Le selfie stick

Publié le 15 mars 2015 par Didier Vincent

Narcisse 2.0

Tendre la perche

Que se passe-t-il quand on vous appelle pendant que vous prenez un selfie ?

Soi et le monde ? Que nenni ! Le monde et soi. Le selfie est une révolution copernicienne inversée dans ce monde bien régressif, une sorte d'héliocentrisme de l'individu. Et même pas de l'individu : de sa tronche. Un tronchocentrisme.

Autisme pour autisme, ne pas demander à un Autre de vous prendre en photo mais confier cette tâche à une sorte de canne de golf pour avoir l'air bien con. D'autant plus quand vous avez un appel. Avant, on décrochait un combiné, maintenant, on décroche tout court de ce monde.

Les perchistes ne profitent plus de l'instant dans une immersion de couleurs, de formes, d'impressions mais focalisent toute leur attention à se cadrer dans un décor devenu secondaire. Le selfie est un filtre qui éloigne le monde dans la rassurance de l'idée de partage.

Au bout du compte, on aura, pour 100 photos différentes, 100 fois le même roboratif visage. moi ici, moi là, moi avec untel ou untel autre. Et 100 likes sur les réseaux qui vont authentifier votre vie. Des faux témoins. Cela me fait penser aux sauvages incultes qui détruisent un musée, faisant de cet acte un fond selfique pour exister. Cette même volonté d'effacer le monde (de le détruire) pour affirmer son identité.