Grappillages 2015 (1)

Par Mauss

Les esprits s'échauffant comme le climat, mieux vaut éviter les sujets qui divisent ou qui fâchent.

On va donc rester consensuel, en évitant d'évoquer le Soumission de Michel Houellebecq, le Cosmos de Michel Onfray (qui doit sortir mercredi) et autres publications de journaleux en mal de scoops mal évalués.

GASTRONOMIE

Souhaitant saluer Christophe Moret, l'ancien chef de Lasserre, maintenant au Shangri-Là place d'Iena à Paris, nous voilà donc, trois convives, pour un dîner dans ce nouveau palace parisien qui cherche encore ses marques.

Non point dans le restaurant l'Abeille, qui est l'ambition gastronomique de cet hôtel, ni dans le restaurant chinois qui aura du mal à être mieux que le Bonheur du Palais à Bordeaux (mais pas de jugement a priori), mais dans la partie informelle dénommée Bauhinia où les prix restent acceptables.

Et bien, si vous recherchez des sièges avec accoudoirs ou des banquettes à l'ancienne, c'est ici. Si vous voulez un accueil et un service alerte et parfaitement dans le ton d'une cuisine précise, généreuse, associant à des classiques français quelques mets résolument asiatiques, c'est ici. Si le calme environnant est important pour vos oreilles sans cesse agressées par des bruits de conversation trop proches ou des musiques d'ascenseur inventées par quelques tortionnaires anonymes, c'est encore ici.

On y mange mieux que bien, et la carte est importante sans être débordante. Certes, sur les vins, on doit pouvoir faire mieux mais il y a Duband : ouf ! on est saufs ! Par contre, question verres, va falloir que je dise quelques mots à l'intendant.

Christophe Moret qu'on a pu saluer semble bien à l'aise dans cette grande maison : tant mieux, car s'il y a un chef parisien avec autant de modestie et de qualités professionnelles niveau deux macarons, c'est bien lui. 

VINS

A tomber !

Un mien ami, soucieux de combler les trous monstrueux de mon éducation vineuse, m'a offert ce vin de Sancerre 1990. Le nom ne m'était pas totalement inconnu, mais c'est tout comme. Et bien les amis ! On frise le sublime. Une matière géante, un équilibre profond, un appel à la luxure comme pas deux ! Mais qui garde de nos jours dans sa cave des Sancerre plus de 24 ans ? Faut avoir une approche monacale du vin, fan de zou !

LECTURE

Etienne Klein dont les éditoriaux dans Le Point deviennent réguliers, à côté de ses activités universitaires, à côté de ses courses de dingo autour du Mont-Blanc, trouve encore le temps de publier des ouvrages de vulgarisation. Je viens de recevoir son dernier opus, bien agrémenté de dessins de Guillaume Dégé, intitulé "Y A-T-IL EU UN INSTANT ZERO ?", dans la collection Gallimard Jeunesse.

Un petit bijou

Cela se lit comme on déguste une tartelette aux myrtilles : avec gourmandise et sans trop de manières. les dessins à la Topor et quelques grandes citations donnent un rythme particulièrement agréable à la lecture.

Qu'il me soit permis de citer deux de ces pages où l'interrogation est géante :

"Admettons que le monde ait un commencement : comme ce commencement est une existence précédée d'un temps où la chose n'est pas, il doit y avoir un temps où le monde n'était pas, c'est à dire un temps vide. Or, dans un temps vide, il n'y a pas de naissance possible de quelque chose."

Emmanuel Kant

… et aussi…

"- Mais, Papa, Einstein a dit…

- Fiche moi la paix avec ton Einstein, je ne veux pas d'histoires avec les voisins."

Fernand Raynaud