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L’infini de la bêtise humaine

Publié le 10 mars 2015 par Jacquesmercier @JacquesMercier

« On vient de découvrir une Terre nouvelle – à des millions d’années-lumière dans le ciel… » Je fredonnais l’autre soir cette chanson écrite par Charles Aznavour et Gilbert Bécaud et qui illumina mon adolescence en 1955. Nous possédions le disque à la maison dans la version 78 tours ! « Terre nouvelle » sortit en même temps que « Je t’appartiens » ou « Le marchand de ballons », soit un an avant la sortie d’un film romantique qui, même s’il n’était pas un chef-d’œuvre, m’avait lui aussi ouvert l’imaginaire et montré le merveilleux, le fantastique, l’inconnu : « Le pays d’où je viens ». C’était… il y a plus de 50 ans !

Quel bonheur de retrouver d’anciens titres de Bécaud chantés avec un si grand talent par mon ami Salvatore Adamo !

Aujourd’hui, on découvre souvent une Terre nouvelle ! Des chercheurs ont détecté, par exemple, il y a quelques années, en 2007, et pour la première fois, un système planétaire extrasolaire incluant une planète de type terrestre habitable. Cette autre « Terre » est située autour de l’étoile naine rouge Gl581, à 20,5 années-lumière de notre planète. Elle est la première à posséder à la fois une surface solide ou liquide et une température proche de celle de la Terre (de « notre Terre » ?). Ces points communs avec notre planète permettent d’imaginer l’existence d’une éventuelle vie extra-terrestre.

Ah ! Le vertige des bien nommés nombres astronomiques : une année-lumière équivaut à 9.460 milliards de kilomètres ! Le voilà notre nouvel « entre-temps » ! Celui où nous pouvons rêver et réfléchir, imaginer et faire des constats, s’interroger et s’apaiser.

John Eccles, un homme de science anglais, a écrit : « Le monde est non seulement plus étrange que nous l’imaginons, mais plus étrange que nous sommes en mesure de l’imaginer ».

Dans le livre de l’astrophysicien canadien Hubert Reeves, « Chroniques des atomes et des galaxies », que j’ai dévoré en quelques heures et que je vous recommande pour sa simplicité, on découvre parmi quelques photos qui illustrent ses courts chapitres celle du « champ profond », une photo prise par le télescope Hubble en orbite au-dessus de notre planète. On y voit une mer parsemée de galaxies à perte de vue, des points blancs, verts, rouges, bleus. « A quelle distance sont ces galaxies ? » commente l’auteur « En astronomie, on utilise comme unité de mesure l’année-lumière : le trajet parcouru par la lumière en un an. Les points bleus sont à plusieurs milliards d’années-lumière, donc plusieurs milliards de fois dix mille milliards de kilomètres ! Ces chiffres nous donnent une idée des dimensions vertigineuses de notre univers. »

Mais il poursuit en expliquant que cette photo ne nous en laisse voir qu’une partie, celle de l’univers observable. « Comme au bord de la mer, notre regard est limité par une « ligne d’horizon » imposée à la fois par nos instruments et la physique elle-même. Sur la mer, un bateau nous permettrait d’aller vérifier que la nappe aquatique s’étend bien au-delà de cette ligne. Mais pour l’espace, aurons-nous un jour semblable possibilité ? »

Certains l’imaginent, comme Bernard Werber dans « Le papillon de l’espace » !

Cependant le poète allemand de la fin du XVIIIe siècle, Novalis, note : « Nous rêvons de voyager à travers l’univers, l’univers n’est-il donc pas en nous ? »

L’autre soir, j’étais à Louvain-la-Neuve dans un amphithéâtre appelé « Georges Lemaître », celui du Big Bang. J’y ai vu une belle coïncidence. Pour Hubert Reeves, on peut conserver la comparaison du Big Bang avec une explosion si l’on conçoit qu’à cet instant chaque point de l’espace entre en explosion. Il n’est pas facile de nous représenter un univers immense (peut-être infini ?) et en explosion partout. Notre imagination est un peu dépassée… Un comble !

Cela dit, de pouvoir y songer donne déjà une idée de ce que l’homme est devenu, de son évolution spirituelle, tout en nous renvoyant à notre place, plus que microscopique, infinitésimale ! Grandeur et humilité. Toutes les réflexions que nous pouvons avoir autour de ce thème sont bénéfiques. A ceux qui se gargarisent d’un pouvoir, ô combien relatif, comme à ceux qui se sentent effacés dans leur condition d’homme.

La philosophe française Simone Weil, auteure de « La Pesanteur et la Grâce », note : « J’ai beau mourir, l’univers continue. Cela ne me console pas si je suis autre que l’univers. Mais si l’univers est mon âme comme un autre corps, ma mort cesse d’avoir pour moi plus d’importance que celle d’un inconnu. »

Mais pour terminer sur une note légère, je vous propose de faire référence à Albert Einstein, non seulement celui des deux théories de la relativité, la « générale » et la « restreinte », celui qui a expliqué que le temps ne passait pas à la même vitesse pour tout le monde, mais à celui qui joue du violon et qui tire la langue dans une photo mondialement connue. Celui-ci déclare, les yeux remplis de malice : « Il n’existe que deux choses infinies, l’univers et la bêtise humaine… mais pour l’univers, je n’ai pas de certitude absolue. »

univers

 



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