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Noblesse d'Etat et droits culturels.

Publié le 27 mars 2015 par Ep2c @jeanclp

Certes, le titre de cette note relève du fort mauvais jeu de mots. Mais on aurait bien tort de ne pas être attentif à son contenu.

Le 12 novembre 20144, le Conseil économique, social et environnemental de la Région Midi-Pyrénées délibérait et votait à l’unanimité un avis élaboré sous l’autorité de la Commission « Santé - Social - Culture » intitulé Culture et lien social.

En conclusion de la séance, la parole a été donnée au représentant de l’État, directeur régional des affaires culturelles. Parole forte, qu'on en juge. J'avoue avoir été tenté de croire que tous ses collègues, la ministre et son cabinet partagent ses convictions. J'ai du rêver trop fort.

Intervention de Laurent ROTURIER

Directeur Régional des Affaires Culturelles de Midi-Pyrénées

Merci beaucoup Monsieur le Président, Monsieur le Président de la Commission, Messieurs les Vice-présidents, Mesdames et Messieurs les membres du Conseil Économique Social Environnemental Régional de Midi-Pyrénées...

Et vous me permettrez, s’il m’y autorise, d’adresser un amical salut de filiation à Jean-Michel LUCAS qui est présent dans cette salle.

Je me garderai bien d’avoir la prétention de conclure vos travaux Monsieur le Président. Mon intervention ne sera qu'une intervention forcément modeste au nom de l’État, dans le respect de l’Assemblée qui est la vôtre et du travail que vous avez mené.

Respect par rapport aux objectifs ambitieux que vous vous étiez fixés.

(…)

Vous avez pris comme premier sujet pratiquement, parmi d’autres tout aussi importants évidemment, les grands enjeux, les grands chantiers, l’aménagement du territoire, la recomposition territoriale, vous vous êtes saisi dès votre installation du sujet culturel qui, pour moi en tant que Directeur régional, était un sujet tout à fait majeur.

(...)

J’entendais tout à l’heure dans les interventions cette question qui est au cœur des préoccupations : y aurait-il une culture élitiste, une culture pour quelques-uns et de l'autre côté une autre culture qui ne serait pas dans cette ambition d’élite ? Je ne vais pas me lancer là dans un grand débat sur la polysémie du terme culture et sur ce que ce terme peut regrouper, mais je ne peux que dire combien j’ai apprécié dans l’avis que vous avez formulé que vous ayez pris ce risque de dire de quoi parle-t-on quand on parle de culture, et d’avoir retenu la définition qui a été celle de la déclaration de Fribourg de 2007. Je trouve que le Conseil Économique a pris un temps d'avance tout à fait conséquent par rapport à l'action publique en général.

Vous avez retenu cette notion d’une culture qui regroupe les valeurs, les croyances, les convictions, les langues, les traditions, les institutions qui sont parfois décriées mais qui sont aussi les outils du vivre ensemble, les outils de la culture, ces institutions doivent être dans cette dynamique, et les modes de vie par lesquels une personne exprime son humanité. Cette définition doit nous guider et doit guider l’action qui est la vôtre dans votre rôle, mais aussi l’action de l'État dans le champ qui est le sien.

Pour la DRAC, pour le ministère de la Culture, pour l'État, les thématiques que vous avez évoquées nous obligent à revoir les modes d’action traditionnels, à les revoir dans la notion d’un triple respect : le respect que l’on doit aux capacités des personnes, vous l'avez développé longuement dans les avis qui ont été exprimés, le respect des œuvres, le respect des acteurs. C’est cette notion de respect qui aujourd’hui est souvent la plus mise à mal, la plus bafouée, la plus violemment jetée en pâture. On le voit dans le quotidien, on le voit dans les pratiques et on le voit malheureusement dans les comportements de celles et ceux qui ont en charge de guider l’intérêt général. Dans cette époque de frilosité, dans cette époque de repli, dans cette époque d’inquiétude, dans cette époque de fragilité économique, la culture malheureusement se retrouve bien souvent comme étant le premier secteur dans lequel les remises en cause sont effectuées. Au niveau du ministère de la Culture nous accomplissons un travail interministériel qui intègre les questions de politique de la Ville, de Santé et d’Éducation, et nous avons développé ici en Midi-Pyrénées cette dimension des conventions Territoire Culture, qui sont destinées à aller sur des territoires où l’offre traditionnelle de la culture n'est pas la plus répandue.

(…)

Ce qui est important dans le travail que vous avez mené Monsieur le Président, c'est sa concrétisation et comment ce travail va pouvoir ensuite être pris en compte par les différents acteurs. Vous interpellez d’ailleurs dans votre avis le ministère de la Culture et la DRAC. Nous intégrons cet avis dans une période qui, contrairement aux idées reçues, n’est pas une période de recul de l'État ; les moyens d’intervention des services déconcentrés ont été non seulement maintenus, mais en volume légèrement augmentés, ce qui nous permet de pouvoir travailler de manière prévisionnelle sur les exercices qui viennent, en confiance et en partenariat avec les collectivités. L'action des ministres successifs, d’Aurélie FILIPPETTI, de Fleur PELLERIN, du gouvernement de Manuel VALLS, fait que la culture reste au centre des préoccupations.

(..)

Dans les préconisations que vous avez développées, j’en ai retenues plusieurs. La charte des valeurs partagées à l’évidence est une nécessité. Elle l’est d’autant plus que nous avons ici, dans ce territoire comme sur presque tout le territoire national, des équipements qui bénéficient de moyens importants de l’État, des collectivités, et le travail sur la charte des valeurs me paraît une nécessité qui doit s’engager immédiatement. Et je vous confirme, Monsieur le Président, la disponibilité des équipes de la Direction des Affaires Culturelles pour accompagner cette réflexion si l'assemblée délibérante du Conseil régional s’en saisit. Vous avez cette ambition de développer dans la charte la « capabilité » de la personne, de développer la palabre, évidemment ce sont des points dans lesquels on retrouve bien l'esprit de l’UNESCO et l’esprit de Fribourg qui nous intéressent et sur lesquels nous sommes disposés à avancer avec les collectivités. Vous avez également dans les préconisations souhaité que les politiques publiques soient plus transversales, cela rejoint pour moi ce qui est une des priorités de l’État aujourd’hui en matière culturelle, c’est d’instaurer une réelle responsabilité partagée. La culture n'appartient pas à l'État, pas plus qu’elle n’appartient à tel ou tel niveau de collectivité. Cette notion de responsabilité partagée est d’ailleurs au cœur des ateliers que le gouvernement va mener sur les territoires dans les semaines qui viennent dans le cadre de la réforme territoriale, et dans le cadre de la réforme de l’État. Il serait tout à fait intéressant et intelligent que Midi-Pyrénées, et peut-être Languedoc-Roussillon demain, en fassent un champ d’action tout à fait novateur. On trouvera bien les moyens de développer.

(...)

Enfin sur les questions d’évaluation, vous avez émis des préconisations qui ne peuvent qu’intéresser l’État. Non seulement nous agréons l’ensemble de votre avis pour avoir pu en discuter au fur et à mesure qu’il s’élaborait, mais nous en sommes demandeurs parce que la culture n'est pas l'affaire de l'État, la culture est un sujet qui doit nous réunir, qui doit nous rassembler et la responsabilité partagée de la culture est pour nous le vecteur essentiel de l’action qui sera la nôtre demain. En terminant mon propos, Jean-Michel LUCAS ne m’en voudra pas de lui emprunter cette citation, il rappelait dans un petit ouvrage ce mot de Georges PEREC « il n’y a rien d'inhumain dans une ville (ou dans la campagne), sinon notre propre humanité ». Je crois Monsieur le Président, Monsieur le Vice-président, que sur cette réflexion-là nous pouvons ensemble bâtir une meilleure capacité des personnes et faire en sorte que la culture soit au cœur du rassemblement démocratique qui doit être le nôtre.

Je vous remercie.

On trouvera l'intégralité de cette noble intervention précédée de l'avis du CESER Midi-Pyrénées, fort bien charpenté, au demeurant, en cliquant ici.

Et on comprendra mieux son contenu grâce à cet extrait de la page Remerciements de l'avis en question.

 

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