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La revanche des actionnaires

Publié le 13 mars 2015 par Guy Deridet

Une pluie de milliards tombe sur les actionnaires sous forme de dividendes et de rachats d’actions tandis que les indices boursiers battent des records ou retrouvent des niveaux inconnus depuis plusieurs années. Les bienfaits de cette pluie profiteront-ils à tout le monde? Beaucoup en doutent, y compris dans des milieux qui ne sont pas a priori hostiles au capitalisme.



La revanche des actionnaires
Financiers et chefs d’entreprise auraient-ils oublié le célèbre aphorisme de l’ancien chancelier allemand Helmut Schmidt «les profits d’aujourd’hui sont les investissements de demain et les emplois d’après-demain»?

Dans notre système économique, les profits sont légitimes, mais jusqu’à un certain point et selon l’usage qui en fait. Nécessaires et utiles lorsqu’ils servent à préparer l’avenir, ils peuvent susciter des réactions hostiles –et légitimes elles aussi– lorsqu’ils paraissent excessifs et servent plus à enrichir les actionnaires qu’à contribuer au développement de l’activité et au bien-être de tous. 
Main basse sur les profits

L’an dernier, les 500 grandes entreprises américaines qui entrent dans la composition de l’indice S&P 500 ont versé 350 milliards de dollars de dividendes (un record) à leurs actionnaires et elles ont procédé au rachat de leurs propres actions pour un montant de plus de 550 milliards, le plus élevé depuis 2007. C’est donc au total plus de 900 milliards de dollars qui sont revenus aux actionnaires. Dans le même temps, leur bénéfice opérationnel (celui qui provient directement de l’activité, sans tenir compte des opérations financières qui ont été réalisées au cours de la période) a grimpé, mais il n’est pas estimé à beaucoup plus de 1.000 milliards. En résumé, les profits de l’année ont pour l’essentiel été distribués; seule une petite part est restée dans les entreprises pour financer les développements futurs.

Le versement de dividendes aux actionnaires se justifie. C’est, en théorie, la rémunération du risque pris par ceux qui apportent leurs capitaux à l’entreprise. Et ce risque est bien réel. N’oublions pas le krach boursier de 2000-2001 et la crise financière de 2008-2009. A chacune de ces crises, ce sont des milliards qui se sont volatilisés.

Les financiers se félicitent aujourd’hui de voir à Paris l’indice CAC 40 flirter avec les 5.000 points, mais ils n’oublient pas que le même indice CAC 40 était monté jusqu’à  6.944 points en septembre 2000, niveau qu’il n’a toujours pas retrouvé près de 15 ans plus tard.

Dans le même temps, le prix des appartements à Paris a presque triplé, ce qui montre qu’on peut gagner plus d’argent en dormant qu’en investissant dans les entreprises. Il n’est donc pas tout à fait étonnant que le nombre des actionnaires ait fortement reculé en France, revenant de plus de 7 millions en 2003 à environ 4,1 millions selon les estimations les plus récentes.
Un seul objectif: enrichir l’actionnaire

Dans les périodes difficiles pour la bourse, le dividende permet aux investisseurs de long terme de garder patience. Sur longue période, il peut représenter plus de la moitié du gain enregistré. Jusque-là, il n’y a rien à dire: le capital, comme le travail, doit être rémunéré.

Le problème, c'est qu’un mouvement de pensée né dans les années 1970 aux Etats-Unis fait de la rémunération de l’actionnaire l’alpha et l’oméga de la gestion: les managers doivent avoir pour seule et unique préoccupation de faire des profits et de «créer de la valeur» pour l’actionnaire; c’est en agissant ainsi qu’ils réussiront le mieux à développer leur entreprise et, accessoirement, à créer de l’emploi.

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Ca, c'est la théorie. C'est beau et juste mais ça ne fait de mal à personne. Mais, en matière d'économie comme dans beaucoup d'autres domaines, il ne faut jamais oublier qu'il y a toujours une contrepartie. Si un fonds de pension fait des bénéfices, c'est parce que, quelque part dans lemonde, souvent à l'autre bout il y a des gens qui ont perdu de l'argent. Quand ce sont d'autres actionnaires, c'est normal; c'est la règle du jeu. On n'investit pas en bourse , on joue en bourse.

Cette obligation de contrepartie explique pourquoi les riches s'enrichissent de plus en plus, pendant que les pauvres s'appauvrissent en consquence. C'est ça le capitalisme, et certains en avaient prévu les errements depuis très longtemps. Karl Marx fait largement ricaner les économistes modernes, mais c'est lui qui avait raison et nos economistes, à quelques exceptions près, sont des billes, voire des salopards car ils savent tout cela depuis longtemps et loin de nous prévenir des dangers de ce système, ils en profitent lâchement.

Pour voir les effets dévastateurs du "jeu en bourse" sur la vie des gens de tous les jours il faut regarder l'excellente émission d'Elise Lucet, Cash Investigations, sur une facette bien reèlle de ces théories :

Quand les actionnaires s'en prennent à nos emplois 


N.D.L.R

Vous aurez noté que les actionnaires des fonds de pension que l'on voit dans cette émission ne ressemblent absolument pas à des rapaces, assoifés de dollars, mais sont de très gentilles vieilles dames, enseignantes en l'occurence, qui disent benoitement tout ignorer de la façon dont le fonds de pension, qui leur procure une retraite confortable, gagne leur argent.

C'est là la grande force de ce système pervers qu'est le capitalisme. Les personnes qui en vivent ne sont  en général pas conscientes  du mal qu'elles font. D'un point de vue plus global les pays du nord profitent depuis très longtemps de la faiblesse des pays du sud (n'est ce pas Mme Merkel ?) mais les habitants du nord ne sont pas conscients de cette situation. Comme jadis ceux qui profitaient de la traite des esclaves.

Dans ces conditions, ceux qui, eux, sont parfaitement au courant de la situation peuvent continuer tranquillement à tirer les ficelles et donc à engranger les bénéfices. Avec la complicité des économistes distingués.

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