée, en exercice d'application, à Accor. Mais, si je prends mon cas, la réponse est : le service. Pour le compte de mes missions il m'arrive de fréquenter des hôtels "de luxe". Des repas à la relation client rien tout est médiocre, et, très très loin de l'image que l'établissement veut se donner (et de ce que l'on a dans une pension de famille). Seule exception : récemment, j'ai trouvé un hôtel sympa à Saint Malo (Oceania). En dépit d'une vague asiatique qui s'était abattue en même temps que mes clients sur lui, et qui avait saturé ses installations, le personnel était détendu et souriant, amical, et serviable. J'ai eu l'impression que l'hôtel lui appartenait. Et j'ai eu envie de revenir. Fait sans précédent.
Si l'on parlait du client, on dirait aussi, comme mes anciens patrons : "qui a bu, boira". C'est généralement les plus gros clients qui peuvent consommer encore plus ! Cela vous donne des idées ?
Tout ceci est-il question de numérique ? La relation client est avant tout humaine. Simplement, il faut s'inscrire dans les usages du moment. Et Internet y tient une place. Mais pas la même en fonction du client. Et parfois nulle. Pour comprendre ceci, il faut faire une étude du marché. Pour le segmenter. Rien de nouveau.
Le principal problème d'Accor semble, lui aussi, un classique de la stratégie : un goulot d'étranglement s'est glissé entre lui et son marché. Pour établir un rapport de force équilibré, il lui faut jouer avec les forces du marché. C'est à dire diviser pour régner : favoriser l'émergence de concurrents ou renforcer ceux qui existent, quitte à construire une centrale de réservation avec d'autres hôteliers. Mais, si Accor s'est fait doubler, n'est-ce pas, encore une fois, parce qu'il s'est coupé de son marché ? Paradoxe de l'entreprise gestionnaire : lorsque l'on veut maximiser la "valeur actionnaire", on vide l'entreprise de ce qui fait sa valeur ?