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Tragédie dans l’ouest montagneux de la C.I : nouvelle poudrière ?

Publié le 02 avril 2015 par Novelist225

Située à environ sept cent kilomètres de la capitale économique de la Côte-d'Ivoire, et pourvue d'un superbe panorama, la région de Biankouma dans l'Ouest montagneux ivoirien, vit des jours sombres qui laissent présager du pire. En effet, tous les signaux d'une soudaine et brutale déflagration liés à un conflit foncier semblent réunis.

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A la lecture de l'article sus mentionné, quelques zones troubles sautent instantanément aux yeux.

En effet, le rapportage des faits semble " crédible " jusqu'à l'épisode du cadavre retrouvé dans le champ à la date du 25 Mars. Assassiné le 23 Mars, le cadavre aurait seulement été retrouvé le 25 Mars dans son champ. Cela paraît improbable, quand on sait que dans un village aussi petit, une disparition se remarque instantanément, entraînant illico la recherche du disparu. A ce titre, le premier lieu à investiguer serait le champ, la plantation, vu que c'est la destination première du disparu le jour du drame.

En outre, étant donné que les morts ne communiquent pas, et qu'il ne semble y avoir de témoins oculaires externes aux antagonistes, qui a pu relater avec précision le triste élément déclencheur de la spirale de violence ?

Nous tenons d'une autre source bien introduite dans la région qui s'appuie sur des témoignages concordants :

" La tragédie est arrivée suite à la mauvaise maîtrise d'un feu champêtre, qui a brulé quelques plants de cacao du burkinabé. Alertés par le jeune Toura à l'origine du feu, les Burkinabés viennent et constatent quelques plants frontaliers au champ brulé, fanés ou brulés. Ils s'en prennent à Benson, le frère Toura, le ligote et le lynchent. Son épouse qui assistait à la scène de loin, court alerter les villageois. Les villageois vont découvrir le corps sans vie aux yeux extrait des orbites...c'est la version que j'ai eu après avoir passé un coup de téléphone à Dio, ça reste à vérifier mais assez de témoignages confirment. "

Sensible à la volonté louable des uns et des autres de ne pas en rajouter, de donner dans l'apaisement, il nous semble cependant primordial de ne pas biaiser la vérité, si l'on veut que se rétablisse durablement un climat de paix.

En outre, pour aller dans le sens d'un réel apaisement, il faudrait que la médiation prenne en compte les exigences des villageois en conformité avec leurs us et coutumes. Le sang humain a du prix : en pareil cas, au-delà des excuses, il faudrait des mesures symboliques assez expressives.

Par ailleurs, sensibles à la préservation de la biodiversité de l'Ouest montagneux à l'heure où le monde entier s'investit dans la lutte contre le réchauffement climatique, nous interpellons les autorités locales et nationales. Il y a un réel danger à une exploitation excessive des terres et massifs verdoyants de l'Ouest montagneux.

Primo, et c'est un devoir régalien de l'Etat, le contrôle des flux migratoires internes et externes doit être traité avec rigueur. Filtrer aussi les arrivants pour ne pas que se mêlent des meutes de loups à de paisibles brebis en quête d'un pâturage meilleur.

Il faudrait également un briefing des populations candidates à l'exode sur des terres données, les sensibiliser sur la personnalité des hôtes, sur les us et coutumes, pour amoindrir les effets pervers d'un choc culturel.

Il est en l'occurrence complètement aberrant que des populations allogènes interdisent à des autochtones, chants et danses de réjouissances au clair de lune en sachant qu'ainsi à toujours évolué leur communauté. L'Ouest montagneux s'est toujours distingué par son riche patrimoine culturel. Les populations ont l'habitude d'exprimer à travers chants et danses, leurs joies, tourments, aspirations en des lendemains meilleurs. Les contes aux tout-petits sont toujours rythmés de chants et cantiques anciens ou improvisés.

Nous n'avons de cesse de vanter le charme, la beauté de ces terres miraculeusement préservées d'un capitalisme débridée, du fait de populations cultivant l'harmonie avec la nature. Il serait vraiment dommage et dommageable que des intérêts mercantilistes remettent tout en question, d'autant qu'on nous rapporte qu'usant de mesures d'intimidation face à des paysans pauvres et illettrés pour la plupart, des cadres de l'Administration s'accaparent des lopins de terres pour ensuite les brader à des allogènes.

La Côte-d'Ivoire demeure un Etat souverain, garant du bien-être de ses populations ; inutile de lui donner des allures de camps de peuplement avec à la clé des rancunes amassées qui tôt ou tard conduiront à une déflagration meurtrière. C'est dans le présent, que se construit l'avenir; ainsi que l'atteste un proverbe toura.

Nos populations n'ont que trop cher payé le prix de la sanglante crise politico-militaire en Côte-d'Ivoire.

Félicité Annick Foungbé Zimo, écrivain et analyste, native de l'Ouest montagneux, auteure de La légende de Manlé aux éditions Balafons.


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