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« Islam de France », explication des annonces du Gouvernement

Publié le 16 mars 2015 par Ncadene
Valls-Cazeneuve-Republique-reorganiser-islam-de-France-e1424977926401Retrouvez ci-dessous l’article de Louise Gamichon publié sur le site « fait-religieux.com » et reprenant mes propos expliquant les annonces gouvernementales, allant dans le même sens que les recommandations de l’Observatoire de la laïcité :

Le 25 février, le gouvernement annonçait la mise en place d’une instance de dialogue avec les représentants de l’islam de France. Cette instance devrait rassembler le Conseil français du culte musulman (CFCM), mais aussi des imams et des intellectuels, a précisé le ministre de l’intérieur, en charge des cultes, Bernard Cazeneuve lors d’un point presse.

Cette initiative a soulevé de nombreuses questions sur la Toile et les réseaux sociaux. Des Internautes se sont notamment demandé si cette intervention de l’État n’était pas contraire au principe de laïcité. Est-ce bien le rôle de la République de se mêler des affaires religieuses ?

« La laïcité ne signifie pas le mépris des religions. L’État doit dialoguer avec tous les citoyens, non-croyants ou croyants, et, sur les questions cultuelles, à travers leurs représentants », explique Nicolas Cadène, rapporteur général à Observatoire de la laïcité, organisme indépendant, rattaché au Premier ministre. « L’État ne va pas structurer unilatéralement le culte musulman. Il s’agit d’une démarche d’accompagnement afin de permettre le dialogue entre l’État et les représentants les plus légitimes. », poursuit-il.

La légitimité au cœur du dispositif

C’est donc au problème de représentativité qu’il faut répondre, et ce dans un but pratique explique le rapporteur général de l’Observatoire de la laïcité :

« L’État a besoin de référents pour discuter, par exemple, de la gestion des abattoirs temporaires durant la période de l’Aïd, qui est une question sanitaire et d’hygiène publique, de la gestion des cimetières ou encore des aumôneries dont la mise en place doit être assurée par l’État aux termes de la loi du 9 décembre 1905 ».

Pour ce faire, le gouvernement préfère un interlocuteur structuré, dans l’organisation duquel il n’est pas souhaitable qu’il intervienne trop : « Si l’État s’immisce trop, l’instance est délégitimée », explique Nicolas Cadène. Il souligne d’ailleurs que la nouvelle instance de dialogue avec les différents représentants du culte musulman « ne doit pas empêcher la réforme du CFCM ou d’autres instances ».

Depuis sa création en 2003, la légitimité du CFCM est mise en cause. Les représentants qui y siègent disposent d’un nombre de représentants qui dépend de la taille des mosquées. Plus un lieu de culte est grand, plus l’association aura de représentants, et donc de poids, au détriment des lieux de culte plus petits. Ainsi, le paysage musulman français est partagé entre l’Union des organisations islamiques de France (UOIF, réputée proche des Frères musulmans), la Grande mosquée de Paris (liée à l’Algérie), le RMF et l’UMF (de sensibilité marocaine) ou encore le CCMTF (Turcs). Cette répartition, de laquelle le CFCM n’arrive pas à se départir malgré la réforme en cours, pèse sur l’organisme.

« Les cultes structurés sont moins fragiles face aux dérives sectaires. Ils évitent plus facilement leur instrumentalisation ou une mauvaise interprétation de la religion par des ministres du culte autoproclamés », souligne Nicolas Cadène en faisant référence à l’extrémisme qui a sévi lors des attentats de Paris, dans lesquels 17 personnes ont été tuées par des hommes se réclamant de l’islam radical.

Un problème d’unité propre à l’islam ?

Les problèmes de représentativité de l’islam sont aussi aggravés par la multitude de branches et de courants qui le constituent, certains en conflit ouvert entre eux : sunnites, chiites, soufis… Comment parler d’une seule voix ? Cependant, les autres cultes n’ont pas été exempts de difficulté pour désigner des représentants. L’exemple des protestants est sans doute le plus probant, dans la mesure où, comme les musulmans, ils ne disposent pas d’une hiérarchie forte de type pape ou évêques :

« Les protestants eux aussi ont mis du temps à s’organiser de façon unitaire. La Fédération protestante de France (FPF) n’est pas un organisme unique, il existe également le Conseil National des Évangéliques de France (CNEF). Certains adhérents de la Fédération le sont aussi au Conseil, mais d’autres membres du CNEF ne sont pas à la FPF », souligne Nicolas Cadène, précisant que cette structuration « prend du temps ».

Des outils pour consolider un « islam de France »

L’État ne va donc pas intervenir dans les affaires des cultes à proprement parler. Il va plutôt proposer de réunir les interlocuteurs et mettre en place des outils de dialogue. La formation des imams sera ainsi discutée par la nouvelle instance, qui aura la charge de les diriger avant la mise en place d’une organisation du culte musulman réformée. En revanche, l’État pourra proposer des formations de langue française et des cours pour mieux comprendre la laïcité et le contexte national à destination des imams venus de l’étranger. De plus, le gouvernement propose de développer la recherche en islamologie, accessible aux imams, afin de créer un réseau d’universitaires à même de mener des travaux sur l’islam, la pensée musulmane et la philosophie orientale de manière plus générale. « Pas de théologie, mais un champ de recherches intellectuelles, indépendant, comme pour les autres religions », commente Nicolas Cadène.

Par ailleurs, l’Etat pourrait aider la nouvelle instance représentative des musulmans à mettre en place une fondation afin de financer des projets d’intérêt général. Le but : recueillir les dons des contribuables dans un cadre juridiquement plus sûr et permettre ainsi le financement d’activités culturelles ou socio-éducatives. Mais « pas cultuelles », souligne Nicolas Cadène.

Une telle organisation existe déjà : la Fondation des oeuvres de l’islam de France (FOIF), lancée entre 2005 et 2007. À l’époque, l’industriel Serge Dassault avait versé un million d’euro à la Fondation afin de lui assurer une existence pérenne. Mais cette somme serait toujours en attente d’utilisation à la Caisse des dépôts. La Fondation n’a jamais été opérationnelle.

Ces outils de formation et de financement participeraient au développement de « l’islam de France », ainsi dégagé des dépendances étrangères. Ils devraient être mis en place avant la fin de l’année.

Retrouvez l’article complet sur Fait-religieux.com.


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