Magazine Culture

Critique Ciné : Chappie, A.I. intelligence artificielle

Publié le 06 mars 2015 par Delromainzika @cabreakingnews

Chappie // De Neill Blomkamp. Avec Sharlto Copley, Dev Patel, Hugh Jackman et Sigourney Weaver.


Après District 9 et Elysium, Neill Blomkamp est de retour. Chappie c’est sa vision de A.I. (Intelligence Artificielle) de Steven Spielberg. Le film n’a pas nécessairement été très bien accueilli par la critique de partout dans le monde mais il est pour moi la preuve que ce réalisateur est un génie. Il utilise ce film pour induire tout un tas de choses et notamment reposant sur la légitimité des robots dans notre quotidien (surtout pour nous sauver de la criminalité) ou encore sur les problèmes éthiques que posent une intelligence artificielle. Il va même s’intéresser à Johannesburg et nous propose une vision de cette ville complètement rongée par le crime, à la pauvreté ascendante et avec une solution : les robots policiers qui ont fait chuter le crime dans la ville et qui sont devenus de vraies stars rendant Johannesburg beaucoup plus sûre. Le fait est que ce film est plein de niveaux de lectures et n’a de cesse de poser de questions. A commencer par le personnage de Dev Patel qui pose la question de l’intelligence artificielle et de son utilité. Après tout, pourquoi avoir envie de créer une intelligence qui serait plus forte que celle des êtres humains, qui pourrait donc avoir le libre arbitre et qui pourrait se rebeller quand elle veut.

Dans un futur proche, la population, opprimée par une police entièrement robotisée, commence à se rebeller. Chappie, l’un de ces droïdes policiers, est kidnappé. Reprogrammé, il devient le premier robot capable de penser et ressentir par lui-même. Mais des forces puissantes, destructrices, considèrent Chappie comme un danger pour l’humanité et l’ordre établi. Elles vont tout faire pour maintenir le statu quo et s’assurer qu’il soit le premier, et le dernier, de son espèce.

Chappie tente de nous montrer qu’une intelligence artificielle peut être dangereux mais aussi quelque chose que l’on peut canaliser si le Dr. Frankenstein qui l’a créé en fait un bon usage. D’ailleurs, le mythe de Frankenstein et sa créature est repris à merveille par Blomkamp dans Chappie. Il utilise ce mythe pour poser des questions intelligentes. Par ailleurs, le film débute sur une présentation très documentaire de l’univers et l’on retrouve ce que Neill Blomkamp aime dans son propre cinéma (et que moi aussi j’aime beaucoup). Il ne va pas forcément caméra au poing dans Chappie mais il y a des moments où l’on plonge dans l’intimité des personnages où il parvient à faire des effets de mise en scène particulièrement brillants. Par ailleurs, Chappie c’est aussi l’occasion de parler du crime et de la pauvreté dans une ville où il est en recrudescence. Les criminels dans ce film sont quelque peu clichés mais l’on oublie rapidement tout cela dès que le film vient nous offrir une vision plus poétique de la robotique. Car c’est très important la poésie dans des films de science-fiction. Je pense que Chappie est probablement ce que Neill Blomkamp a fait de plus intelligent. Il n’y a pas de grandes démonstrations comme dans District 9 et son côté archaïque mais pas non plus la grande sci-fi qui éblouie comme dans Elysium.

Chappie est d’ailleurs étrangement humble avec lui-même alors qu’il pourrait très bien montrer à quel point il est intelligent. Les niveaux de lectures sont donc plus subtiles. Il prend aussi le problème de la création du robot à succès qui détruit tous les projets qui avaient été développés en parallèle. La rivalité avec le personnage de Hugh Jackman est étrangement utilisée. Chappie n’en fait pas forcément grand chose au premier abord alors que l’on se rend rapidement que le but de ce film n’est pas de faire des combats de robots. Il va le sortir une fois (et j’ai retrouvé un peu des robots de District 9) et pendant 15 minutes on a donc une scène d’action qui en met plein la vue. Ensuite, Chappie pose aussi la question de la légitimité d’une intelligence artificielle. Chappie veut nous faire peur sur les progrès de la robotique et il a bien raison. Surtout que c’est fait avec une vraie innocence étrangement poétique. L’éducation de Chappie est tellement bien mise en scène que l’on est tout de suite émus. Que cela soit quand Mummy lit « Le Mouton Noir » à Chappie ou encore quand Chappie est blessé par la cruauté des humains.

Il y a aussi une critique très intéressante de la cruauté humaine envers les gens différents. Car au fond la façon dont les humains traitent Chappie c’est comme un robot alors qu’il a une conscience et qu’il peut très bien être comme tout être humain. Le mythe que le film créé autour de ce personnage émeut. Je ne compte plus le nombre de centilitres de larmes que j’ai versé devant ce film à sa fin. Car c’est beau et épique. Neill Blomkamp n’oublie pas non plus sa grande passion pour les paysages de bidonvilles. D’ailleurs, je trouve que cela permet de mieux se plonger dans l’univers et de ressentir plus facilement de la compassion car l’esthétique ne cherche pas à nous lécher les yeux, simplement à nous toucher. Afin d’incarner ses petites frappes, Neill Blomkamp a fait appel au groupe Die Antwoord (à qui l’on doit en 2012 la parodie de Lady Gaga se moquant du fait que cette dernière n’avait pas daignée venir en Afrique du Sud). Le film utilise une partie des titres du groupe mais aussi les membres afin d’en faire des personnages. Ils sont tellement différents de personnages que l’on a pour habitude de voir dans de la SF actuelle et pourtant très proche de ce que l’on pouvait voir dans la SF des années 80/90 (je pense par exemple à Total Recall première version).

Chappie c’est aussi une bande son de Hans Zimmer qui a probablement réalisé ici l’une de ses plus belles compositions. On est loin de ce qu’il avait pour habitude de voir et le changement est presque ici radical. Je ne m’attendais pas du tout à voir une bande son de ce genre là de la part de celui qui a abusé des notes dans celle d’Interstellar, oubliant presque qu’il y a un spectateur derrière son écran qui a aussi besoin d’être ému. La présence de Sigourney Weaver au casting est assez cocasse dans le sens où Neill Blomkamp réalisera le prochain volet de la franchise Alien donc je ne serais pas surpris que cela soit un rite de passage. On peut souligner la prestation de Sharlto Copley (District 9, Elysium) qui, sous les traits du robot Chappie surprend. Il injecte à ce personnage autant d’émotions que de rage.

Note : 9.5/10. En bref, un excellent film de SF, mieux maîtrisé que Elysium et plus propre que District 9 mais avec une vraie réflexion dedans.


Retour à La Une de Logo Paperblog