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Numérique et tourisme : les députés au rapport!

Publié le 03 mars 2015 par Jlboulin @etourismeinfo

Le tourisme numérique est tendance chez les responsables politiques. La preuve, les rapports se multiplient sur le sujet. Le plus marquant est sans doute la publication d'un rapport d'information sur l'impact du numérique sur le secteur touristique français au sein de la commission des affaires économiques de l'Assemblée Nationale. Les deux auteurs du rapport, les députés Daniel Fasquelle et Pascale Got ont présenté leur travaux ce mois de février.

Rapport parlementaire

A la lecture de ce rapport d'une centaine de pages, on a l'impression qu'enfin, il existe une certaine lucidité sur ce qui vient de se passer durant les quinze dernières années. Quelques extraits  en témoignent :

"Inutile de voir l’outil numérique comme une menace : reconnaissons-le plutôt comme une opportunité nouvelle. Nous n’avons pas le choix car si les acteurs du tourisme français ne s’occupent pas suffisamment du numérique, en revanche, les acteurs du numérique n’hésitent plus, depuis plusieurs années, à s’occuper du tourisme"

A propos de la fameuse plateforme nationale de commercialisation en ligne, dont les différents échecs sont relevés "’il est désormais acquis qu’un institutionnel a du mal à être un bon acheteur et un bon vendeur". Noterait-on une certaine prise de conscience, en même temps que l'on annonce la fermeture définitive d'Hexatourisme? Comment ça, il serait temps?  :-)

Dans la deuxième partie du rapport, qui est plus largement consacrée à l'impact des géants du web sur le tourisme, le rapport se penche sur la question des OTAs, évoquant un "rapport schizophrène des hôteliers" avec les booking et consort : ils ne peuvent s'en passer mais les subissent. A propos des contentieux en cours, le rapport admet que "la bataille juridique ne saurait toutefois servir de paravent" à une situation bien ancrée. Et que "les professionnels de l’hébergement marchand n’ont pas le choix : ils doivent apprendre à optimiser l’usage des OTA et se fédérer pour pouvoir peser dans le rapport de force."

Sur la question des avis et d'une norme AFNOR pour les encadrer "Il faut cependant être lucide : face à la masse en question, la régulation s’opère surtout par la médiatisation de certaines critiques et la veille en matière d’e-réputation. Il y a beaucoup à faire en la matière pour que les professionnels se défendent mieux"

En clair, la première partie de ce rapport montrerait que les rapporteurs et donc derrière eux les pouvoirs publics ont pris conscience de ce qui vient de se passer.

C'est dans la troisième partie du rapport, intitulée "mieux exploiter notre potentiel touristique dans un monde hyperconnecté" que les choses se gâtent. Derrière de bonnes intentions, telles que "il faut que l'industrie touristique française achève sa mue numérique", on trouve une liste d'actions qui tiennent de l'inventaire à la Prévert. On passe de l’innovation dans le domaine du m-tourisme ou de l'exploitation des données à la mise en place d''un plan de reconquête industrielle à  l'intégration de la dimension numérique dans les programmes de formation, etc.  Ce sont toujours de bonnes idées, mais qui restent uniquement des idées... (tout au moins dans ce rapport). Il y a finalement peu d'éléments prospectifs qui se dégagent.

Transformer Atout France en Agence Suisse Tourisme?

A priori, les rapporteurs ont été enthousiasmés par l'audition du directeur de l'agence Suisse Tourisme. "En l’état, Atout France est davantage un prestataire au service des collectivités qu’un véritable pilote. Il convient de renverser cette tendance, à l’image du fonctionnement de l’agence Suisse Tourisme, dont nous avons rencontré l’un des directeurs.". La solution magique helvète?  "Un séminaire annuel réunit ainsi l’ensemble des responsables territoriaux et aboutit à l’élaboration d’une feuille de route commune". Et hop, un séminaire avec l'ensemble des CRT, offices de tourisme et CDT, et la Destination France marchera sur des roulettes...

Concernant les offices de tourisme, le rapport indiquent qu'ils "doivent  doivent ainsi se réinventer sur ces deux pans de leur activité : d’une part leur rôle d’assistance et de conseil aux touristes, d’autre part leur mission de coordination des prestataires locaux. Ces derniers sont du reste demandeurs de services nouveaux, qui pourraient être mutualisés : accompagnement dans leur appropriation des outils numériques, pilotage de nouvelles formes d’actions collectives. L’office doit accentuer sa logique de marketing de services en complément de ses services traditionnels. L’office ne constitue plus un point de passage obligé, c’est lui qui doit aller au contact des visiteurs et « sortir de ses murs » pour leur apporter la plusvalue que des services standardisés ne sont pas en mesure de leur offrir. De nouveaux outils de diffusion de sa propre information peuvent être déployés à cet effet, avec par exemple des bornes accessibles 24h/24."

Là aussi, on aurait pu aller plus loin que la désormais inévitable borne devant l'office de tourisme pour parler d'une réorganisation territoriale de l'accueil.

Le parlement va légiférer

Un chapitre entier des propositions est consacré à un arsenal de mesures règlementaires visant à redéfinir le cadre juridique des professions du tourisme. On retrouve dans cette partie des tentatives de réponse au débat sur les OTAs (demander à booking d'être immatriculé chez Atout France, par exemple.), l'information de l'internaute, la fiscalité, etc.

Une phrase est intéressante dans le paragraphe sur le la règlementation applicable aux hébergements touristiques : Il serait opportun qu’à l’occasion de la révision concomitante des grilles de classement (en 2015, NDLR), s’engage une réflexion sur le sens même du classement officiel, à l’heure où les « étoiles qui  comptent » sur Internet, sont autant celles des sites d’avis en ligne que celles du panonceau officiel.  Une ouverture vers une vraie évolution du classement?

Et les initiatives locales?

Tout au long du rapport, les références sont empruntées à des réussites à l'étranger, ou à des initiatives de groupes privés (comme La Poste pour la formation auprès des TPE). Mais, à l'exception du Wellcome City Lab, expérience originale très justement mise en avant, le rapport s'inspire peu des initiatives locales. Pas un mot par exemple, sur les 1200 animateurs numériques de territoires formés et les milliers d'entreprises accompagnées par ces ANT. Voilà un modèle qui marche et qui pourrait être généralisée. Pas un mot sur les organisations locales innovantes en matière de stratégie numérique, ou sur les schémas d'accueil... Pourtant, les rapporteurs ont auditionné le président d'Offices de Tourisme de France, mais ils n'ont pas retenu cet aspect-là de son témoignage, semble-t-il... Dommage! 

C’est dans un autre rapport qu’il faut aller chercher cette valorisation des initiatives locales. Un rapport qui est de niveau régional, réalisé par le Conseil économique et social (CESER) de Basse-Normandie. Le rapporteur, Jacques Belin, met en avant  dans ce document sur le tourisme numérique en Basse-Normandie l’ensemble des réalisations opérées par la filière institutionnelle touristique : plans de formation dédiés, action des animateurs numériques de territoire, expériences innovantes dans des offices de tourisme comme La Hague ou Cherbourg, cités pour la cohérence de leurs actions. Il faut dire que le rapporteur n’est autre que le directeur du Centre International des congrès de Deauville qui accueille chaque année Tourisme Numérique, conférence nationale sur le etourisme, qui se déroulera cette année les 23 et 24 mars... Comme quoi, il faudrait sans doute que les auteurs des rapports parlementaires prennent un peu plus le temps d'aller voir sur le terrain ce qui se passe...

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